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Délai raisonnable en matière fiscale: quatre ans maximum, tranche la Cour d’appel de Bruxelles

Dans un intéressant arrêt du 28 janvier 2025 (publié sur Taxwin), la 6ᵉ chambre fiscale néerlandophone (6N) de la Cour d’appel de Bruxelles a considéré qu’un litige en matière fiscale avec deux degrés de juridiction devrait raisonnablement pouvoir être jugé en maximum quatre ans à dater de l’introduction de la réclamation, soit :

  • six mois pour le recours administratif préalable,
  • un an et demi pour la procédure devant le tribunal de première instance,
  • et deux ans devant la Cour d’appel.

Pour fixer ce délai, la Cour s’est référée à la jurisprudence du Conseil d’État néerlandais.


Des faits emblématiques d’une surcharge chronique

Dans le cas d’espèce, deux recours avaient été introduits devant le tribunal de première instance de Louvain les 27 juin 2017 et 20 mars 2018. Le tribunal a joint les deux affaires et statué par un jugement du 1er mars 2019. Le contribuable a interjeté appel par requête du 28 mars 2019.

La procédure devant la Cour d’appel de Bruxelles a duré près de six ans. Motif invoqué par la Cour ? La surcharge du rôle de la (seule) chambre fiscale 6N.


Un constat qui vaut aussi pour la chambre francophone

La chambre fiscale francophone de la Cour d’appel de Bruxelles n’est pas mieux lotie.

Les causes en état d’être plaidées y sont placées sur des listes d’attente interminables, et fixées selon leur ancienneté, souvent très lointaine. 2040 ? C’est ce que suggérait déjà un précédent post.


Quelle sanction en cas de dépassement du délai raisonnable ?

La Cour estime que le délai raisonnable pour juger en appel est de deux ans. Mais quelle en est la conséquence juridique ?

Sur ce point, l’arrêt du 28 janvier 2025 déçoit : la Cour considère que l’article 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme ne s’applique pas aux litiges fiscaux, car ils ne portent pas sur des droits et obligations de caractère civil.

Tout au plus, une modération des accroissements fiscaux pourrait être envisagée, ce que la Cour refuse dans le cas d’espèce, en raison de la nature et de la gravité des faits reprochés au contribuable.


Et si la responsabilité de l’État était engagée ?

Si on le lui avait demandé (ce qui ne fut pas le cas), la Cour aurait pu adopter une autre approche. En effet, le défaut d’allocation de moyens humains et logistiques suffisants à la Cour d’appel pourrait constituer une faute de l’État, susceptible d’engager sa responsabilité civile sur la base du Code civil.

Et si les chambres fiscales de la Cour d’appel de Bruxelles condamnaient systématiquement l’État au paiement de dommages et intérêts ? Peut-être ce même État se déciderait-il enfin à doter la Cour d’appel des ressources nécessaires pour respecter le délai raisonnable qu’elle recommande elle-même.

  • Cour d'appel - Bruxelles - Arrêt du 28 janvier 2025 - Rôle n° 2019:AF:124.pdf

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