Lassés de la pression fiscale croissante sur le patrimoine, de nombreux particuliers belges fortunés transfèrent chaque année leur domicile fiscal vers des cieux où la fiscalité est plus douce. Parmi leurs destinations favorites figurent, notamment, la Suisse, le Royaume-Uni, Monaco, le Grand-Duché de Luxembourg, le Portugal, l’Italie, Israël et les Émirats arabes unis (Dubaï).
On observe toutefois aujourd'hui une tendance de certains États à durcir, voire à éradiquer, leurs régimes fiscaux de faveur dédiés aux particuliers fortunés (High Net Worth Individuals, HNWI) venant s'établir sur leur sol. Il en va notamment ainsi du Portugal et du Royaume-Uni.
Le Portugal a créé en 2009 un régime fiscal sur mesure afin d’attirer des particuliers fortunés : le régime des "résidents non habituels" (RNH). Ses attraits sont multiples, notamment la possibilité de recueillir des revenus passifs d’origine étrangère (par exemple, des dividendes ou des intérêts générés par un portefeuille-titres) en exonération d’impôt ou encore la faculté de percevoir une pension étrangère moyennant une taxation de 10 %. De nombreux Belges sont partis vivre au Portugal pour bénéficier de ce régime de faveur, applicable pendant 10 ans.
Le Portugal a mis fin à ce régime avec effet au 1er janvier 2024. Ceux qui en bénéficiaient au 31 décembre 2023 peuvent toutefois continuer à en profiter jusqu’à l’expiration de la durée de validité de 10 ans. Par ailleurs, certaines règles transitoires réservent une dernière possibilité de bénéficier de ce régime aux personnes qui transfèrent leur résidence fiscale au Portugal d’ici le 31 décembre 2024.
Le Royaume-Uni est prisé en raison du statut fiscal ultra-favorable de "resident non domiciled", également dénommé "non-dom" dans le jargon. Généralement, lorsqu’un particulier belge vient s’établir au Royaume-Uni pour une longue période, il est considéré comme "resident but not domiciled". Ce statut "non-dom" conduit à une taxation sur une base territoriale : l’impôt est prélevé sur les seuls revenus et gains en capitaux de source anglaise. Les revenus et gains en capitaux étrangers sont uniquement taxés dans la mesure où ils y sont "rapatriés" (c’est ce qu’on appelle la "remittance basis"). Les "non-dom" peuvent, par ailleurs, aisément éviter les droits de succession. Ce statut peut être appliqué pendant 15 ans.
Prenons l’exemple d’un rentier belge, titulaire d’un compte-titres ouvert auprès d’une banque suisse, qui part vivre au Royaume-Uni. Il évite tout impôt en Angleterre sur les revenus et gains en capitaux étrangers (dividendes sur des actions de Nestlé, plus-values sur des actions Total…), pourvu qu’il laisse l’ensemble des revenus et plus-values hors de l’Angleterre. Il peut donc les thésauriser en Suisse ou les dépenser en Belgique ou ailleurs dans le monde. Par contre, s’il ramène une partie des revenus ou plus-values (générés par ses investissements détenus dans la banque suisse) en Angleterre, il est imposable sur ce montant au Royaume-Uni.
Le ministre britannique des Finances, Jeremy Hunt, a annoncé l’abrogation de ce statut de "non-dom" et son remplacement par un système dénommé "Foreign Income and Gains" ("FIG") qui entrera en vigueur en avril 2025.
En bref :
Terminons par un rapide tour d’horizon d’autres juridictions qui restent encore fort attrayantes pour les Belges en mal d’optimisation fiscale.
La Suisse reste attrayante, grâce à son régime d'imposition forfaitaire ("imposition suivant la dépense") qui a défrayé la chronique lors de l'exil d'Alexandre Van Damme. Selon ce système, la base imposable se détermine au regard des dépenses du contribuable et non de ses revenus mondiaux. Au plus le patrimoine du contribuable est élevé, au plus ce régime est attrayant.
Monaco reste l'un des "paradis fiscaux" préférés des Belges grâce à l'absence d'impôt sur le revenu et de droits de succession (hormis sur les biens mobiliers et immobiliers situés à Monaco, étant entendu que les héritiers en ligne directe et le conjoint survivant échappent aux droits de succession).
L'Italie reste aussi fort compétitive à la faveur de sa taxation forfaitaire libératoire de 100 000 euros sur les revenus d'origine étrangère (peu importe qu'ils soient rapatriés en Italie).