Rapport des formateurs : Pour une Belgique prospère, solidaire et durable.

Nous n’oublierons jamais l’année 2020. Le coronavirus a bouleversé nos vies et provoqué une série de désastres : des familles endeuillées, des services de santé à la limite de la rupture, des écoles fermées, des relations sociales réduites. Personne, parmi nos contemporains, n’avait jamais vécu une telle situation.

Comme tous ses voisins européens, la Belgique n’est pas sortie d’affaire. Après la crise sanitaire, et tout en devant apprendre à vivre avec le virus, elle s’apprête à affronter une crise économique et une crise sociale majeures. Jamais auparavant tant de personnes en même temps n'avaient perdu leur emploi ou été mises au chômage temporaire. Jamais tant d'entreprises et d’indépendants n’avaient dû arrêter simultanément leurs activités. A ces crises multiples s’ajoutent la révolution numérique et la transition environnementale, deux évolutions majeures qui sont en train de changer radicalement notre économie et notre société. Elles étaient déjà en cours, l’épidémie ne fait que les accélérer.

Tout ceci nous confronte à nos responsabilités. Nous voulons, au plus vite, amorcer un tournant et construire sur des bases plus solides et plus durables. Cela demandera un effort considérable, mais notre résilience est forte. Dans le passé, la Belgique a toujours réussi à faire face aux épreuves et à rebondir.

Les citoyens, qui attendent avec impatience des solutions et des perspectives, se tournent vers leurs élus et leur demandent à juste titre de surmonter leurs divergences. Les sept partis associés dans la formation du nouveau Gouvernement fédéral répondent à cet appel et décident d’avancer d’un même pas. Après le choc et le chaos, vient le temps de la reconstruction et de la relance. Le monde a changé, l’approche politique doit changer aussi.

Le Gouvernement fédéral s’engage donc à fédérer et stimuler toutes les forces positives, dans un esprit de solidarité et de cohésion. Notre choix est celui de la coopération plutôt que de la désunion et de la tension.

Déterminée à sortir le pays de la crise le plus rapidement possible, la nouvelle majorité porte un projet global et une ambition forte pour l’avenir. « Le monde d’après » ne doit pas être simplement un monde débarrassé du coronavirus. Mais un monde où l’ensemble des citoyens bénéficient d’un maximum de possibilités de construire leur vie librement. Une économie dynamique et performante, une protection sociale efficace et émancipatrice, ainsi qu’une politique environnementale innovante et moderne sont les meilleurs moyens d’y parvenir.

Pour remettre le pays en mouvement, le Gouvernement a défini six axes prioritaires.

1. Un pays solidaire

Nous voulons un pays solidaire, un pays qui ne laisse personne de côté et où chaque individu, reconnu dans sa valeur, est protégé contre les coups du sort. La santé, à cet égard, est fondamentale. Elle est notre bien le plus précieux. Le Gouvernement fera de la gestion de la crise sanitaire sa grande priorité afin de protéger les citoyens. C’est aussi pourquoi nous investirons considérablement dans les soins de santé, avec

un effort particulier pour la santé mentale. Ce refinancement particulièrement important sera une légitime reconnaissance pour le personnel d’un secteur qui a consenti énormément de sacrifices depuis le tout début de l’épidémie.

Le Gouvernement ne se bornera pas à injecter des moyens nouveaux : il mènera des réformes en se fixant des objectifs de santé clairs qui augmenteront la qualité des soins, qui réduiront les inégalités d’accès à ceux- ci et qui réduiront également les dépenses qui ne profitent pas au patient et au personnel. Il appuiera ses politiques en faisant appel aux dernières technologies et connaissances scientifiques. Le Gouvernement, dans le dialogue, introduira également une série de réformes pour rendre plus efficient notre système de soins. Ces réformes permettront de garantir aux patients des soins de santé accessibles qui resteront parmi les meilleurs du monde, et au personnel soignant d’œuvrer dans des conditions plus favorables.

La Sécurité sociale, chère à tous les Belges, sera préservée et son financement rendu pérenne. En parallèle, elle sera renforcée grâce notamment à une lutte accrue contre la fraude sociale. Dans le domaine des pensions, le Gouvernement s’attachera à rapprocher les différents régimes – salariés, fonctionnaires, indépendants – tout en respectant les droits acquis. Il se donne aussi pour objectif de relever la pension minimale et les pensions les plus basses. Vecteur d’émancipation et d’égalité entre les femmes et les hommes, les congés parentaux seront revalorisés. En ce qui concerne la pauvreté, le combat contre l’exclusion recevra de nouveaux moyens et les minimas sociaux seront revalorisés sous la présente législature.

2. Un pays prospère

La Belgique doit être un pays où le travail et l’entrepreneuriat sont récompensés. Les salariés, les entrepreneurs et les indépendants contribuent à la création de richesse et d'emplois. En ces temps difficiles, nous serons aussi là pour toutes les personnes qui participent au bien-être et au fonctionnement du pays. En donnant de l'oxygène à nos entreprises, notamment aux PME, et en leur assurant une base solide pour leur permettre de résister aux chocs.

