2) Phase II de la réforme : projet de loi « portant des dispositions diverses » du 3 juin 2025
En bref : les autres mesures visées dans l’accord de pâques ont fait l’objet d’un autre projet de loi « portant des dispositions diverses » du 3 juin 2025. Ces mesures seront pour la plupart applicables dès l’exercice d’imposition 2026.
Parmi les mesures que l’on pourrait qualifier de « positives » pour le contribuable, figurent notamment :
Un point important par rapport à notre dernière contribution concerne la déductibilité des frais de carburant « fossile ».
Dans un premier temps, le projet visait à supprimer la déductibilité de ces frais de carburant pour les voitures, voitures mixtes et minibus, et ce, à partir du 1er janvier 2026, sans égard à la date d’acquisition du véhicule. Les véhicules acquis avant cette date étaient donc concernés.
Un amendement a été déposé le 16 septembre 2025 pour limiter la suppression de la déductibilité des frais de carburant uniquement aux véhicules acquis après le 1er janvier 2026.
L’adoption de cet amendement est nécessaire au regard du principe de sécurité juridique. Wait and see…
3)Réforme fiscale, volet III : avant-projet de loi sur la taxation des plus-values sur actions
En bref : le gouvernement s’est accordé sur un avant projet de loi visant à instauré un principe de taxation généralisée des plus-values sur actions et autres actifs financiers. La prochaine étape sera le débat du texte au parlement.
Voici les éléments importants du texte à ce stade (les choses évolueront encore plus que probablement) :
Actifs visés :
Actions (cotées ou non), obligations, produits dérivés, parts de fonds d’investissement, contrats d’assurance (branche 21, 23, 26), devises, cryptoactifs.
Par contre, les produits d’épargne pension bénéficiant d’un avantage fiscal et les assurances du deuxième et troisième pilier seraient exclues.
Types de plus-values :
Plus-values « classiques » : imposées au taux de 10% ; exonération annuelle : 10.000€ (indexé), report de 1.000€ par an (maximum 5.000€).
Plus-value substantielle : si détention de 20% des actions ou plus (attention : s’apprécie individuellement par contribuable) ; exonération jusque 1 millions € (possibilité de répartir l’utilisation sur 5 ans).
Au-delà : taxation progressive :
Tranche
Impôt
De 1MIO à 2,5MIO€
1,25%
De 2,5MIO à 5 MIO€
2,5%
De 5MIO à 10MIO€
5%
Au-delà de 10MIO€
10%
Plus-values internes : si vente des actions à une société contrôlée par le contribuable (seul ou avec sa famille jusqu’aux collatéraux du 2ème degrés inclus, directement ou indirectement), la plus-value sera imposée à 33%.
Les plus-values réalisées à l’occasion d’apports ne seraient a priori pas visée quant à elles.
Les cessions réalisées dans le cas de transferts d’une société familiale à la génération suivante pourraient à certaines conditions être exclues du régime de taxation à 33% (à confirmer).`
Mais aussi :
Déductibilité des moins values ? Oui mais uniquement sur les plus-value réalisée en cours d’exercice (pas de report de déductibilité des moins-values).
Quid des plus-values historiques ?
La valeur de référence pour déterminer la plus-value serait celle au 31.12.2025. Il y aurait une possibilité pour le contribuable de procéder à une évaluation de ses participations au 31.12.2025 et ce, notamment via un réviseur d’entreprise externe ou expert comptable indépendant certifié.
Le contribuable aurait également la possibilité de choisir de prendre comme référence la valeur d’acquisition des actions (plutôt que la valeur au 31.12.2025) et ce, durant une période transitoire.
Remplacement du régime existant ? Non, le nouveau régime vise uniquement a taxer les plus-values actuellement exonérées sur base de l’article 90 CIR car entrant dans les limites d’une gestion normale d’un patrimoine privé.
Les plus-values taxées sur base du régime actuel demeureront !
En résumé
Il faudra faire avec :
Gestion normale PP:
Plus-value interne
Participation substantielle
Actifs financiers
Gestion « anormale » ou spéculation (voir e.a. rapport du SDA infra) ;
Plus-values « art. 19 bis »
Plus-values « carried interest »
Plus-values « professionnelle »
Plus-values « abusives » (art. 344 CIR)
Etc.
Exemple des complications à venir
En 2028 : Jean vend sa participation dans une société d’investissement dont le patrimoine est investi en action (80%) et obligation (20%) [ce qui n’est en soi pas toujours évident à identifier].
> Prix d’achat (2023) : 20.000€ ;
> Valeur au 31.12.2025 : 30.000€ ;
> Valeur au 31.12.2027 :45.000€ ;
Quelle taxation ?
30% sur 20% de 100% de la plus-value (art. 19bis) ?
10% sur 80% de la plus-value calculée depuis le 31.12.2025, moins éventuel abattement, et sans déduction des frais [futur impôt sur les plus-values] ?
MAIS si spéculation : 33% sur 80% de la plus-value calculée depuis 2023, sans abattement, mais avec déduction des frais [la distinction entre gestion normale d’un PP vs spéculation n’est pas supprimée] ?
