Le Trends Tendances Magazine sortait un dossier fort intéressant (de la plume de l'excellent Sébastien Buron) sur l'utilisation de l'intelligence artificielle (IA) par l'administration fiscale. J'ai eu le plaisir de réagir et de répondre à quelques questions.
L'IA reste une notion difficile à appréhender. On pourrait dire qu'elle est à la fois "abstraite" (elle est composée d'algorithmes et de formules mathématiques complexes) et "concrète" (elle s'appuie aussi sur du matériel). Dans un article récent consacré par le Le Figaro à l'utilisation de l'IA par l'administration fiscale française, un fonctionnaire expliquait que les données (confidentielles) étaient stockées "physiquement" dans un "entrepôt rempli de rangées d'armoires où on empile des centaines de tours de PC"... ("Comment le fisc utilise l'intelligence artificielle pour repérer les fraudeurs", Figaro du 20 décembre 2023).
L’administration fiscale belge utilise le numérique et les technologies de pointe afin de désigner les contribuables « à risque » (qui feront l’objet d’un contrôle fiscal). Le dossier du trends relate une interview de l'ancien patron du SPF Finances, qui évoque les "data miners" faisant de l'analyse prédictive de risque basée sur des algorithmes pour déterminer quelles déclarations doivent être vérifiées.
Autre exemple repris dans le dossier du trends: le web scraping (technique consistant à retirer des informations du web afin de compléter/documenter/affiner les données dont dispose déjà le fisc).
L’administration utilise aussi de plus en plus les nouvelles technologies afin de traiter une masse d’informations de manière efficace. On peut penser aux informations reçues de l'étranger concernant les comptes financiers (CRS).
Autre exemple: il peut advenir qu’une dizaine agents du fisc débarquent au siège d’une société. Dans certains cas, les fonctionnaires emportent les données informatiques (boîte emails des employés et administrateurs de la société,…). Souvent, il s’agit d’une masse énorme d’informations, qu’une poignée de fonctionnaires aurait beaucoup de mal à « digérer » et traiter. Dans ce genre de cas, l’administration se sert d’outils informatiques sophistiqués et des nouvelles technologies afin de traiter les informations en question, avec à la clef parfois un redressement fiscal (avis de rectification).
On peut se demander si l'utilisation de l'IA par le fisc est bien respectueuse de l’exigence de transparence administrative. Le cadre juridique actuel semble insuffisant à cet égard...