Quand parle trop des monnaies, cela ne sent pas bon…

Depuis plusieurs trimestres, je suis imprégné d’une curieuse impression, celle qu’un ajustement monétaire pourrait se produire prochainement. Pourquoi cette intuition ? Le monde des monnaies est à la fois symbolique et ancré dans la souveraineté régalienne. Or, depuis des années, on observe le phénomène des crypto-monnaies, accompagné de son cortège de frénésies et d’appels à la prudence.

Mais ce n’est pas tout.
Les États-Unis évoquent, sans grande clarté sur les modalités ni les finalités, l’idée d’une réserve stratégique en crypto-monnaies. D’autres pays accumulent de l’or, certains reparlent d’un nouveau Bretton Woods – un ajustement monétaire comme celui décidé, sur la base de l’étalon-or, en juillet 1944. D’autres encore – et ils sont nombreux – se réfèrent aux accords du Plaza, lors desquels les États-Unis imposèrent à leurs partenaires économiques d’affaiblir le dollar.

Bref, cela fait beaucoup.

Ce qui se passe aux États-Unis devrait nous inviter à la réflexion et à la circonspection. En effet, les États-Unis, proches du plein emploi, alimentent une inflation renforcée par diverses mesures prises sous Trump (barrières tarifaires, déportations de travailleurs illégaux, etc.). Cela conduit naturellement à des taux d’intérêt plus élevés, soit parce que la Federal Reserve veut combattre cette inflation, soit parce que les prêteurs cherchent à se prémunir contre une perte de pouvoir d’achat.

Les taux hypothécaires atteignent ainsi près de 7 % pour des emprunts à 30 ans, une situation insupportable pour de nombreux emprunteurs américains, mais aussi dangereuse pour les banques, comme l’ont démontré trois faillites en 2023.

Trump souhaite à la fois faire baisser les prix, lutter contre l’inflation et affaiblir le dollar. Pourtant, la situation actuelle aux États-Unis tend à renforcer la monnaie américaine.

Bien sûr, les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Cependant, en combinant ces signaux contradictoires – l’exigence d’un dollar faible malgré un contexte qui le renforce, et une dette publique américaine qui ne peut que s’envoler – je me dis qu’un paramètre va nécessairement devoir s’ajuster.
Le dollar et la dette publique américaine sont les deux faces d’une même pièce (sans jeu de mots). Je doute de la capacité du dollar à maintenir sa force actuelle et crains un choc susceptible d’ébranler le secteur financier mondial.

Au reste, on peut aussi imaginer un sabordage monétaire américain volontaire devant l’immensité de leurs dettes extérieures. Par deux fois depuis la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont trahi l’ordre monétaire qu’ils avaient imposé en 1944. En effet, les États-Unis ont sabordé le système monétaire en 1971 lors de la rupture des accords de Breton Woods , et ils exportèrent leurs crédits douteux dans des bilans bancaires étrangers en 2008 au risque de faire imploser l’euro.

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