Les petites entreprises et les commerces ont beaucoup souffert de la crise économique consécutive à l’épidémie. Pour les relancer et raviver la croissance, nous rendrons les investissements dans les PME plus attractifs et revaloriserons le statut d’indépendant.

Créer des emplois est une priorité du Gouvernement. Plus on augmente le taux d’emploi, plus on renforce notre Sécurité sociale. A fortiori quand on sait qu'un emploi de qualité reste aussi la meilleure protection sociale et qu’il est une source vitale d’émancipation. Le Gouvernement récompensera le travail, accompagnera les groupes les plus vulnérables sur le chemin vers l’emploi et visera un taux d’emploi de 80% minimum pour 2030.

Nous mettrons tout en œuvre pour que chacun puisse retravailler le plus vite possible dans les meilleures conditions et pour cela, nous investirons notamment dans les compétences. Le Gouvernement prendra aussi en compte les nouvelles manières de travailler et un nouvel élan sera donné au dialogue social, qui sera permanent dans toutes les matières qui touchent au monde du travail.

Dès son installation, le Gouvernement rédigera un plan de relance ambitieux, en concertation avec les Régions, Communautés et pouvoirs locaux. Le plan de relance et d’investissement de 4,7 milliards donnera un puissant coup de fouet à notre économie, aidera nos entreprises à remplir à nouveau leurs carnets de

commandes, stimulera la création de nombreux emplois et accélérera la transition vers une économie bas carbone.

Le Gouvernement prépare une large réforme fiscale afin de moderniser, simplifier et rendre le système fiscal plus équitable et plus neutre. Le Gouvernement prendra des mesures pour alléger la fiscalité des ménages et mieux la faire coïncider avec l’équation famille-travail et le soin aux membres de la famille âgés habitant sous le même toit. Une forme de taxation numérique doit voir le jour. La Belgique prendra l’initiative dans les discussions en la matière au niveau international. La lutte contre la fraude fiscale se poursuivra sans relâche.

3. Un pays durable

Entrepreneurial et social, le Gouvernement sera aussi très environnemental dans sa manière de concevoir les politiques et d’agir. Il y a urgence et il n’est pas question de regarder ailleurs. La Belgique s'inscrit complètement dans les ambitions climatiques de Paris et dans le Green Deal européen. L'ambition est de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55 % à l'horizon 2030 et de parvenir dans notre pays à la neutralité climatique pour 2050.

Non seulement les changements climatiques nous poussent à faire ce choix, mais le passage à une économie durable implique davantage d'emplois et de nouvelles possibilités de croissance. La Belgique est le pays européen qui a le plus à gagner d'une stratégie climatique ambitieuse. La crise du coronavirus et les nécessités d’un redéploiement sont pour notre pays une occasion historique de basculer dans un autre modèle économique, plus résilient et plus durable. Pour ce faire, le Gouvernement va coopérer avec les entités fédérées qui sont compétentes pour bon nombre de leviers dans des domaines comme le logement, l'énergie, la mobilité et la biodiversité.

Le Gouvernement fera de la transition environnementale une préoccupation transversale et de tous les instants. En matière d’énergie tout d’abord, il développera le renouvelable - en particulier l’éolien et le solaire - et il favorisera leur implantation sur tout le territoire, de la mer du Nord à la région germanophone. Il agira de manière à ce que l’énergie renouvelable, et les économies d’énergie contribuent plus largement au remplacement des sources d’énergie polluantes, dont le nucléaire.

Outre les changements de comportement, nous misons sur l'innovation et la technologie pour sauver la planète. A cette fin, nous prévoyons de créer un véritable fonds de transformation qui investira dans la nouvelle économie. Il serait absurde d’opposer écologie et économie, car elles se renforcent mutuellement. La transition écologique créera de nouveaux emplois, une meilleure qualité de vie et une plus grande capacité d'innovation.

Enfin, une politique de grands investissements, structurants et porteurs de nombreuses retombées, sera menée. Ses premiers bénéficiaires seront le développement durable – énergies renouvelables, isolation des bâtiments, technologies propres – mais aussi le numérique et la mobilité. Le transport ferroviaire et l’intermodalité seront à cet égard particulièrement soutenus.

S’agissant de la mobilité, le Gouvernement prendra toutes les mesures utiles pour favoriser les déplacements les plus respectueux de l’environnement. Des dispositions analogues seront adoptées pour encourager les circuits courts, l’usage de matériaux propres dans la construction, et plus généralement les activités économiques les moins nocives.

