Zoom sur les E-contrôles de l'AGFisc : ce que vous devez savoir pour aujourd'hui et demain

La Cour des comptes a audité l'instauration et l'efficacité des e-contrôles de l'Administration générale de la fiscalité (AGFisc ou administration fiscale). Elle a vérifié si ces e-contrôles, basés sur les données comptables électroniques, donnent de meilleurs résultats que les contrôles traditionnels de documents physiques.

Elle a examiné si l'administration fiscale a pu les déployer de manière efficiente pour ses contrôleurs.

L'audit livre des informations importantes sur l'avancement de l'instauration légale de normes internationales comme SAF-T (Standard Audit File for Taxes) et les améliorations qu'elle pourrait entraîner.

Synthèse

La comptabilité électronique se généralise peu à peu. Les données sources qui en sont issues présentent des avantages pour les contrôles fiscaux, qui peuvent s’effectuer de manière structurée et automatisée, ce qui, en fin de compte, doit les rendre plus uniformes et cohérents et mieux garantir l'égalité de traitement des contribuables. L'Administration générale de la fiscalité (AGFisc) préfère dès lors de plus en plus les e-contrôles aux vérifications de livres et de documents physiques.

La Cour des comptes a examiné l’ancrage des e-contrôles dans les centres de contrôle de l'AGFisc.

Si les contrôleurs sont, en principe, libres de pratiquer ou non des e-contrôles pour vérifier leur dossier, des indicateurs clés de performance (Key Performance Indicators – KPI) ont été imposés au niveau des centres. Depuis 2023, chaque centre de contrôle de l'Administration des grandes entreprises (GE) et de l'Administration des petites et moyennes entreprises (PME) de l'AGFisc doit ainsi effectuer des e-contrôles dans au moins 15 % des dossiers. Ce KPI a été atteint partout, sauf dans deux centres de contrôle, ce qui suggère que la norme de 15 % n'est peut-être pas assez ambitieuse. La Cour relève en outre des différences régionales dans l'utilisation des e-contrôles par les centres de contrôle.

La Cour des comptes a également examiné si les e-contrôles donnaient de meilleurs résultats que les contrôles traditionnels.

Les e-contrôles permettent un examen complet et approfondi des comptes. Ils donnent un aperçu exhaustif des anomalies et limitent la non-détection d’opérations douteuses. En outre, les données sources structurées peuvent être filtrées et triées, et des tableaux croisés dynamiques ainsi que des contrôles automatisés leur être appliqués. Les résultats s’en ressentent. Que ce soit dans les centres de contrôle PME ou GE, les e-contrôles s'avèrent plus productifs et plus rentables que les contrôles des livres comptables traditionnels. Ce constat vaut pour tous les dossiers examinés, qu'ils portent sur la TVA, l'impôt des sociétés ou le précompte professionnel. Des recettes supplémentaires s’observent surtout dans les e-contrôles relatifs aux dossiers de TVA, où la corrélation entre les anomalies constatées et les recettes qui en découlent est plus forte. Des différences régionales caractérisent également les résultats des e-contrôles.

Enfin, la Cour des comptes a examiné si l'administration fiscale a pu mettre en place des e-contrôles efficaces, vu que ce type de contrôle reste neuf pour de nombreux contrôleurs.

Réussir à instaurer une nouvelle approche de contrôle requiert une volonté d’innover des parties prenantes. Il est donc primordial que l'administration fiscale rende le processus d'e-contrôle aussi convivial que possible pour les contrôleurs. Une bonne connaissance d'un programme de calcul devrait en principe leur suffire pour mener un e-contrôle approfondi. Le contrôleur doit, autant que possible, pouvoir compter sur des contrôles entièrement automatisés et des tableaux croisés dynamiques intégrés.

L’obstacle principal au déploiement des e-contrôles réside dans les données comptables électroniques qui, telles que fournies par les contribuables, sont illisibles par les contrôleurs. Elles doivent d'abord être converties en un fichier de travail qui soit aussi uniforme pour permettre des contrôles suffisamment routiniers.

Les contribuables belges utilisent environ 80 progiciels comptables, tous de structure différente. Un script de conversion doit donc être programmé pour chacun. Ces scripts doivent par ailleurs être constamment adaptés aux fréquentes mises à jour des progiciels comptables.SYNTHÈSE / 4 L’écriture des scripts de conversion est un travail sur mesure chronophage qu’effectuent les e-auditeurs du Centre national de recherches (CNR) de l'AGFisc. Leur nombre étant limité, des priorités doivent être fixées pour la création des scripts. Des scripts ne sont ainsi disponibles que pour « seulement » 18 des 80 progiciels comptables. Même si cela paraît peu, ces 18 scripts permettent à l'administration f iscale de convertir automatiquement la majorité des données comptables électroniques reçues en un f ichier exploitable. Cette conversion s’opère à l’aide de l’application Belgian Standard Audit File (BSAF), qu'elle a elle-même développée. Lorsque les contrôleurs chargent les données sources électroniques dans l’application, ils obtiennent un fichier de travail standard de présentation identique, quel que soit le progiciel comptable dont les données sont issues. La création et la mise à jour fastidieuses des scripts pourraient cependant être complètement supprimées par l'instauration légale d'une norme nationale obligatoire telle que SAF-T (Standard Audit File for Taxes). Ce fichier standard d’audit fiscal est une norme internationale d'échange électronique de données comptables développée par l'OCDE. Il contient les données d’entreprises générales utilisées lors des e-contrôles les plus courants. La plupart des progiciels comptables suivent déjà cette norme internationale et peuvent exporter le fichier SAF-T automatiquement. Le coût de l’instauration est dès lors limité pour les contribuables belges.

Les contrôleurs doivent par ailleurs pouvoir traiter les données sources électroniques le plus efficacement possible. À cette fin, l'administration fiscale a intégré des contrôles automatisés, des tableaux croisés dynamiques préprogrammés et des macros dans l'application BSAF.

Celle-ci intègre une dizaine de contrôles automatiques que le contrôleur peut sélectionner. Ces contrôles signalent des anomalies que le contrôleur peut ensuite analyser. Ils consistent par exemple à vérifier la validité des numéros de TVA utilisés, à comparer la liste des clients et la comptabilité ainsi que la liste des fournisseurs et la comptabilité, etc. La diversité des progiciels comptables entrave à nouveau le déploiement de ces contrôles automatiques. Pour automatiser un contrôle, les e-auditeurs doivent procéder à une analyse approfondie de chaque progiciel comptable pour identifier les données fiscales pertinentes. Les mises à jour constantes des progiciels constituent un obstacle supplémentaire.

Un format d'exportation uniforme tel que SAF-T rendrait l'ensemble du processus beaucoup plus efficace. Un seul script serait développé et mis à jour pour chaque conversion et pour chaque contrôle.

En résumé, la Cour des comptes estime que l'administration fiscale a pu rendre le processus d'econtrôle efficace et convivial pour les contrôleurs. L'instauration légale de SAF-T améliorerait encore ce processus, en ce sens que les e-auditeurs pourraient être affectés à d'autres volets de la lutte contre la fraude fiscale.





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