Grâce à des données calculées par EY, l’Institut économique Molinari publie, pour la 14ème année consécutive, son étude sur la pression sociale et fiscale réelle du salarié moyen au sein de l’Union européenne (UE).
Ce classement présente la spécificité de chiffrer pour l’année en cours la pression sociale et fiscale réellement supportée par les salariés moyens, avec une méthodologie robuste et uniforme dans toute l’UE à 27, permettant d’appréhender l’impact réel des impôts et charges et leurs évolutions.
La Belgique, vice-championne : après les français, ce sont les salariés belges qui sont les plus taxés d'Europe !
La France est championne des prélèvements obligatoires en 2023, avec une libération sociale et fiscale le 17 juillet. Jusqu’à cette date, le salarié moyen célibataire n’a pas de contrôle direct sur l’affectation des fruits de son travail. La France retrouve la place de n°1 qu’elle occupait de 2016 à 2020. La fiscalité sur le salarié moyen ressort à 54,1 %. Elle est stable par rapport à l’an passé, époque à laquelle la France était n°2 derrière l’Autriche. Cette dernière ayant significativement baissé sa fiscalité, la France devient première en 2023.
La Belgique est 2ème sur le podium, avec une libération sociale et fiscale le 15 juillet. L’ex numéro 1 de ce classement (de 2011 à 2015) était devenue grâce à son « Tax shift » n°2 (de 2016 à 2017) puis n°3 (depuis 2018). Elle redevient n°2 en 2023 avec 53,5 % de pression sociale et fiscale sur le salarié moyen, dans l’attente d’une baisse d’impôt significative en 2024 grâce à un nouveau « Tax shift ».
L’Autriche est 3ème sur le podium, avec une libération sociale et fiscale le 15 juillet, trois jours plus tôt qu’en 2022. La fiscalité sur le salarié moyen ressort à 54,4 %, en baisse significative par rapport à l’an passé (- 0,9 %) Depuis cette année, les tranches du barème d’impôt sur le revenu sont indexées sur l’inflation, ce qui met un terme à l’augmentation rampante de l’impôt sur le revenu, qualifiée en Autriche de « progression à froid ». Le gouvernement accède ainsi à une revendication de longue date des représentants syndicaux et des milieux économiques.
Sur un an, dix pays de l’UE ont enregistré une baisse des prélèvements permettant de récupérer au moins un jour de liberté sociale et fiscale. C'est le cas en Allemagne, Danemark, Portugal, et Suède (+1 jour), en Autriche et Grèce (+3 jours), en Pologne (+4 jours), aux Pays-Bas (+5 jours), en Finlande (+9 jours) et Croatie (+10 jours).
Six pays sont stables, la Belgique, la Bulgarie, la France, la Hongrie, la Lituanie et la Roumanie.
Le reste de l'UE connait une augmentation des prélèvements obligatoires conduisant à un recul de la Libération fiscale et sociale d'un jour par rapport à 2022 (Chypre, Espagne, Irlande, Lettonie, Malte, Slovaquie, Slovénie, Tchéquie) à 8 jours (Luxembourg).
Avant de disposer de 100 € de pouvoir d’achat réel, le salarié moyen doit faire face à 117 € de cotisations et d’impôts en France, contre 115 en Belgique, 114 € en Autriche, 104 € en Allemagne, 102 € en Italie. Par comparaison, la moyenne de l’UE est de 82 €.
En 2023, le taux réel d’imposition du salarié est de 44,1 dans l’UE à 27, en baisse de 0,1 % par rapport à 2022 et de 1,5 % par rapport au pic de 2014.
Concrètement, un salarié moyen générant 100 € de revenus avant charges et impôts supporte 44,10 € de prélèvements obligatoires en 2023. Il peut, in fine, disposer à sa guise de 55,90 € de pouvoir d’achat réel. Ce qui représente 0,10 € de plus qu’en 2022 et 1,50 € de plus qu’en 2014.
Le salarié moyen français coûte 57 145 € à son employeur (8ème rang de l’UE). Mais son travail est si fiscalisé (54,1 %), qu’il ne lui reste que 26 243 € nets de charges et impôts (10ème rang de l’UE).
L’essentiel des prélèvements sur le salarié moyen s’explique par les cotisations patronales (55 %) et salariales (31 %), l’impôt sur le revenu (8 %) ou la TVA ayant une place moindre (6 %).
En France, les cotisations sociales (26 665 €, 1er rang de l’UE) sont plus élevées que le salaire net (26 243 €, 10ème rang de l’UE). Elles représentent 101 % du salaire net, c’est le record parmi les pays l’UE en moyenne à 50 %.