Qui calcule l’impôt ? Que faire si Jean multiplie les opérations de ce type au sein de son portefeuille ?
Il s’agit selon nous d’une occasion manquée d’harmoniser et de rendre (enfin) clair et prévisible le régime de taxation des plus-values (notion de gestion normale d’un patrimoine privé = beaucoup trop floue).
4)« Accord d’été »
Le gouvernement s’est accordé ce 21 juillet sur une 4ème vague de mesures issues de l’accord de gouvernement. La prochaine étape sera l’élaboration d’un avant projet de loi, puis son dépôt au parlement.
La plupart des mesures devraient entrer en vigueur à partir de 2026 (certaines, de manière progressive avec leur plein effet en 2029). Les mesures ci-après devront faire l’objet des débats parlementaires et sont donc susceptibles d’évoluer.
Plusieurs mesures sont prévues pour réduire la pression fiscale :
Majoration de la quotité exemptée d’impôt de manière progressive ; objectif : 15.300€ en 2029 ; ceci devrait représenter une économie d’impôt d’environ 91,5€ par contribuable. Notons qu’entre 2026 et 2028 (inclus), la majoration devrait être relativement limitée ;
Augmentation de la quotité exemptée d’impôt pour le 1er enfant à charge ; objectif : 2.650€ en 2029 ; en contrepartie, suppression de l’indexation àpd du 3ème enfant ;
Mesure incitant à l’emploi
Augmentation du bonus à l’emploi fiscal ;
Réduction de la CSSS pour les isolés ;
Instauration d’un régime favorable pour les heures supplémentaires (180H) ;
Taux spécial d’imposition applicable aux revenus d’un emploi exercé par les retraité (33%) ;
Exonération pour les ventes en lignes via plateforme numériques (ex : Vinted) : taux de 33% exclu pour les revenus inférieurs à 2.000€ / an ;
Suppression de la réduction d’impôt sur les allocations de chômages ;
Imposition des revenus d’intégration (CPAS) ;
Déduction pour indépendants
Instauration d’une déduction spéciale pour indépendant à titre principal ou complémentaire ;
Possibilité pour eux de déduire un montant forfaitaire de 650€ (en 2026) et jusqu’à 900€ (en 2029) ;
Lutter contre les rémunérations alternatives / « ATN »
Régime des dirigeants : taux réduit ISOC uniquement si :
la rémunération minimum de 50.000€ indexé (au lieu des 45.000€ actuels)
ATN = maximum 20% de la rémunération du dirigeant ;
Régime des travailleurs : imposition distincte de 7,5% sur la partie des ATN qui dépasse 20% ;
Ex :
Salaire : 10.000€
ATN divers : 3.000€ ;
Excédent par rapport aux « 20% » : 1.000€
Imposition distincte : 75€
-Seraient uniquement visés : les ATN forfaitaires (art. 18 AR/CIR, loi de 1999 sur les options sur actions, etc.)
Droits d’auteur
Le régime serait de nouveau applicable aux « professions numériques » et ce, dès 2026.
Etc.
5)Rapport annuel du SDA : quels points d’attention ?
Le rapport annuel 2024 a été publié ce 10 septembre 2025. Il permet notamment d’identifier les préfiling négatifs et les motifs qui ont conduit à un accueil défavorable. Il permet ainsi de mieux comprendre le raisonnement du SDA en ce qui concerne certaines questions complexes. Ce rapport est disponible ici
Voici quelques points d’attention.
Réserve de liquidation & avance sur boni de liquidation
Une société détenue par deux actionnaires (en désaccord) est dissoute judiciairement par décision du tribunal. Un liquidateur a été désigné.
Depuis sa nomination, le liquidateur a vendu la majorité des actifs. Toutefois, un litige en cours empêche la clôture définitive de la liquidation.
Le demandeur souhaite distribuer une partie des liquidités excédentaires sous la forme d’une avance sur liquidation, afin d’éviter que les fonds demeurent inactifs dans une société sans activité.
Le SDArappelle que :
La loi (article 2:99 CSA) prévoit que la liquidation peut s’étendre sur plusieurs exercices, sans délai obligatoire pour sa clôture.
En cas de procédure judiciaire retardant la clôture, le liquidateur peut verser une avance sur la liquidation.
Cette possibilité est reconnue tant par la CNC (avis 2010/22) que par l’Administration fiscale (com.IR 208/27), qui considèrent que ces avances constituent une répartition fractionnée de l’avoir social.
En conséquence, le SDA confirme que la distribution d’une avance sur liquidation est assimilée à une répartition de l’avoir social. Elle peut dès lors être exempte de précompte mobilier.
(attention : le rapport du SDA parle d’application du précompte mobilier conformément à l’article 209 CIR92, mais cette phrase ne reflète pas la conclusion du SDA).
Plus-values sur actions : de plus en plus « abusives » ?
Monsieur X a racheté les parts de Monsieur Y et a transféré ses propres participations privées à ses holdings, par vente et non par apport en nature.
