Comme tous les ans, il était très attendu car, à force de chiffres et de graphiques, il apporte son lot de constats forts et souvent inquiétants. Zoom sur ce document de ... pages, mis en ligne ce week-en sur le site et par ailleurs, disponible dans son intégralité en annexe pour en faciliter la lecture attentive.
Après avoir subi de plein fouet pendant deux ans et demi la crise sanitaire de la COVID 19, nous sommes aujourd’hui confrontés à une guerre aux portes de l’Europe. Le moins que l’on puisse en conclure, c’est que nous évoluons actuellement dans un monde rempli d’incertitude.
Malgré tout, les mécanismes de prévention du blanchiment et du financement du terrorisme ont fonctionné et les résultats qui sont présentés dans ce rapport d’activités relatif à 2021 en sont la preuve.
Je saisis à nouveau l’opportunité de la publication de ce rapport pour remercier l’ensemble des collaboratrices et des collaborateurs de la CTIF, les officiers de liaison et tous nos partenaires privilégiés (autorités judicaires, police fédérale, SPF Economie, ...) pour le travail accompli en 2021 dans des conditions difficiles mêlant télétravail obligatoire et présence minimale au bureau. D’autant plus que le nombre de déclarations de soupçon a continué à croître fortement en 2021. Un chiffre record de 46.330 déclarations ont été reçues, soit une augmentation de près 50 % par rapport à 2020.
Si l’arrivée en Belgique de plusieurs établissements de paiement britanniques travaillant en libre prestation de services peut expliquer une partie substantielle de cette augmentation, la vigilance du secteur financier et les opérations dites « lookback » effectuées à la demande de la Banque Nationale peuvent expliquer une telle croissance.
Du fait de la réception de ce type de déclarations, la CTIF doit constamment chercher un équilibre entre « regarder vers le passé » et une approche plus efficiente des phénomènes de blanchiment orientée vers l'avenir et les nouveaux risques de blanchiment d'argent tels que ceux associés à l'utilisation des cryptomonnaies.
Les outils de priorisation et d’orientation des déclarations de soupçon, mis en place et continuellement améliorés par la CTIF depuis plusieurs années, ont permis de faire face à cet afflux massif de nouvelles déclarations, sans devoir mobiliser à l’heure actuelle des moyens financiers supplémentaires.
1.241 nouveaux dossiers ont été communiqués aux autorités judiciaires du pays. Un millier de communications d’informations utiles ont été également adressées aux autorités administratives de l’Etat (CAF, SIRS, SPF Economie, ...) et aux autorités de contrôle en application des articles 83 et 121 de la loi du 18 septembre 2017.
Les outils informatiques développés par le système sécurisé de communication des CRF européennes FIU.Net et par la CTIF ont aussi permis la transmission en 2021 de 8.021 XBR (Cross Border Reports) et 613 XBD (Cross Border Dissemination Reports) en relation avec des transactions qui concernaient d’autres pays de l’Union Européenne (cfr. Section V.4.).
Conformément à la 4ème Directive, lorsque la CTIF est saisie d’une déclaration de soupçon qui concerne un autre pays, elle transmet à la Cellule de Renseignements Financiers (CRF) du pays concerné toutes les informations pertinentes contenues dans la déclaration. Ces communications ne remplacent pour autant pas la procédure actuelle d’échange d’informations à la demande et spontané qui s’effectue plus en cours ou en fin d’analyse du dossier, mais la complète.
Globalement, plus ou moins 15.000 informations reçues par la CTIF des déclarants sont externalisées d’une manière ou d’une autre vers les autorités judiciaires, les services administratifs de l’Etat, les services de renseignements (y compris l’OCAM), les autorités de contrôle LBC/FT et les autres CRF étrangères. Les informations qui ne peuvent pas être externalisées constituent par ailleurs un socle essentiel disponible à des fins d’analyse stratégique, mais aussi pour une éventuelle transmission subséquente si des indices sérieux de blanchiment ou de financement du terrorisme devaient être ultérieurement identifiés.
Si les phénomènes criminels et les techniques de blanchiment et de financement du terrorisme évoluent peu, on constate de plus en plus souvent que les fonds blanchis sont issus d’activités polycriminelles. Au cours de l’exercice écoulé, un nombre important de dossiers illustrent notamment combien la fraude sociale, la fraude fiscale grave et la criminalité organisée apparaissent de manière croissante comme des phénomènes liés entre eux.
La CTIF observe également depuis plusieurs années la professionnalisation croissante de l’activité de blanchiment en tant que telle et sensibilise inlassablement ses différents partenaires sur ce point ainsi que sur les risques qu’une telle évolution implique pour l’Etat de droit et la société dans son ensemble.
Des organisations excessivement bien structurées, à dimension internationale, offrent ainsi leurs « services de blanchiment » à diverses autres organisations criminelles de haut niveau actives dans des activités illégales diverses générant des profits (principalement en espèces) gigantesques (trafiquants de stupéfiants, trafiquants d’êtres humains, escrocs internationaux,...). La CTIF constate de façon très préoccupante que ces réseaux de blanchiment ont ancré une partie de leurs activités dans notre pays, notamment par l’utilisation de très nombreux comptes bancaires, sociétés écrans et hommes de paille.
Enfin, je veux souligner les efforts déployés et les moyens importants mis en œuvre en 2021 par la Commission européenne (DG FISMA) pour assurer le transfert du FIU.Net, d’Europol vers l’infrastructure de la Commission, toutefois en gardant le système décentralisé comme il l’a toujours été. Ce transfert de compétences s’accompagne du développement d’un FIU.Net nouvelle génération visant à améliorer l’efficacité des outils de prévention du blanchiment et du financement du terrorisme et à les adapter aux nouvelles menaces.
Annoncé en juin 2021 par DG FISMA et discuté depuis au niveau du Conseil, le nouveau « package AML » commence petit à petit à prendre forme. Destiné avant tout à améliorer la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme par des mesures préventives applicables de manière uniforme au secteur financier dans tous les Etats membres, il s’accompagnera également de la création d’une autorité anti-blanchiment (« Anti-money Laundering Authority (AMLA) ») à laquelle seront bien entendu associées les CRF européennes.
L’AML Package aura sans conteste un impact non négligeable sur les dispositifs préventifs LBC/FT mais aussi sur l’organisation et la future architecture de la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme en Belgique.
C’est la raison pour laquelle j’ai demandé au Directeur général de DG FISMA, Mr. John Berrigan, de bien vouloir cette année préfacer avec moi le rapport d’activités 2021 de la CTIF. Je le remercie d’avoir accepté mon invitation.
Je vous souhaite une bonne lecture.
Philippe de KOSTER Président
Nous vous recommandons plus particuliérement la lecture du chapitre IV pages 13 à 30, dans la mesure ou chaque menace, tant sur le plan du blanchiment de capitaux que du financement du terrorisme fait l'objet d'une analyse synthétique reprenant systématiquement. les tendances observées, les défis à relever et les actions menées.
> Blanchiment de capitaux
> Financement du terrorisme
> Déclarations
En 2021, la CTIF a reçu un total de 46.330 communications (déclarations d’opérations suspectes, informations des homologues étrangers et services de l’Etat) regroupées en 35.605 nouvelles affaires et 10.725 communications complémentaires d’informations dans des affaires ouvertes antérieurement.
> Criminalités sous-jacentes : l'escroquerie largement en tête -
Multiplication des diverses variantes d’escroqueries et nouveaux canaux de blanchiment
Source : Cellule de traitement des informations financières, mai 2022