Alors que l’employeur en France fait face à un coût du travail du même ordre que celui des pays du Nord de l’UE, le salarié moyen a un salaire net intermédiaire entre celui des pays du Nord et des pays du Sud.
L’importance des prélèvements français ne s’explique pas par une meilleure offre de protection sociale et de services publics
Le pouvoir d’achat du salarié moyen français est plus contraint que dans les pays de tradition sociale Beveridgienne (Royaume-Uni et Irlande), mais aussi que dans les pays du Nord à tradition sociale proche de la nôtre.
Pour un même coût employeur, le salarié moyen français touche 15 à 28 % de salaire net en moins que les Suédois ou Finlandais, bénéficiant eux-aussi de prestations sociales et de services publics significatifs.
L’étude montre que la pression sociale et fiscale française ne s’explique pas par une offre collective plus attractive. Les prestations sociales et publiques françaises ne sont pas connues pour être « bon marché ».
C’est notamment le cas pour les retraites, qui représentent 25 % des dépenses publiques et 11 700 € de cotisations sociales pour un salarié moyen. Financées quasi exclusivement en répartition, elles ont un rendement moindre que dans les pays bonifiant les cotisations par l’épargne. Elles coûtent 30 % plus cher aux salariés français, avec des cotisations représentant 28 % du salaire brut contre 22 % en moyenne dans l’UE, pour un gain supplémentaire de 10 %, avec un taux de remplacement futur de 74 % contre 68 % dans l’UE.
Vis-à-vis des salariés néerlandais, bénéficiant de capitalisations collectives, le manque-à-gagner est très significatif. Le taux de remplacement net devrait être moins élevé de 15 points en France (74 % du net en France vs 89 % aux Pays-Bas), alors que les salariés cotisent 3 points de plus (28 % du brut en France vs 25 % aux Pays-Bas).
Le rapport qualité-prix est aussi médiocre dans l’éducation, qui représente 9 % des dépenses publiques. On constate une dégradation du positionnement français, en dépit d’un investissement collectif majeur. Alors que la France dépense 155 milliards d’euros par an, elle n’arrive qu’en 17ème position parmi 27 pays européens. Si la France se rapprochait des pays les plus efficaces dans l’adéquation avec le marché de l’emploi, elle pourrait économiser jusqu’à 43 milliards d’euros par an.
L’étude montre que la pression sociale et fiscale française n’est pas synonyme de mieux vivre. Elle montre que la satisfaction vis-à-vis de la vie est meilleure dans onze pays ayant une pression fiscale et sociale moindre : l’Autriche, la Belgique, la république Tchèque, le Danemark, la Finlande, l’Allemagne, l’Irlande, la Lituanie, le Luxembourg et la Suède.
A PROPOS DU JOUR DE LIBERATION FISCALE
Le Jour de libération sociale et fiscale est le jour où le salarié moyen arrête en théorie de payer des charges et des taxes et peut disposer à sa guise des fruits de son travail. Cette date, présentée parfois comme le jour où le salarié cesserait de « travailler pour la collectivité », est plutôt celle où il devient libre d’utiliser, comme il le souhaite, les fruits de son travail.
Les calculs portent sur un salarié célibataire ayant le salaire moyen de chaque pays. Ils tiennent compte des cotisations patronales et salariales aux régimes obligatoires de droit public ou de droit privé (mutuelles, fonds de pension…), de l’impôt sur le revenu et de la TVA applicable en 2023.
La particularité de cet indicateur de liberté économique est de rendre concrète la situation des salariés moyens de l’UE en intégrant la fiscalité sur le travail et la consommation de chaque pays. Les calculs des cotisations sociales aux régimes obligatoires, qu’ils soient de droit public ou de droit privé (mutuelles, fonds de pension…) et d’impôts sur le revenu sont faits par EY pour les 27 pays de l’UE.
CITATIONS
Nicolas Marques, Directeur général de l’Institut économique Molinari, co-auteur
« En dépit des réaménagements des charges sociales et de l’imposition sur le revenu des dernières années, les salariés moyens français restent les plus fiscalisés d’Europe, devant les Belges et les Autrichiens.
Les salariés moyens français sont devenus au fil du temps des champions des charges et des impôts. Conséquence, leur pouvoir d’achat est plus contraint.
