Détenir un patrimoine mobilier à l’étranger n’est pas une sinécure

La détention de comptes bancaires à l’étranger est devenu depuis quelques années un véritable casse-tête.

Cette situation entraîne en effet des obligations fiscales complexes et des risques fiscaux accrus.

La détention d’avoirs mobiliers à l’étranger s’accompagne d’obligations déclaratives relativement lourdes. Elles concernent tant les impôts sur les revenus que la taxe sur les opérations de bourse ou la nouvelle taxe sur les comptes-titres.

1. Impôt sur les revenus

Lorsqu’un particulier détient un compte auprès d’une banque étrangère, il doit en mentionner l’existence dans sa déclaration annuelle à l’impôt des personnes physiques (IPP). Les contrats d’assurance-vie conclus auprès d’une compagnie d’assurance établie à l’étranger, de même que les « constructions juridiques » étrangères (trusts, sociétés faiblement taxées,…), tombent aussi dans le champ de cette obligation déclarative. Le contribuable doit également communiquer au point de contact central (« PCC ») de la Banque Nationale de Belgique (BNB) une série d’informations sur ses comptes étrangers (numéro du compte, dénomination de la banque, pays où le compte a été ouvert).

Par ailleurs, les revenus imposables d’origine étrangère (dividendes, intérêts,…) doivent être déclarés dans la déclaration IPP, dans la mesure où ils n’ont pas été soumis au précompte mobilier. En pratique, force est de reconnaître que le contribuable ne dispose pas toujours de toutes les informations nécessaires pour déclarer correctement ses revenus d’origine étrangère (par exemple, en cas de plus-values imposables réalisées sur des SICAV de capitalisation), ce qui l’expose à des risques fiscaux non négligeables.

Dans ce contexte, il est important de rappeler que les autorités fiscales belges reçoivent sur un plateau d’argent des renseignements sur les comptes financiers (notamment les intérêts/dividendes reçus) de résidents belges ouverts auprès d’institutions financières établies dans une centaine d’États, notamment le Luxembourg, la Suisse, le Liechtenstein, Hong Kong, Singapour, les Émirats arabes unis (et donc notamment l’Émirat de Dubaï), les Iles Vierges britanniques, les iles Caïmans et le Panama. C’est la conséquence de l’intensification des échanges automatiques d’informations sur la scène internationale, sur la base de la fameuse norme commune « CRS » (« Common Reporting Standard »). Il va sans dire que l’administration fiscale exploite cette masse d’informations. Lorsque les informations reçues par le fisc belge sur la base des fiches CRS font apparaître que le contribuable n’a pas déclaré certains revenus, le fisc prend la balle au bond et adresse au contribuable une demande de renseignements, voire un avis de rectification. Avec un potentiel redressement fiscal salé à la clef.

Si le compte est ouvert auprès d’une banque belge, la situation du contribuable est bien plus confortable. La banque prélève alors le précompte mobilier « libératoire » sur les revenus imposables, ce qui signifie que les revenus en question ne doivent en principe plus être déclarés dans la déclaration d'impôt.

2. Taxe sur les opérations de bourse

Depuis le 1er janvier 2017, les transactions (opérations d’achat/vente) réalisées sur le portefeuille d’un résident belge détenu auprès d’une banque étrangère sont en principe soumises à la taxe sur les opérations de bourse (« TOB »). L’obligation de déclaration et de paiement de la TOB repose sur les épaules du contribuable belge, sauf si ce dernier peut établir que la TOB a été acquittée par la banque étrangère. Il incombe donc en principe au contribuable de calculer la TOB, de l’appliquer, de la déclarer et de la payer. Ce n’est pas une partie de plaisir pour le contribuable lambda, en particulier lorsque la banque étrangère n’est pas outillée pour l’assister. On précisera au passage que les délais de déclaration de la TOB sont relativement brefs… et que les amendes sont élevées !

Rien de tout cela si le compte est ouvert auprès d’une banque belge : cette dernière est l’unique redevable de la TOB.

3. Taxe sur les comptes-titres

Même refrain en ce qui concerne la nouvelle taxe sur les comptes-titres (« TCT »). Le contribuable détenant un compte-titres à l’étranger d'une valeur moyenne supérieure à 1 million d’euros doit en principe également déclarer et payer la TCT (au taux de 0,15%), sauf s’il peut établir que la TCT a été déclarée et payée par la banque étrangère.

Si le compte-titres est ouvert auprès d’une banque belge, c’est alors cette dernière qui est redevable de la taxe. Le contribuable n’a plus rien à faire…

Détenir des avoirs mobiliers à l’étranger n’est, on le voit, pas une sinécure. Pour dormir tranquille, mieux vaut détenir ses avoirs en Belgique. D’autant plus qu’il subsiste encore aujourd’hui un secret bancaire « belgo-belge » (certes écorné, en particulier depuis l’obligation faite aux banques de communiquer, pour la première fois au plus tard le 31 janvier 2022, le solde des comptes bancaires au point de contact central de la BNB), empêchant en principe le fisc belge d'accéder librement aux informations sur les comptes ouverts par des contribuables belges auprès de banques en Belgique. Le contraste avec la transparence fiscale totale sur les comptes étrangers est saisissant.

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