Le paysage des expertises judiciaires a bien changé depuis 12 ans et ce n’est pas encore terminé pour le bien des contribuables et des experts.
Le paysage des expertises judiciaires a bien changé depuis 12 ans et ce n’est pas encore terminé pour le bien des contribuables et des experts.
Jusqu’en 2007, les tribunaux désignaient les experts à qui ils faisaient confiance sans vraiment les contrôler. Le déroulement des missions tombait parfois au fond des oubliettes des palais de justice. Il n’y avait pas de liste officielle des experts, bien que cela fût prévu par la législation. Les experts étaient livrés à eux-mêmes et les associations telles que l’ABEX ou la CEJA se chargeaient de l’agréation et de la formation d’experts judiciaires tout en éditant leurs annuaires de membres.
La première partie de la révolution intervint avec la loi de 2007, améliorée et corrigée par celle de 2009. Elle donna au juge une mission de contrôle de l’expertise et fit émerger la notion de "juge actif", à savoir que les tribunaux commencèrent à suivre les experts et les expertises de plus près. Un autre fait nouveau, non des moindres, interdisait aux experts d’accepter de provisions en direct des parties; elles devaient dorénavant être centralisées aux greffes avant leur libération par le tribunal. Un contrôle des expertises par des rapports semestriels y était aussi prévu ce qui favorisa l’avancement des missions judiciaires. La loi apporta aussi de la transparence dans le mode de calcul des frais d’expertise, un autre élément favorable.
Rien de concret n’était encore prévu pour l’agréation et le contrôle des experts judiciaires jusqu’à la loi du 10 avril 2014, instaurant des conditions d’agréation et de formation juridique ainsi que le registre des experts judiciaires. Ce fut une nouvelle étape de l’amélioration des travaux des experts qui, dans un premier temps, purent s’inscrire dans le registre provisoire dès 2016. Pour ce faire et c’est toujours le cas, il fallait joindre des preuves de compétence et de formation et s’engager à respecter un code de déontologie.
1800 experts sont actuellement inscrits dans le registre provisoire.
Le contexte n’a pas fini d’évoluer puisque le registre officiel des experts judiciaires se met progressivement en place et la commission d’agréation des experts prend son envol. Lorsqu’elle examinera les dossiers, ce qui risque de prendre plusieurs années, chaque candidat devra prouver ses compétences et son expérience dans les matières revendiquées. La tâche sera facilitée pour les membres d’instituts professionnels qui assurent déjà des contrôles (comme l’IPCF, l’IEC et l’IRE) et pour les experts de longue date. Les autres et notamment les débutants devront constituer un dossier solide.
Le code de déontologie imposé aux experts par l’arrêté royal du 25 avril 2017 ne surprend guère ceux qui en respectent un autre que leur profession impose. Il vise à protéger les parties en litige juridique, préserver l’intégrité de la profession et garantir la qualité des services professionnels. Il insiste sur les valeurs d’indépendance, objectivité et impartialité dont les experts doivent faire preuve avant, pendant et après leur mission.
Il leur assigne sept obligations pour faire montre d’indépendance, impartialité, conscience et intégrité. Il détaille leurs obligations d’indépendance et rappelle qu’ils doivent informer les parties en toute transparence du mode de calcul de leurs honoraires et frais. Il impose également aux experts de ne pas confondre leurs missions judiciaires et privées avant de consacrer un chapitre à leurs formations continue et leur obligation d’assurer leur responsabilité professionnelle.
Evolution de la réglementation relative aux données privées oblige, le dernier chapitre du règlement de déontologie insiste sur les mesures de protection que les experts judiciaires doivent prendre ainsi que sur les informations qu’ils doivent transmettre aux parties sur l’utilisation de leurs données. Cela n’étonnera personne connaissant le RGPD.
Le cadre légal des experts judiciaires intègre encore l’arrêté royal du 30 mars 2018 fixe la formation juridique de minimum 36 heures, réparties en six modules, que tout expert devra justifier pour être admis au registre définitif. Gageons donc que cette évolution juridique améliorera encore la qualité des services rendus par les experts judiciaires au bénéfice des justiciables.