Planification patrimoniale : comment la refonte du droit d’usufruit impacte toutes les donations immobilières?

La refonte du droit d’usufruit révolutionne la planification patrimoniale tant pour les donations encore à réaliser que pour celles déjà intervenues.

Depuis la réforme du droit des biens entrée en vigueur le 1er septembre 2021, donner signifie encore moins se dépouiller ! En effet, une donation soigneusement aménagée permet de garantir au donateur de conserver les droits souhaités sur les avoirs donnés tout en protégeant efficacement son éventuel conjoint survivant et en sécurisant les droits de la personne gratifiée.

Intéressons-nous à Romain et à son fils Liam. Romain est propriétaire d’une maison à Bruxelles valant 750 000 euros. Si Romain vient à décéder sans avoir mis en place une stratégie patrimoniale, son fils sera redevable de droits de succession d’environ 160 000 euros. Si Romain lui transmet l’immeuble de son vivant, en deux donations (séparées de trois ans), l’impôt final serait limité à environ 70 000 euros. À noter que Romain peut prendre en charge les frais liés à sa donation sans que ceci ne constitue une nouvelle libéralité taxable dans le chef de son fils.

Bien qu’il soit convaincu de l’intérêt fiscal d’une donation, Romain ne souhaite pas se dépouiller trop rapidement en faveur de son fils. Comment faire ? Romain pourrait donner uniquement la nue-propriété de la maison et se réserver un droit d’usufruit.


Qu’en est-il d’éventuels loyers ?

En sa qualité d’usufruitier, il pourra notamment continuer à l’occuper librement, à la mettre en location et à en percevoir les loyers, sans que son fils gratifié ne puisse interférer.


Les frais de réparation ?

La réforme du droit des biens permet à Romain de garder à sa charge tous les frais d’entretien, de réparation… liés à la maison (en ce compris, les éventuelles grosses réparations qui incombent traditionnellement au nu-propriétaire). Ceci ne manquera pas de rassurer son fils, lequel acceptera la donation sans crainte du "cadeau empoisonné".

Le financement de ces travaux pourrait soulever certaines difficultés, notamment si Romain a donné en parallèle la nue-propriété de ses avoirs bancaires en faveur de son fils. Depuis la réforme, Romain peut, moyennant certains aménagements, continuer à utiliser, tout ou partie des avoirs financiers donnés pour financer les travaux de la maison donnée, et ce, sans que Liam ne puisse s’y opposer.


Et en cas de vente ?

Dorénavant, il est également possible d’aménager la donation pour garantir à Romain de pouvoir continuer à vendre seul l’immeuble sans que Liam ne doive intervenir dans cette transaction. Ces aménagements supposent une grande prudence notamment pour éviter toute déconvenue fiscale plus tard.

Par ailleurs, il est important d’anticiper certaines difficultés pratiques. Par exemple, le notaire chargé de recevoir l’acte de vente pourrait se montrer frileux d’acter la vente sous la seule signature du donateur usufruitier, et ce, malgré les évolutions législatives en ce sens.

Afin d’éviter cette situation, il est recommandé que Liam octroie, dans le cadre de la donation, un mandat à son père par lequel il l’autoriserait expressément à vendre le bien donné en son nom et pour son compte.


Et le prix de vente ?

En cas de vente de l’immeuble, la réforme offre plusieurs options intéressantes quant au sort du prix de vente. Parmi celles-ci : la possibilité pour Romain d’en disposer à son profit (sous certaines conditions) ou la faculté de le réinvestir dans un nouveau bien dont Romain sera usufruitier et son fils sera nu-propriétaire.


Et la protection du conjoint survivant ?

Si Romain est marié, il est possible d’organiser la donation en faveur de son fils pour s’assurer que l’épouse de Romain, si elle lui survit, disposera des mêmes prérogatives sur la maison que celles que son époux s’était réservées.

D’autres précautions peuvent être prises pour sécuriser davantage le conjoint survivant, en particulier dans le cadre de familles recomposées. Dont la possibilité d’interdire aux nus-propriétaires (généralement, les enfants d’une précédente union) de solliciter la conversion de l’usufruit du conjoint survivant.

Au final, les nouveautés apportées par la réforme du droit des biens permettent, si elles sont correctement utilisées, de rencontrer l’ensemble des objectifs recherchés dans le cadre d’une planification patrimoniale. Pour ceux ayant déjà réalisé leurs donations, il est recommandé de faire un audit de leur situation afin d’identifier les éventuelles améliorations à apporter, et ce, pour profiter des dernières évolutions législatives.

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