L'évasion fiscale dans le monde : un rapport 2024 inédit de l'Observatoire européen de la fiscalité

L'Observatoire européen de la fiscalité (EUTO) a publié le 23 octobre 2024 son rapport intitulé « Global Tax Evasion Report 2024 ». Le rapport, préfacé par le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz, résume les travaux de plus de 100 chercheurs à travers le monde pour quantifier le volume et les dynamiques de l'évasion fiscale.



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L'évasion fiscale est-elle en augmentation ou en diminution ?

Est-ce que de nouveaux problèmes émergent, et si oui, lesquels ? Au cours des dix dernières années, des initiatives majeures ont été lancées pour réduire l'évasion fiscale au niveau international. Mais on connaît encore trop peu les résultats de ses initiatives.

Le rapport analyse entre autre les effets de réformes internationales qui paraissaient encore utopiques voici dix ans : la mise en place depuis 2017 d’un échange automatique d’informations bancaires entre les administrations fiscales pour combattre la dissimulation d’actifs dans les paradis fiscaux ; ou encore l’accord international pour une imposition minimum effective pour les multinationales adopté par plus de 140 pays en 2021 pour encadrer la course au moins disant fiscal ; le rapport s’attarde également sur les enjeux qui n’ont pas été traité, comme le taux d’imposition effectif extrêmement bas des milliardaires.

Selon le rapport, l'évasion fiscale reste un phénomène massif et persistant, qui prive les États de ressources essentielles pour financer les services publics et la transition écologique. Le rapport estime que les pertes fiscales liées à l'évasion des particuliers s'élèvent à environ 500 milliards de dollars par an au niveau mondial, dont 150 milliards pour l'Union européenne. Les pertes fiscales liées à l'évasion des multinationales sont quant à elles estimées à environ 600 milliards de dollars par an au niveau mondial, dont 200 milliards pour l'Union européenne.

Le rapport souligne également les inégalités et les distorsions engendrées par l'évasion fiscale, qui favorise les plus riches et les plus puissants au détriment des plus pauvres et des plus vulnérables. Le rapport montre que les pays en développement sont proportionnellement plus affectés par l'évasion fiscale que les pays développés, et que les femmes sont plus pénalisées que les hommes par la réduction des dépenses publiques induite par l'évasion fiscale.

Six recommandations

Le rapport formule six recommandations visant à résoudre les problèmes identifiés dans le passé. Le thème commun de ces recommandations est qu'elles visent à réduire le déficit fiscal des sociétés multinationales et des particuliers fortunés. Les déficits fiscaux représentent la différence entre ce que ces acteurs paient en impôts aujourd'hui et ce qu'ils paieraient si les impôts minimums étaient correctement appliqués. Réduire les déficits fiscaux des multinationales et des personnes fortunées peut non seulement générer des montants importants de recettes gouvernementales, mais aussi contribuer à accroître l’acceptabilité sociale de la mondialisation. Leurs propositions sont les suivantes :

  1. Réformer l'accord international sur la taxation minimale des sociétés pour mettre en place un taux de 25 % et éliminer les failles du dispositif qui encouragent la concurrence fiscale.
  2. Instaurer un nouvel impôt minimum mondial pour les milliardaires du monde, équivalant à 2 % de leur patrimoine.
  3. Mettre en place des mécanismes pour taxer les personnes fortunées qui ont été résidents à long terme dans un pays et choisissent de s'installer dans un paradis fiscal.
  4. Mettre en œuvre des mesures unilatérales pour collecter une partie des déficits fiscaux des sociétés multinationales et des milliardaires en cas d'échec des accords mondiaux sur ces questions.
  5. Avancer vers la création d'un Registre Mondial des Actifs pour lutter plus efficacement contre l'évasion fiscale.
  6. Renforcer l'application des règles de substance économique et des régles anti-abus.

Le rapport est disponible en ligne sur le site de l'EUTO, ainsi qu'en version papier sur demande.

L'Observatoire européen de la Fiscalité (EU Tax Observatory) est un centre de recherche indépendant et pluridisciplinaire, créé en 2021 avec le soutien financier du Parlement européen. Il a pour mission de mener des recherches innovantes sur la fiscalité, de contribuer à un débat démocratique et inclusif sur l'avenir de la fiscalité, et de favoriser le dialogue entre la communauté scientifique, la société civile et les décideurs politiques dans l'Union européenne et dans le monde.

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