Une nouvelle ordonnance en matière de droits d’enregistrement et de succession a été votée le 6 juillet 2023 par le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale.
Parmi les mesures qui entreront en vigueur le 1er janvier 2024, il y a l’instauration d’un nouveau tarif réduit de 3% sur la première tranche de 15.000 € au bénéfice de personnes physiques imposées d’après les tarifs entre frères et sœurs, entre oncles ou tantes et neveux ou nièces et entre toutes autres personnes, que le défunt désigne dans son testament.
Vous trouverez de plus amples informations sur l’instauration de ce nouveau tarif réduit dans l’article suivant.
En Région de Bruxelles-Capitale, l’article 48 du Code des droits de succession établit les taux d’imposition selon quatre tarifs progressifs par tranches, qui dépendent du lien de parenté ou de l’absence de lien de parenté entre le défunt et l’héritier.
La réforme opérée par l’ordonnance du 6 juillet 2023 introduit un nouveau taux réduit de 3 % sur la première tranche de 15.000 € pour certaines personnes physiques que le défunt désigne dans son testament. Il s’agit des frères, sœurs, oncles, tantes, neveux, nièces ou de personnes non apparentées au défunt. Le (futur) défunt est libre de choisir de désigner un ou plusieurs bénéficiaires. S’il en choisit plusieurs, le taux réduit de 3 % s'appliquera à tous dans la limite de 15.000 € selon une formule de calcul qui vous est plus amplement exposée ci-dessous.
Le nouveau régime fait l’objet d’un futur article 60quinquies qui dispose :
« Par dérogation à l'article 48, le taux du droit de succession ou du droit de mutation par décès dû par les personnes physiques dont l'acquisition est imposée selon les tarifs des tableaux II, III ou IV de l'article 48 est réduit à trois pour cent, selon les conditions et modalités visées au présent article.
Le taux réduit visé à l'alinéa 1er n'est accordé qu'aux personnes physiques que le défunt a désignées sans équivoque dans un testament non révoqué comme étant celles qui peuvent bénéficier de l'application du taux réduit visé à l'alinéa 1er.
Le taux réduit visé à l'alinéa 1er est appliqué sur un montant global, pour toute la succession, de 15.000 euros. Lorsque le défunt a désigné plusieurs personnes conformément à l'alinéa 2, le montant sur lequel est appliqué le taux réduit visé à l'alinéa 1er est réparti entre ces personnes en fonction de leurs parts dans la valeur imposable des biens qu'elles recueillent dans la succession du défunt ou qui sont imposés dans leur chef au droit de succession ou au droit de mutation par décès en application des articles 4 à 12.
Lorsque la part recueillie par la ou les personnes visées à l'alinéa 2 dépasse le montant visé à l'alinéa 3, le taux réduit visé à l'alinéa 1er est appliqué sur la première ou les premières tranches des tarifs des tableaux II, III ou IV de l'article 48 qui correspondent à ce montant ».
Cette nouvelle mesure exprime la volonté du législateur bruxellois de moderniser, autant que faire se peut, la matière des droits de succession et de la rendre plus conforme aux pratiques actuelles.
L’exposé des motifs expose ainsi que de plus en plus de personnes, qu'elles aient ou non une « famille », c’est-à-dire un conjoint ou des enfants, expriment leur désir de léguer leurs biens par testament à certains bénéficiaires qui, bien qu'ils n'aient aucun lien de parenté avec elles, leur ont apporté un soutien essentiel en raison de circonstances telles que l'âge, la santé défaillante ou la perte d'autonomie par une assistance en matière de mobilité, une aide dans le cadre des tâches ménagères ou même la gestion des affaires administratives.
Par ailleurs, la réforme fédérale du droit civil successoral entrée en vigueur le 1er septembre 2018 a élargi les possibilités de transmission à titre gratuit en portant la quotité disponible à 50%, indépendamment du nombre d'enfants. Cette réforme s'inscrit dans la vision moderne selon laquelle la transmission du patrimoine par décès n'est plus limitée aux seuls membres de la famille nucléaire ou élargie, et qu'il est désormais essentiel de reconnaître une plus grande liberté de choix dans le cadre de la transmission de son patrimoine à titre gratuit.
