Parmi les mesures phares de la réforme fiscale Arizona, le nouvel impôt sur les plus-values a déjà fait couler beaucoup d’encre[1]. Cette évolution ne manquera pas de bouleverser les stratégies patrimoniales et financières de nombreux particuliers.
Dès le 1er janvier 2026, un impôt de 10% sera dû sur les plus-values réalisées sur des actifs financiers. La plus-value taxable équivaudra à la différence entre le prix de vente et le prix d’acquisition. Cependant, les plus-values historiques (soit, celles existantes au 1er janvier 2026) demeureront exonérées et ce, sous certaines conditions. Une exonération annuelle de 10.000€ (à indexer) est également prévue. Celle-ci peut être reportée à concurrence de 1.000€/an sur cinq exercices et atteindre ainsi 15.000€ (à indexer). Quant aux moins-values: elles compensent, sous certaines conditions, les plus-values réalisées durant l’année. Elles ne peuvent toutefois pas être reportées d’une année à l’autre.
Ce nouvel impôt est dû lors de la «cession à titre onéreux» d’un actif financier. A noter que certains événements sont fictivement assimilés à une telle cession (par exemple, le rachat d’une assurance-vie).
Le nouvel impôt sur les plus-values n’est pas dû lors d’une transmission d’actifs à titre gratuit (telles une donation). Force est toutefois de constater que ce nouvel impôt ne manquera pas d’avoir un impact en la matière. Pour apprécier celui-ci, prenons le cas suivant: Monsieur acquiert un titre en 2015, il le donne à son fils en 2026, ce dernier le vend en 2028.
Première difficulté: lors de la vente du titre reçu, le fils gratifié sera redevable d’un impôt sur la plus-value équivalant à la différence entre le prix de vente du titre et la valeur à laquelle son père l’a acquise (et non la valeur à laquelle il a reçu le titre). Que se passera-t-il si la personne gratifiée ne parvient pas à établir, au moyen d’éléments probants, la valeur d’acquisition dans le chef du donateur? A ce stade, il ne peut être exclu que l’administration cherche à prélever l’impôt sur l’intégralité du prix de vente obtenu.
Seconde difficulté: vu que la plus-value taxable est définie en se référant à la valeur d’acquisition à titre onéreux par Monsieur en 2015, le fils gratifié peut-il se prévaloir de l’exonération de la plus-value historique? A ce stade, cela ne semble pas autorisé. Ceci pourrait amener certaines personnes à apprécier l’opportunité de réaliser leurs actifs financiers avant de les donner et ce, pour profiter de l’exonération des plus-values historiques.
Conseil pratique: il sera prudent de s’appuyer sur l’acte de donation pour permettre à la personne gratifiée d’apporter aisément la preuve de la valeur à laquelle le donateur a acquis, à titre onéreux, le bien donné.
Depuis la réforme du droit des biens, l’usufruitier peut, dans certains cas, recueillir les plus-values réalisées lors de la vente d’actif dont la propriété a été démembrée. Or, il ressort de l’avant-projet de loi que le nu-propriétaire de l’actif financier serait redevable du nouvel impôt sur les plus-values. Cette dichotomie entre le droit civil et le droit fiscal interpelle… et pourrait entrainer des situations de tax without cash (bien qu’il ne bénéficie pas des plus-values, le nu-propriétaire demeura pourtant redevable de l’impôt).
Conseil pratique: il est prudent d’anticiper et de régler ces situations délicates dès la constitution du démembrement de propriété.
En matière d’assurance-vie, le nouvel impôt sur les plus-values ne serait dû que lors des rachats/retraits pratiqués sur la police. Le dénouement de l’assurance-vie en faveur des bénéficiaires au décès de la tête assurée ainsi que les ventes de titres logés dans l’assurance ne constituent pas un fait générateur du nouvel impôt.
Cette spécificité permet à l’assurance-vie d’offrir plusieurs avantages. Parmi ceux-ci: le fait que l’impôt n’est pas immédiatement dû sur les plus-values réalisées lors d’arbitrages au sein du contrat mais uniquement lors du rachat pratiqué sur la police (soit, un différé d’imposition). L’assurance-vie permet de globaliser les moins-values. La plus-value taxable lors des rachats équivaut, sauf exceptions, à la différence entre la valeur de la police au jour du rachat (intégrant l’ensemble des moins-values subies par la police) et l’ensemble des primes versées. Enfin, l’assurance-vie permet une simplification administrative.
Ces atouts font de l’assurance-vie une alternative de choix aux sociétés simples. En effet, le nouvel impôt sur les plus-values est généralement dû lors de l’apport des titres à la société simple. Il l’est également dès la réalisation d’une plus-value à l’occasion d’une vente de titres logés dans la société simple (absence de différé d’imposition). Par ailleurs, les moins-values sont «captées» annuellement (absence de globalisation des moins-values).
Au final, au regard des nombreuses réformes et de leur complexité, il est indispensable de bénéficier d’une parfaite maitrise des conséquences civiles et fiscales de sa planification patrimoniale.
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[1] Cet article est rédigé sur la base de l’avant-projet de loi introduisant un impôt sur les plus-values approuvé par le Conseil des ministres le 18 juillet 2025.