Après plusieurs condamnations par l’Union européenne, la Belgique a finalement décidé de réformer la manière dont elle impose les revenus immobiliers étrangers dans le chef des résidents belges. Petit tour d’horizon des nouveautés apportées par la loi du 17 février 2021 et détaillées dans la circulaire de ce 1er mars.
Actuellement, les revenus des immeubles non donnés en location ou donnés en location à une personne physique (ou morale autre que société) qui ne l’affecte pas à l’exercice de son activité professionnelle sont imposés différemment selon que ces immeubles sont situés en Belgique ou à l’étranger. Là où les revenus des immeubles sont calculés sur base de leur « revenu cadastral » lorsqu’ils sont situés en Belgique, c’est la « valeur locative » du bien (lorsque le bien n’est pas donné en location) ou le loyer réellement perçu et les avantages locatifs (lorsque le bien est donné en location) qui constitue le revenu imposable.
Concrètement, ce régime débouche sur une base imposable plus élevée lorsque l’immeuble se situe à l’étranger, ce qui a été condamné à plusieurs reprises par la Cour de Justice de l’Union européenne (dernier en date, l’arrêt du 12 avril 2018 assorti d’une astreinte par un arrêt du 12 novembre 2020). Pour se conformer aux principes de droit européen, le Gouvernement a donc déposé un projet de loi, adopté le 17 février 2021 par la Chambre des représentants
Pour éviter de toucher à l’imposition des revenus immobiliers en Belgique, le Gouvernement a dégagé une solution consistant à confier à l’Administration Mesures et Evaluations le soin de déterminer un revenu cadastral également pour les biens détenus à l’étranger par les résidents belges.
Sauf exceptions, sont concernées par ce changement toutes les personnes physiques titulaires d’un droit réel sur un immeuble situé à l’étranger (ainsi que certaines personnes morales soumises à l’impôt des personnes morales). Les sociétés belges ne sont en revanche pas concernées.
Le revenu cadastral belge est fixé sur la valeur locative normale nette au 1erjanvier 1975 (époque de référence correspondant à la dernière péréquation cadastrale en Belgique). À défaut de la connaître, il peut aussi être établi par comparaison à d’autres biens similaires. Et si cette comparaison n’est pas possible, le revenu cadastral est fixé à 5,3% de la valeur vénale normale du bien en 1975. Enfin, la nouvelle loi introduit la possibilité de se baser sur la valeur vénale normale actuelle, à laquelle est appliquée un « facteur de correction » actualisé chaque année.
En ce qui concerne les terrains non bâtis, le revenu cadastral sera de 2 euros par hectare.
Les impôts étrangers fonciers ne sont plus déductibles de la base imposable dès lors que le revenu cadastral est un revenu net.
Concrètement, la déclaration doit être introduite, sous peine d’amendes administratives (allant de 250 à 3.000 EUR), auprès de l’Administration Générale de la Documentation Patrimoniale (voir ci-dessus) dans le délai imparti.
La déclaration est individuelle et une déclaration distincte doit être introduite pour chaque bien détenu à l’étranger. Sont notamment à déclarer : le type de bien (maison, terrain, appartement, etc.), sa situation (adresse, pays, etc.), la proportion de détention dans le bien, la nature du droit réel sur le bien (droit d’usufruit, droit de superetc.), la superficie pour les biens non bâtis, la valeur actuelle pour les biens bâtis (ou si la valeur actuelle n'est pas connue : le prix, la date d'acquisition et le cas échéant la mention des travaux effectués), etc.
Sur cette base, l’administration établira donc le revenu cadastral.
L’administration notifie chaque revenu cadastral nouvellement établi. En principe, le revenu cadastral sera disponible d’ici le 1er mars 2022.
Cette notification ouvre un délai de deux mois pendant lequel le contribuable peut introduire une réclamation. Le contribuable peut y proposer un nouveau revenu cadastral à l’administration.
Ce nouveau régime entre en vigueur à partir de l’année de revenus 2021 - exercice d’imposition 2022 (déclaration à introduire l’année prochaine).
La question se pose dès lors de savoir ce qu’il convient de déclarer pour les revenus 2020 (déclaration à introduire cette année). D’après la circulaire, les anciennes règles (non-conformes au droit européen) s’appliquent mais d’autres points de vue pourraient être valablement défendus.
Nous indiquions dans une précédente newsflash (voy. ici) que le Point de contact central pouvait devenir un registre des avoirs financiers (soldes des comptes bancaires et de paiement, etc.). Avec cette nouvelle réforme, il semblerait que l’administration disposera désormais également d’un « cadastre » de tous les biens détenus à l’étranger…
Pour tout complément d’information concernant ce qui précède, n’hésitez pas à contacter l’un des auteurs de cette newsflash.
Amandine Baltus - Associate (amandine.baltus@tiberghien.com)
Gauthier Bonte - Associate (gauthier.bonte@tiberghien.com)
Source : Tiberghien, 4 juillet 2021