Penser que les entreprises ont les moyens de corriger structurellement cette situation en augmentant les salaires est une illusion. Les charges et impôts représentent 54 % et lorsqu’un employeur verse 100€ de plus à un salarié, ce dernier touche seulement 46 euros une fois les charges et impôts réglés.
Pour redonner du pouvoir d’achat aux salariés, il faudrait avoir le courage d’affronter les enjeux structurels français avec des réformes systémiques permettant de dynamiser les salaires nets.
Il faut réduire encore plus les impôts pénalisant la création d’emplois et la croissance des salaires. Une partie significative des impôts de production, hors normes dans l’Hexagone, est transférée aux employés sous la forme d’augmentations de salaires moins généreuses. Ces impôts, qui nuisent à la création de richesse et au pouvoir d’achat, sont des erreurs sociétales.
Côté dépenses, il faut diversifier le financement des retraites, qui repose quasi exclusivement en France sur les prélèvements obligatoires nuisant à la compétitivité et à l’emploi. Chez nos voisins, une part significative des pensions est financée avec des capitalisations collectives. Cela rend le financement des retraites moins coûteux pour l’économie, augmente le rapport qualité-prix pour les actifs et les retraités, tout en réduisant les inégalités patrimoniales avec une partage encore plus large de la valeur. »
Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari et co-auteure
« Contrairement aux idées reçues, l’importance des charges sociales et des impôts en France n’est pas la marque de meilleurs services publics.
Les retraites, qui absorbent 25% des dépenses publiques, sont plus coûteuses que dans les pays européens s’appuyant à la fois sur la répartition et la capitalisation collective (Pays-Bas, Suède…). La santé et l’assurance maladie, qui absorbe 20 % des dépenses publiques, souffre d’engorgements et d’un manque d’innovations. Nos dépenses d’éducation, qui absorbent 9 % des dépenses publiques, présentent un mauvais rapport qualité-prix. On constate une dégradation du positionnement français, en dépit d’un investissement collectif majeur.
Pour bien dépenser, il faut avoir le courage de vérifier le rapport qualité/prix des services rendus. Or, nous avons perdu l’habitude de faire cette démarche de bon sens et de corriger le tir lorsque le rapport qualité/prix des prestations collectives n’est pas au rendez-vous. »
James Rogers, chercheur associé à l’Institut économique Molinari,co-auteur
« Les salariés français, belges, autrichiens, allemands et italiens consacrent toujours plus de la moitié des sommes distribuées par leurs employeurs en charges et impôts.
Cela vaut la peine de se demander pourquoi ils ne reçoivent pas en retour les retraites les mieux financées, les meilleurs soins de santé ou les meilleures écoles et pourquoi ils ne sont pas en tête des indicateurs de développement humain ou de bien-être ».
RESSOURCES
L’étude La pression sociale et fiscale réelle sur le salaire moyen au sein de l’UE en 2022 (14ème édition, 46 pages) est disponible ici en Français (version UE et Royaume-Uni) à :
https://www.institutmolinari.org/wp-content/uploads/2023/07/etude-fardeau-fiscal-eu-2023.pdf
Une carte Datawrapper est disponible : Taux réel de taxation du salarié moyen en 2023
https://www.datawrapper.de/_/B81YZ/
Ainsi que 3 tableaux Datawrapper :
Une version en anglais (Europe + Afrique du Sud, Brésil, Canada, Etats-Unis, Japon, Royaume-Uni) sera publiée d’ici septembre.
A PROPOS DE L’INSTITUT ECONOMIQUE MOLINARI
L’étude est écrite par Nicolas Marques, Cécile Philippe, et James Rogers de l’Institut économique Molinari.
L’Institut économique Molinari (IEM) est un organisme de recherche et d’éducation dont la mission est de favoriser une meilleure compréhension des phénomènes et défis économiques, en les rendant accessibles au grand public. Ses travaux contribuent à stimuler l’émergence de nouveaux consensus, en proposant une analyse économique des politiques publiques illustrant l’intérêt de réglementations et de fiscalités plus clémentes. L’IEM est une organisation à but non lucratif, financée par les cotisations volontaires de ses membres, individus, fondations ou entreprises. Affirmant son indépendance intellectuelle, il n’accepte aucune subvention publique.
POUR TOUTE INFORMATION OU INTERVIEW, CONTACTER
Nicolas Marques, directeur général de l’Institut économique Molinari, co-auteur de l’étude
nicolas@institutmolinari.org, +33 6 64 94 80 61
Cécile Philippe, présidente de l’Institut économique Molinari, co-auteure de l’étude
cecile@institutmolinari.org, +33 6 78 86 98 58