Bien acheter est une compétence fondamentale pour assurer la rentabilité de votre activité entrepreneuriale que vous soyez en personne physique ou en société. Malheureusement, cet aspect crucial est souvent négligé sous prétexte que vous avez d’autres priorités et manquez de ressources. Mais bien acheter, c'est aussi négocier... En sachant que cette négociation vous permettrait d’améliorer vos finances de manière spectaculaire, continueriez-vous à la délaisser ?
Bien acheter, c’est, avant tout, prioriser vos achats. Une méthode efficace est d’en faire une cartographie.
Pour démarrer cet exercice, ne vous noyez pas dans le micro-détail et focalisez-vous sur les postes importants en suivant une approche 80/20.
La méthodologie est relativement simple : pour chacun des achats, frais ou investissements clés, indiquez le fournisseur, le montant et sa nécessité (indispensable, confortable et superflu). Au terme de cette analyse factuelle, vous aurez une vision claire du poids de chacun de vos fournisseurs, ce qui pourrait vous aider dans une négociation ultérieure.
À ce stade et en fonction de la santé financière de vos activités, vous pourrez déjà prendre des décisions dans le respect de vos obligations contractuelles. C’est ainsi, que les achats inutiles pourront être arrêtés au plus vite, les achats de conforts réévalués et ceux qui revêtent un caractère primordial, renégociés.
Bien acheter suit un processus relativement linéaire, itératif et qui requiert une bonne préparation. Avant d’acheter et de mettre en place un processus qui pourrait sembler être une usine à gaz, il est primordial de se poser des questions en termes d’impacts à la fois sur la trésorerie et la profitabilité des activités.
Les différentes phases peuvent se résumer comme suit :
Une approche générique n’est pas compatible avec le concept du « bien acheter ». Il s’agira d’être le plus précis possible en déterminant le type d’achat (produit/service) et ses caractéristiques telles que les fonctionnalités, les performances techniques, les quantités ou encore la fréquence si on parle de service.
Avant de vous lancer, étudiez le marché au mieux, entre autres, en termes d’acteurs, de produits et services similaires ou de substitution et de prix. Cette connaissance vous permettra ultérieurement de renforcer votre pouvoir de négociation.
En fonction de la complexité de l’achat et de son importance « stratégique », vous devrez, en amont, vous assurer que le fournisseur retenu remplira ses obligations sans encombre.
Afin de réduire les risques de défaillance éventuelle, la meilleure manière est de mener votre « enquête » quant à la réputation du fournisseur, sa solidité financière ou encore la qualité de ses produits/services. Vous pourrez également lui demander des références que vous aurez le loisir de contacter.
Vos critères pourront être objectivés et pondérés, en fonction de vos impératifs, dans un tableau de sélection. En règle générale, au-delà de la santé financière du fournisseur potentiel, on y retrouvera, sans être exhaustif, le prix, la qualité, la fiabilité, les délais de livraison, le service après-vente, l’engagement RSE (commerce équitable, économie circulaire, …) et les certifications.
Que voulez-vous retirer de la négociation ? La réponse doit être limpide et inéquivoque.
Chaque cas est singulier. En période de pénurie, par exemple, la disponibilité du produit/service recherché aura plus d’importance que le prix.
Afin de maximiser vos chances de succès, il est indispensable d’inviter plusieurs fournisseurs à vous soumettre une offre sur base d’un cahier des charges. Cette étape peut être plus ou moins formelle selon votre organisation.
Le fait d’avoir déterminé vos critères de sélection permettra d’évaluer les offres de manière objective et de rencontrer chacun des soumissionnaires retenus.
Vous vous engagerez dans des négociations avec à minima deux ou trois fournisseurs dans la mesure du possible. Il est évident que dans un marché « oligopolistique » voire « monopolistique », ce ne sera pas possible.
