Quel avenir fiscal pour les societes unipersonnelles ?

Pour freiner le passage en société, la réforme fiscale envisage différentes mesures (1) que nous analysons.


La première de ces mesures destinées à lutter contre la "sociétisation" consiste à prévoir l’insertion de dispositions relatives à une rémunération minimale avec pour objectif que l'actionnaire reçoive également une rémunération conforme au marché pour les prestations de travail qu'il a accomplies.

La deuxième mesure consiste à prévoir des dispositions de requalification sur la base desquelles le revenu de la société qui dépasse le « rendement normal du patrimoine » est traité comme un revenu d'activité dans le chef de la personne qui a fourni les prestations de travail.
D’emblée, de telles dispositions se heurtent à une difficulté d’application majeure et qui résulte de l’approche très subjective de leurs auteurs : comment définir un rémunération du marché ? Comment qualifier le « rendement normal du patrimoine » ? Ce genre de proposition crée en réalité plus de problèmes qu’il n’en résout et de surcroît ouvre la porte à d’innombrables contentieux fiscaux. On glisserait vite dans l’arbitraire total du fonctionnaire qui fixerait ses propres critères d’appréciation et on pressent de nombreux problèmes d’interprétation des tribunaux . Trop théoriques et idéologiques, ces règles sont vouées à l’échec.

La troisième mesure proposée consiste à prévoir des régimes spéciaux pour certaines sociétés, p.ex. dans l'hypothèse où un actionnaire important exerce une activité professionnelle liée à cette personne (société) et que la société ne pourrait pas exercer sans l’implication active de cette personne. Un tel régime peut prendre la forme d'un taux d'imposition spécial (p.ex un taux proportionnel et définitif sur tous les bénéfices). Des dispositions en matière de transparence peuvent être envisagées, en vertu desquelles les revenus réalisés par certaines sociétés sont cumulés fiscalement avec les revenus du ou des actionnaire(s) et sont imposés dans leur chef (à l’IPP).

Cette dernière option vise à nier purement et simplement la réalité juridique d’une société commerciale. Derrière la radicalité d’une telle prise de position, on décèle aisément que la société unipersonnelle est dans le collimateur du fisc et que tout doit être mis en œuvre pour orienter les entrepreneurs vers un assujettissement à l’IPP. Diaboliser le passage en société, c’est perdre de vue qu’une de ses fonctions légitimes est aussi de garantir, via l’EIP, une fin de vie décente au dirigeant par l’octroi d’un capital à l’âge de sa retraite . S’il faut obliger les indépendants à ne plus bénéficier de cette possibilité, une réévaluation de leur pension (à un niveau qui se rapproche de celui des employés et fonctionnaires) devrait à tout le moins accompagner cette sanction fiscale. Qui aura le courage politique de proposer cela ?


[1]M Delanote, Note de vision générale concernant la réforme fiscale plus large, p.107

Source : Linkedin, Pierre-François COPPENSConseil fiscal ITAA; Président et Fondateur de l'ADFPC


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