Le demandeur justifie ce choix par plusieurs arguments :
L’existence d’un mécanisme d’earn-out rendant complexe l’évaluation de la valeur des actions, ce qui rendait l’apport inadapté.
L’apport aurait considérablement accru la valeur des holdings, compliquant l’entrée d’actionnaires minoritaires ou de collaborateurs.
L a vente constitue une opération plus simple et moins coûteuse qu’un apport, qui requiert l’intervention d’un réviseur et d’un notaire.
Le SDA considère toutefois que ces justifications ne sont pas suffisantes et estime que l’apport aurait produit le même résultat économique que la vente.
Plus précisément :
Le mécanisme d’earn-out n’empêche pas un apport, puisqu’une créance issue d’une indemnité peut être elle-même apportée au capital.
Le projet d’ouverture du capital à de nouveaux associés n’a pas de base concrète.
L’argument de la simplicité et du moindre coût n’est pas déterminant, puisqu’il pourrait être invoqué dans toute situation similaire.
En conséquence, le SDA requalifie l’opération en apport de titres au sens des articles 184 et 344 CIR92.
NB : la rapport du SDA contient plusieurs décisions négatives de ce type.
Le demandeur est un bureau d’architectes spécialisé dans la conception de projets uniques pour ses clients. Il souhaite verser une partie de la rémunération de ses architectes (stagiaires, indépendants, associés) sous forme de droits d’auteur.
Le SDA rappelle que :
Selon l’article 17, § 1er, 5° CIR92, les revenus tirés de droits d’auteur peuvent être qualifiés de revenus mobiliers à condition que le bénéficiaire dispose d’une attestation du travail des arts.
Les architectes concernés ne disposent pas de cette attestation. Il convient donc d’examiner la seconde catégorie prévue par la loi, à savoir le transfert de droits en vue d’une communication au public ;
Cette catégorie est interprétée comme résiduelle et vise les cas où les œuvres sont exploitées ou utilisées de manière à bénéficier au grand public, par communication, exécution, représentation ou reproduction.
Sur cette base, le SDA estime que la rémunération sous forme de droits d’auteur peut bénéficier du régime fiscal favorable dans la mesure où elle porte sur des œuvres présentant un intérêt qui dépasse la seule relation entre l’architecte et son maître d’ouvrage, et qui sont effectivement destinées à une communication au public au sens large (documents graphiques, photographiques, etc.).
6)Circulaires :
De nombreuses circulaires ont été publiées depuis notre dernière contribution. Il s’agit des circulaires suivantes :
Circulaire n° 2025/C/61 du 24 septembre 2025 ; Commentaire sur les modifications de la déclaration (papier) à l'impôt des non-résidents (personnes physiques) et du document préparatoire de l'exercice d'imposition 2025.
Circulaire n° 2025/C/60 du 18 septembre 2025 ; Cette circulaire est un addenda à la circulaire 2024/C/77 du 05.12.2024 relative au remboursement des frais d'électricité par l'employeur pour la recharge à domicile d'une voiture d'entreprise.
Circulaire n° 2025/C/54 du 5 septembre 2025 ; Cette circulaire remplace la circulaire 2025/C/37 du 10.06.2025 relative au régime d'imposition des rémunérations des pensionnés du secteur des soins.
Circulaire n° 2025/C/55 du 5 septembre 2025 ; Commentaire de la loi du 10.04.2025 visant à fixer le plafond applicable au travail des étudiants à 650 heures.
Circulaire n° 2025/C/53 du 1 septembre 2025 ; Cette circulaire commente la prolongation de l'augmentation temporaire du nombre d'heures de travail supplémentaire avec sursalaire donnant droit à une réduction d'impôt pour le travailleur et à une dispense de versement du précompte professionnel pour l'employeur.
Circulaire n° 2025/C/52 du 1 septembre 2025 ; Demande de renseignements - Délivrance de renseignements par les fonctionnaires - Délégation au Roi - Secret professionnel – Rétributions ;
Circulaire n° 2025/C/51 du 20 août 2025 ; Addenda à la circulaire 2023/C/87 du 13.11.2023 relative à l'exonération fiscale des heures de relance. Commentaire des art. 67 à 69 inclus, de la loi-programme du 18.07.2025 (MB 29.07.2025) ;
Circulaire n° 2025/C/50 du 30 juillet 2025 ; Commentaire de l'arrêt n° 21/2024 de la Cour constitutionnelle du 08.02.2024, de la loi du 12.05.2024 portant des dispositions fiscales diverses et de l'arrêté royal du 20.12.2024 modifiant les dispositions en matière de la dispense de versement de précompte professionnel dans l'AR/CIR 92.
Circulaire n° 2025/C/49 du 28 juillet 2025 ; Cette circulaire commente les modifications apportées par la loi- programme du 18.07.2025 (MB 29.07.2025) à l'article 444 du Code des impôts sur les revenus 1992 (CIR 92) relatif aux accroissements d'impôts applicables en matière d'impôts sur les revenus. Commentaire des articles 38 et 39 de la loi-programme du 18.07.2025.
Etc.
7)Etc.
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