4. Un pays sûr

Tout Belge et toute entreprise active en Belgique doit pouvoir compter sur des services de sécurité qui fonctionnent bien, et sur un système judiciaire plus rapide et plus efficace qu'aujourd'hui. Dès lors, le Gouvernement investira considérablement dans la sécurité et la justice afin que la loi soit correctement appliquée, dans un délai raisonnable et indépendamment de la capacité financière de toute personne qui souhaite voir ses droits respectés. Des investissements seront réalisés non seulement dans la numérisation de la justice, mais aussi en faveur des personnes qui y travaillent. Ce faisant, nous éliminerons progressivement l'arriéré judiciaire.

Le Gouvernement souhaite aussi s’attaquer au sentiment d'impunité qui anime certains délinquants et fraudeurs. Le contrat social belge implique des droits et des obligations qui doivent être garantis et mis en œuvre de manière correcte. Nous étendrons le système de justice accélérée et veillerons à ce que toutes les peines soient exécutées efficacement. Également, nous renforcerons la police et donnerons aux bourgmestres une plus grande marge de manœuvre.

5. Un pays de coopération et de respect

Notre pays a connu six réformes de l'État. Depuis 1970, la Belgique s'est transformée, par étapes successives, en un État fédéral sui generis avec des entités fédérées fortes. Il existe un consensus général pour dire que la répartition des pouvoirs est susceptible d’améliorations.

Au cours de la prochaine législature, le Gouvernement entend apporter une contribution importante à la modernisation, à l'augmentation de l'efficacité et à l'approfondissement des structures de l'État. Le Gouvernement lancera un large débat démocratique sur ce sujet, impliquant notamment les citoyens, la société civile et les milieux académiques, ainsi qu'un dialogue entre les représentants politiques. L'objectif est une nouvelle structure de l’Etat à partir de 2024 avec une répartition plus homogène et plus efficace des compétences dans le respect des principes de subsidiarité et de solidarité interpersonnelle. Cela devrait conduire à un renforcement des entités fédérées dans leur autonomie et du niveau fédéral dans son pouvoir. La coopération et le respect devront occuper une place centrale.

Nous nous concentrerons sur le renouveau politique en ouvrant la porte à de nouvelles formes de participation et d'initiatives citoyennes. Des règles essentielles de la vie politique, comme le statut des élus ou la loi électorale, feront d’autre part l’objet d’une proposition de réforme afin que la politique dans notre pays rime davantage avec éthique. Les administrations, elles aussi, seront modernisées, numérisées, diversifiées et féminisées. Par ailleurs, le Gouvernement s’engagera avec détermination pour faire reculer toutes les formes de discrimination, notamment les inégalités qui pénalisent les femmes.

6. La Belgique : une voix forte en Europe et dans le monde

En tant que pays fondateur et pays hôte des principales institutions de l’Union, la Belgique confirme son engagement pro-européen. L'Europe nous a apporté la paix, la sécurité et la prospérité. Pour une petite économie ouverte comme la nôtre, le commerce international est vital. Les années à venir seront décisives pour l'avenir de l'Europe et pour notre rôle dans le monde. La Belgique, qui présidera le Conseil de l’Union européenne au cours de l’année 2024, entend faire de ce moment une occasion de rayonner et de réaffirmer tous ses engagements.

La Belgique et l'économie belge ont en effet tout à gagner au sein d'une Europe forte et unie. L’intérêt de la Belgique et celui de l’Union doivent guider notre action internationale. Le Gouvernement souhaite que la Belgique, fidèle à son histoire, continue à bâtir des ponts et à rechercher activement un nouveau consensus européen. Notre pays soutient donc pleinement l'autonomie stratégique que l'Europe prévoit de développer dans les années à venir.

Nous ne pourrons relever correctement les grands défis de notre temps - changement climatique, terrorisme, extrémisme, risque d'épidémies mondiales, atteintes au droit international et à l’Etat de droit - que si nous travaillons avec les autres pays dans un esprit de partenariat. Sur la scène internationale, le Gouvernement sera un ardent défenseur de la coopération multilatérale. Les objectifs de développement durable et l'Agenda 2030 des Nations Unies y sont au cœur.

Notre pays vise une approche juste de l'asile et de la migration. Nous mènerons une politique humaine pour les personnes qui ont besoin de protection et une politique de retour déterminée. Au niveau européen, la Belgique exige une répartition équitable des responsabilités et des charges.

En conclusion, le bien-être et la prospérité de tous les Belges seront au centre des actions du Gouvernement. Dans un premier temps, nous mettrons tout en œuvre pour vaincre le coronavirus, faire redémarrer l’économie et relancer le pays.

Ensuite, et avec pour point d’orgue la présidence européenne de 2024, nous mènerons les nombreuses réformes économiques, sociales et environnementales qui sont indispensables à notre modernisation.

En 2030, année du bicentenaire, la Belgique pourrait alors apparaître en Europe comme un modèle de dynamisme économique, de solidarité efficace et de développement durable.

Alexander DE CROO Paul MAGNETTE

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