La négociation portera sur les critères que vous aurez identifiés. Un piège à éviter est celui du prix. Ne vous arrêtez pas à la valeur nominale mais concentrez-vous sur le coût total de possession. Le prix est en général la partie visible de l’iceberg auquel il faudra inclure des coûts périphériques tels que le transport, les assurances, les délais de livraison, l’entreposage, la maintenance, les conditions de paiement ou encore la non-qualité.
Paradoxalement, le prix le plus bas n’est pas toujours « le moins cher ». Ne vous laissez pas séduire par les prix les plus bas, demandez-vous si le fournisseur réunit les conditions nécessaires pour assurer une relation d’affaires gagnante-gagnante sur le long terme.
Acceptez qu’il y ait un peu de « jeu » en déterminant vos objectifs qui doivent être atteints et ceux pour lesquels vous êtes ouvert à des concessions.
Ne négligez ps les conditions générales qui peuvent être tout à fait déséquilibrées et totalement en faveur du vendeur. Nous en reparlerons, ci-dessous.
Vous n’êtes probablement pas un négociateur professionnel et de surcroît, la négociation n’est pas votre tasse de thé. Vous pourriez être la proie, par excellence du vendeur chevronné.
Toutefois, grâce à votre préparation et sélection de plusieurs fournisseurs potentiels, vous êtes très bien positionné.
Les pièges à éviter sont de vous laisser envahir par vos émotions, de vous sentir en position de faiblesse et/ou de vous faire distraire par le style de négociation de votre interlocuteur. N’oubliez pas que si vous avez besoin du fournisseur, il a également besoin de vous.
Rappelez-vous également que vous n’êtes pas obligé d’aboutir quel que soit le temps investi dans ce processus. Si l’accord proposé n’est pas satisfaisant, ne le signez pas. Dans ce cas, vous pouvez ajourner les négociations, voire les arrêter tout net et vous focaliser sur d’autres options. Rien ne vous interdit, par ailleurs, de négocier en parallèle avec les autres fournisseurs retenus.
Après de longues discussions, les négociations ont abouti. Il est maintenant temps de passer des promesses et intentions aux droits et obligations contractuels des parties. Au-delà de l’accord sur la chose et le prix, on inclura les pénalités pour non-respect des clauses du contrat et les garanties données. On y trouvera également les modalités de résolution de conflit, les conditions d’activation des pénalités et appels à garantie.
Ce contrat fera foi en cas de litige, raison pour laquelle il est conseillé de vous faire accompagner avant de le signer. Selon les enjeux, il n’est pas anormal qu’il y ait des allers-retours entre les avocats des parties.
Une fois le contrat signé et les relations commerciales entamées, il sera opportun d’en faire le suivi afin de nourrir la relation, de s’assurer du respect du contrat mais aussi d’agir rapidement en cas de problème.
En fonction de l’importance de ce dernier et de sa fréquence, les actions à mettre en œuvre seront adaptées allant de la recherche de solution de remédiation à la citation en justice en passant par la médiation. Vous garderez à l’esprit la notion de coût/bénéfice pour ne pas vous lancer dans des actions tant coûteuses que hasardeuses.
Ne vous reposez pas sur vos lauriers, le marché est en constante ébullition. Remettez l’ouvrage sur le métier en renégociant, à intervalles réguliers, vos contrats clés. Cela vous permettra de bénéficier systématiquement de nouvelles opportunités et de signaler à vos fournisseurs que vous prenez les choses au sérieux.
En conclusion, les étapes décrites, ci-dessus, sont applicables à tous les cas de figure mais leur application dépendra des enjeux.
Le processus proposé est relativement simple à mettre en place et ne nécessite pas une expérience particulière. Sa maîtrise, singulièrement, pour vos achats clés, constituera un levier essentiel pour réduire vos coûts, améliorer la qualité des produits/services achetés et augmenter la rentabilité de vos affaires.
Bons achats !
Source : 1819.brussels