Quelle valeur retenir pour un immeuble dans le cadre d’une déclaration de succession ?

Dans les quatre mois du décès d’un habitant du Royaume, ses héritiers doivent introduire une déclaration fiscale renseignant la valeur des actifs et passifs de la succession. Cette déclaration sert de base à l’administration fiscale pour la perception des droits de succession.



L’article 19 du Code des droits de succession (en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale) (ci-après « CdS ») et l’article 2.7.3.3.1 du Vlaamse Codex Fiscaliteit (ci-après « VCF ») précisent que ce sont les héritiers qui doivent estimer les biens composant l'actif de la succession.


Ceux-ci doivent être indiqués pour leur « valeur vénale » à la date du décès. Il s'agit de la valeur marchande des biens, c'est à dire le montant du prix que les héritiers pourraient raisonnablement obtenir s'ils vendaient l'immeuble dans des conditions normales.

Aucune législation fiscale ne reprend cependant la manière dont cette valeur vénale doit être déterminée alors même que la responsabilité de l’estimation de cette valeur incombe aux héritiers.


L’estimation de cette valeur peut ne pas correspondre à celle retenue par le receveur de l’enregistrement qui, de manière générale, procédera par comparaison avec la valeur retenue pour d’autres immeubles de même nature.



Quelles conséquences en cas de sous-estimation ?


Conformément aux articles 127 du CdS et 3.18.0.0.8 du VCF, la sous-estimation de l’immeuble entraînera, outre des droits de succession complémentaire sur la différence entre la valeur déclarée et la valeur retenue par l’administration fiscale, une amende qui variera en fonction de l’ampleur de la différence constatée.



>Wallonie & Bruxelles

En Régions wallonne et de Bruxelles-Capitale, cette amende est en principe égale au montant des droits complémentaires si l’insuffisance est égale ou supérieure à un huitième.


Toutefois, sauf dans le cas d’une fraude des héritiers, des réductions sont prévues et appliquées automatiquement. Ainsi :

  • Si l'insuffisance dépasse 1/8 sans excéder 1/4 de la valeur déclarée, l'amende s’élèvera à 1/20 des droits supplémentaires ;
  • Si l'insuffisance dépasse 1/4 sans excéder la 1/2 de la valeur déclarée, l'amende s’élèvera à 1/10 des droits supplémentaires ;
  • Si l'insuffisance dépasse la 1/2 sans excéder la totalité de la valeur déclarée, l'amende s'élèvera à 1/6 des droits supplémentaires ;
  • Si l'insuffisance dépasse la valeur déclarée, l'amende s'élèvera à 1/4 des droits supplémentaires.


> Flandre


Les sanctions diffèrent en Flandre :

  • Si l'insuffisance dépasse 10 % sans excéder 25 %, l'amende s’élèvera à 5 % des droits supplémentaires ;
  • Si l'insuffisance dépasse 25 % sans excéder 50 % de la valeur déclarée, l'amende s’élèvera à 10 % des droits supplémentaires ;
  • Si l'insuffisance dépasse 50 % sans excéder 100 % de la valeur déclarée, l'amende s’élèvera à 15 % des droits supplémentaires ;
  • Si l'insuffisance dépasse 100 % de la valeur déclarée, l'amende s’élèvera à 20 % des droits supplémentaires.

Si l’insuffisance n’excède pas 10 % de la valeur déclarée en Flandre et 12,5 % de celle-ci en Régions wallonnes et de Bruxelles-Capitale, aucune amende n’est donc appliquée.


L’insuffisance d’estimation apparaîtra bien souvent à l’occasion de la vente ultérieure de l’immeuble déclaré par les héritiers. Cette vente révélera en effet la « valeur vénale » de l’immeuble et permettra à l’administration de juger de l’existence d’une insuffisance et d’appliquer l’amende prévue.


Les administrations fiscales régionales acceptent toutefois de ne pas appliquer d’amendes lorsque l’insuffisance d’estimation fait l’objet d’une déclaration complémentaire par les héritiers immédiatement après la vente qui est intervenue.



Quelle conséquence en cas de surestimation ?


Si les héritiers, craignant le paiement de droits complémentaires et d’une amende, déclarent un montant supérieur à la valeur retenue lors de la vente ultérieure de l’immeuble, ils ne pourront pas se voir restituer les droits payés en trop.



Comment réagir en cas de contestation de l’administration fiscale ?

Comme nous l’avons indiqué ci-avant, l’administration fiscale procède essentiellement par comparaison avec la valeur retenue pour d’autres immeubles de même nature. Il se peut donc que la valeur qu’elle entend retenir ne corresponde en rien à la réalité parce que l’immeuble déclaré est particulièrement vétuste ou a subi des dégâts importants, ce que ne révèlent pas forcément les extraits cadastraux. Il est donc fortement recommandé d’inviter le fonctionnaire de l’administration fiscale à venir visiter l’immeuble afin de se faire un avis mieux circonstancié ou à lui adresser un dossier photographique.


Si, au terme de ces pourparlers, aucun accord ne peut être dégagé entre les héritiers et l’administration fiscale, il faudra recourir, en Régions wallonne et de Bruxelles-Capitale, à l’expertise de contrôle. Un expert sera donc désigné et déterminera la valeur vénale de l’immeuble. Les frais de cette expertise, qui liera les parties, seront à charge des héritiers. C’est la raison pour laquelle on préconise en pratique de transiger avec l’administration fiscale plutôt que de s’engager dans une telle procédure d’expertise.


Une telle procédure d’expertise n’existe plus en Flandre et il conviendra d’introduire une réclamation afin de contester la position administrative.



Comment se prémunir de tout risque ?

L’administration fiscale peut contester l’évaluation immobilière retenue dans la déclaration de succession dans un délai de deux ans à compter de la date de dépôt de la déclaration fiscale. Les héritiers qui veulent donc atténuer le risque d’une contestation par l’administration fiscale veilleront en général à ne pas procéder à la vente de l’immeuble dans ce délai de deux ans. Cette vente pourrait en effet révéler une valeur supérieure à la valeur déclarée.


En Régions wallonne et de Bruxelles-Capitale, les héritiers les plus prudents pourront également avoir recours à l’expertise préalable. La procédure est identique à celle applicable à l’expertise de contrôle sous réserve que celle-ci a lieu préalablement au dépôt de la déclaration de succession. L’expertise liera définitivement les parties de sorte qu’une vente ultérieure, dans le délai de deux ans, de l’immeuble pour une valeur supérieure ne pourra entraîner de paiement de droits complémentaires ou d’amendes. Dans ce cas également, les frais d’expertise seront mis à charge des héritiers.


La faculté de procéder à une expertise préalable a été abrogée en Flandre à l’occasion de l’adoption du Vlaamse Codex Fiscaliteit. Les héritiers ne sont toutefois pas totalement démunis puisque l’administration fiscale flamande (ci-après « VLABEL ») a rédigé une charte de qualité à l’usage des géomètres-experts auxquels ces derniers peuvent adhérer. La charte définit les critères auxquels une expertise de qualité doit répondre. Ces critères portent notamment sur les qualifications professionnelles de l’expert, mais aussi sur le contenu du rapport d’expertise proprement dit. Lorsque des héritiers feront réaliser, préalablement à l’établissement de la déclaration de succession, une expertise immobilière par un de ces experts, VLABEL en acceptera « en principe » les conclusions.


Bien que formellement non contraignante pour VLABEL, cette expertise sera en effet présumée correcte.



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