A cet égard, les taux d'imposition prévus pour les droits de succession et les droits de mutation par décès, qui augmentent au fur à mesure de l’éloignement du lien de parenté avec le défunt constituent bien évidemment un obstacle à cette liberté de choix.
Le mécanisme est simple et les personnes visées aux tarifs II, III et IV des droits de succession, soit toutes les personnes autres que le conjoint ou les descendants en ligne directe du défunt, pourront bénéficier d’un taux réduit de 3 % sur la première tranche de 15.000 € qu’ils recueilleront dans la succession.
Le conjoint ou les descendants en ligne directe bénéficient déjà du taux de 3 % sur la première tranche de 50.000 € de sorte qu’il n’y avait aucun intérêt à les associer à cette nouvelle mesure.
Il est particulièrement important de noter que le bénéfice du taux réduit implique que les personnes qui pourront en bénéficier soient expressément désignées dans un testament comme pouvant bénéficier de ce tarif.
La simple mention d’un ou plusieurs légataires ne suffira donc pas. Il faudra en outre préciser spécifiquement que le bénéfice de l’article 60quinquies leur sera accordé. Le testateur pourrait faire le choix de désigner plusieurs légataires mais de n’accorder qu’à certains le bénéfice du taux réduit de 3 %. Nous en verrons un exemple ci-après.
Dans le cas où le testateur désignerait plusieurs légataires pouvant bénéficier du taux réduit, ceux-ci se répartiront le bénéfice de la mesure en fonction de leurs parts dans la succession du défunt.
Cette mesure offre la possibilité de réaliser des économies d'impôts significatives, pouvant atteindre 2.675 € pour les frères et sœurs, 4.800 € pour les oncles, tantes, neveux et nièces, et 5 550 € pour toutes les autres personnes (cousins, amis, etc.).
Madame X qui est résidente bruxelloise, décède en laissant un patrimoine de 100.000 €. Elle laisse une fille unique Y. Elle institue légataire un ami qu’elle désigne comme bénéficiaire du nouvel article 60quinquies. A bénéficie d’un legs de 20.000 €.
Les droits de succession dus par A sont calculés comme suit (taux de 40 % sur la première tranche d’imposition jusqu’à 50.000 € dans le tarif IV « entre toutes les autres personnes ») :
Madame X qui est résidente bruxelloise, décède en laissant un patrimoine de 100.000 €. Elle laisse une fille unique Y. Elle institue légataire 3 amis à elle (A, B et C) qu’elle désigne comme bénéficiaires du nouvel article 60quinquies. A bénéficie d’un legs de 15.000 €, B bénéficie d’un legs de 15.000 € et C bénéficie d’un legs de 20.000 €.
Le montant de 15.000 € sur lequel porte le taux réduit de 3 % est réparti entre A, B et C comme suit :
Les droits de succession dus par A, B et C sont donc calculés comme suit (taux de 40 % sur la première tranche d’imposition jusqu’à 50.000 € dans le tarif IV « entre toutes les autres personnes ») :
Madame X qui est résidente bruxelloise, décède en laissant un patrimoine de 100.000 €. Elle laisse une fille unique Y. Elle institue légataire 3 amis à elle (A, B et C) mais elle ne désigne que B et C comme bénéficiaires du nouvel article 60quinquies, à l’exclusion de A. A bénéficie d’un legs de 15.000 €, B bénéficie d’un legs de 15.000 € et C bénéficie d’un legs de 20.000 €.
Le montant de 15.000 € sur lequel porte le taux réduit de 3 % est réparti entre B et C comme suit :
Les droits de succession dus par A, B et C sont donc calculés comme suit (taux de 40 % sur la première tranche d’imposition jusqu’à 50.000 € dans le tarif IV « entre toutes les autres personnes ») :