Pas de "taxe Covid"

Dans l’Antiquité, les grecs avaient inventé « l’eisphora », un impôt sur le revenu foncier perçu de façon exceptionnelle, pour faire face précisément à des situations exceptionnelles, telles la reconstruction d’une partie de la Cité après une guerre ou la construction d’un port. Mais, hélas, cet impôt exceptionnel fut progressivement répété au fil du temps et des circonstances , pour finalement donner lieu à l’impôt national frappant chaque année la possession de biens mobiliers et immobiliers.


Face à la terrible crise que nous traversons, à la fois sanitaire et économique , j’entends déjà des voix généreuses s’élever pour proposer de prélever dans les prochains mois un impôt de crise et solidaire. Cet impôt permettrait de renflouer les caisses d’un Etat qui se voit sans cesse contraint d’hélicoptériser des aides financières à de nombreux citoyens et entreprises en grande difficulté. Leur message est qu’il faudra inévitablement combler cette dette abyssale qui se creuse chaque semaine.


Voilà une très mauvaise « bonne idée » ! Lorsque les entreprises, professions libérales, commerçants sortiront peu à peu la tête hors de l’eau et produiront à nouveau de la valeur ajoutée, un telle taxe dont on imagine qu’elle ne sera pas modique, risque certainement de leur asséner le coup fatal. Et l’on devra constater que, par cet impôt nouveau, les ailes d’une croissance dont tous espèrent qu’elle décolle au plus vite, seront immédiatement coupées dès leur envol.


Il est en outre à craindre que cet impôt de crise, insidieusement, comme du temps des Grecs, se mue peu à peu en une cotisation annuelle intégrée, incrustée même dirais-je, pour de très nombreuses années, dans notre code des impôts sur les revenus. Notre histoire fiscale atteste que cette hypothèse est loin d’être une fiction.


Les indépendants et les artisans en particuliers, dont le seul tort est d’avoir voulu faire de leur passion leur métier et qui paient le plus fort tribut à cette crise, seraient sans conteste les premières victimes de cette taxe. Autour de moi, je n’entends que des messages de jeunes créateurs inquiets, de start-up freinées dans leurs élans, de producteurs ne sachant écouler leur stock., de commandes stoppées net. On n’observe plus l’enthousiasme et le feu de ceux qui ont osé se lancer et prendre des risques, et certains se mettent même à regretter de n’avoir pas choisi la carrière de commis de l’Etat. Les aides fédérales et régionales qu’ils reçoivent sont certes les bienvenues, mais s’avèrent en fin de compte insuffisantes, une fois que sont payées les charges fixes.

On ne doit pas perdre de vue par ailleurs que les multiples charges fiscales et sociales qui aujourd’hui sont reportées, par bienveillance et compréhension, aux trimestres suivants devront un jour être payées et se cumuleront avec les charges à assumer à ce moment-là. Et cela va faire mal !


Il faut donc tout entreprendre pour ne pas alourdir la barque plus que fragile de cette cohorte de créateurs courageux lorsque se manifesteront les premiers signes d’une timide relance économique. Il est d’ailleurs piquant de noter que ce sont toujours les personnes dont les fins de mois sont assurées par un revenu sécurisé de l’Etat qui proposent des taxes nouvelles. Laissons-les vivre la vie des indépendants quelques mois et nous verrions par miracle disparaitre ces propositions d’impôts de « solidarité ». L’Etat-providence est toujours prôné par ceux qui en dépendent intégralement.


Il faudra sans nul doute redresser les finances d’un Etat qui s’est appauvri considérablement. Il faudra certainement trouver des fonds pour reconstituer notre sécurité sociale et donner enfin aux chercheurs et à nos hôpitaux le budget qu’ils méritent. Mais ce ne peut être fait que par la croissance et non par l’impôt .


D’ailleurs, ces deux notions ne sont pas incompatibles puisque la croissance génère naturellement l’assiette imposable qui garantit les recettes fiscales en termes d’impôt des sociétés, de TVA et de précompte professionnel principalement. Une entreprise qui respire est notre meilleure alliée pour nous sortir de l’une des plus grandes crises que notre pays et le monde traverse en ce moment. Donnons-lui dès lors toutes ses chances par des incitants fiscaux et non par des prélèvements fiscaux.


Source : Linkedin

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