Au prochain ministre des Finances : ne soyez pas le simple Général des recettes fiscales !

Le rôle d'un ministre des Finances est crucial pour assurer le bon fonctionnement d'un État. Cependant, il arrive que ce rôle soit exercé de manière à susciter des interrogations quant aux véritables priorités de celui qui l'occupe. Notre ministre des Finances actuel se comporte davantage comme un général sur son champ de bataille, préoccupé par l'efficacité de son administration et la maximisation des recettes fiscales, au détriment des citoyens qu'il est censé servir. Voici donc le portrait de l’homme d'État, dont l'autoritarisme et la proximité avec son administration sont sources de préoccupations grandissantes et dont nous attendons impatiemment le changement au cours de la prochaine législature !

Le Général des Recettes Fiscales

Notre ministre des Finances se comporte comme un véritable Général, veillant à la bonne tenue de son champ de bataille, qu'il considère être le vivier des recettes fiscales de l'État. À l'image d'un chef militaire, il se montre intraitable lorsqu'il s'agit de maximiser les entrées d'argent dans les caisses de l'État, peu importe le coût humain de ses décisions. Chaque euro collecté est une victoire, chaque niche fiscale, une tranchée à combler, et chaque contrôle fiscal une mission à armer de tolérance zéro et de nouveaux instruments légaux

Avec une armée loyale mais incomplète

L'administration fiscale, sous son commandement, est devenue une véritable armée essoufflée par les combats. Loyal, le fisc tente l’impossible s’adaptant aux multiples changements, à sa numérisation (déshumanisation) et ses contrôles forcés. Mais, en réalité, cette administration est d’abord et avant tout incomplète. Le ministre préfère soigner ses troupes existantes plutôt que d'engager de nouveaux soldats. Avec moins de fonctionnaires, il opte pour la guerre fiscale plutôt que pour une harmonie fiscale, à la recherche du juste combat. Les fonctionnaires doivent donc redoubler d'efforts, se montrer plus agressifs et plus intrusifs pour compenser, malgré eux, le manque d'effectifs, ce qui se traduit par des contrôles intensifiés et des sanctions durcies, dont les fameux accroissements.

Les citoyens et les mandataires : les victimes collatérales

Dans cette lutte sans merci pour les recettes fiscales, les citoyens, les mandataires et conseillers deviennent les victimes collatérales. Les petites entreprises, les indépendants, et même les simples particuliers se retrouvent acculés par des contrôles à l’issue préalablement fixée et des amendes disproportionnées. L'humain disparaît derrière les chiffres et des guichets numériques, et le bien-être des concitoyens est relégué au second plan. Les politiques fiscales, loin de chercher un équilibre entre équité et efficacité, semblent viser avant tout la maximisation des recettes, quel qu'en soit le prix pour le contribuable aux abois. De facto, il est un présumé fraudeur et son contrôle devient une juste quête. Face à ce péril, les mandataires, et en particulier les experts-comptables et conseillers fiscaux s’épuisent. Leurs arguments ne sont même plus examinés. Ils se mobilisent pour une juste cause, mais face à une position administrative fermée et soutenu (forcé) par leur Ministre, le combat est inégal et seule la justice offre une voie lente et lointaine pour rétablir cet équilibre. Comme si le combat devait durer pour offrir une juste issue…

Un discours réformateur, mais une pratique conservatrice

Parallèlement, le ministre des Finances prône la nécessité d'une réforme fiscale, mais ses actions trahissent ses paroles. Tout au long de son règne, il continue à fonctionner selon des méthodes traditionnelles. Plutôt que de simplifier les règles et de favoriser la conformité par adhésion, il maintient un système complexe qui favorise ses alliés et entretient l'opacité et la contrainte. La réforme qu’il annonce n'est qu'un mirage destiné à apaiser les critiques, tandis que les pratiques restent inchangées, marquées par la complexité et les déséquilibres. Les lois fiscales n’ont jamais été aussi compliquées. Le code devient une sorte de circulaire inachevée tandis que la réforme promise devient un enjeu budgétaire(ment) neutre, voire profitable, ce qui à l’encontre de toute logique pour le pays le plus taxé au monde !


Revenir à des fondamentaux dès demain !

Notre prochain ministre doit redevenir un homme d’État au sens premier. Il devra dépasser les clivages politiques et idéologiques, mais surtout et avant tout se replacer au centre de l’échiquier. Avec un déficit phénoménal, les tentations de devenir un extracteur à cash sont tentantes, mais la prospérité de notre société et sa puissante solidarité ne peuvent d’abord et avant tout reposer que sur une adhésion aux règles fiscales. L’adhésion, c’est un subtil mélange de simplicité, d’équité et de sobriété. Accepter que le contribuable est un client qu’il faut soigner, plutôt qu’un arrogant fraudeur est un challenge essentiel. Comme premier homme fiscal de Belgique, le ministre doit être exemplaire. Il doit croire aux vertus de chacun, celles de son administration et celles de ses concitoyens. L’affrontement et les caricatures sont malheureusement fréquents quand nous parlons d’argent, mais si l’on prend un peu de recul, le carburant monétaire est aussi et avant tout le premier ingrédient de nos niveaux de vie, de leur qualité et de leurs perspectives.


Face à ce rééquilibrage que nous espérons vivement, parions ainsi que notre prochain grand argentier sera inspiré par les enjeux climatiques et les formidables perspectives qu’offrent aujourd’hui la transformation digitale de notre société. Alors peut-être pourrons-nous espérer de ce nouveau ministre un nouveau « big deal fiscal », qui ne sera pas une simple réforme fiscale, mais qui posera un nouveau paradigme. Un paradigme qui revalorise le travail, nouvelle pénurie du 21e siècle, et le capital social (versus le capital financier) tout en équilibrant nos légitimes besoins de financement public en s’appuyant sur les réalités surprenantes du monde moderne, ces réalités qui encouragent la consommation rapide, les circuits longs ou la spéculation instantanée bien loin du monde réel.

Vivement la suite… !

Cet article a également été publié dans le numéro spécial IPP de la Libre Eco du 25 et 26 mai.

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