A partir du 1er janvier 2024, de nouvelles dispositions entreront en vigueur pour les successions ouvertes en Région de Bruxelles-Capitale et pour les donations consenties par des résidents de la Région de Bruxelles-Capitale.
Le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale a adopté une ordonnance en vue d’adapter le droit fiscal bruxellois aux nouvelles structures familiales (ordonnance du 6 juillet 2023, MB du 27 septembre 2023). Tout comme la Région Flamande l’a déjà fait, il s’agit de moderniser les droits de succession et de donation et de prévoir notamment un cadre fiscal pour les cohabitants de fait ou les personnes non parentes, de tenir compte de l’augmentation de l’espérance de vie et de l’âge auquel on hérite.
Quelles sont les principales mesures ?
Pour autant qu’ils puissent faire la preuve d’une cohabitation d’un an et l’existence d’un ménage commun, les cohabitants de fait bénéficieront du tarif I de droits de succession applicable entre « partenaires » (c’est-à-dire entre époux et entre cohabitants légaux). Une durée de cohabitation de trois ans sera en revanche requise pour bénéficier du tarif réduit sur la résidence principale et pour l’application du régime préférentiel en matière de transmission d’entreprises et de sociétés familiales. Il s’agit là d’une avancée significative puisque jusqu’à présent, les successions entre cohabitants de fait étaient soumises au tarif « entre autres personnes », avec un taux maximal de 80% pour la tranche au-delà de 175.000 €. Rappelons toutefois que les cohabitants de fait ne sont pas des héritiers légaux : un testament en leur faveur devra toujours être prévu pour qu’ils soient héritiers.
De la même manière, et sous les mêmes conditions que celles prévues en matière de droits de succession, les donations consenties entre cohabitants de fait seront assujetties à des droits d’enregistrement à un taux plus favorable : les donations immobilières seront assujetties au tarif I applicable entre partenaires et les donations mobilières pourront être consenties à un taux réduit de 3%. Pour les donations d’entreprises familiales ou de sociétés familiales, les cohabitants de fait pourront relever du tarif « partenaires » s’ils cohabitent avec le donateur de façon ininterrompue et forment avec lui un ménage commun depuis au moins trois ans au jour de la donation.
L’inscription dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers constitue une présomption (réfragable) de respect de la condition de « cohabitation de fait effective » mais l’administration fiscale pourra refuser cette inscription par exemple en cas de fausse domiciliation ou lorsqu’une même adresse regroupe deux unités d’habitation indépendantes.
Les travaux préparatoires enseignent également que la « tenue d’un ménage commun » n’implique pas nécessairement que les personnes formant ménage commun vivent « amoureusement ». Ainsi le survivant de deux frères ou deux amis qui cohabitent ensemble et forment un ménage commun pourra être considéré comme « partenaire » du défunt pour les droits de succession.
Il s’agit ici d’assimiler des personnes non parentes ou des personnes apparentées à des héritiers en ligne directe du défunt. Par exemple, le défunt pourrait souhaiter gratifier des personnes qui lui ont apporté de l’aide dans les dernières années de sa vie.
Le défunt pourra ainsi désigner, par testament, une ou plusieurs personnes physiques qui seront appelées à recevoir un legs d’une partie de sa succession au taux réduit de 3% pour un montant total de 15.000 €.
Le défunt pourra décider d’attribuer cette somme globale de 15.000 € à une seule personne ou à plusieurs personnes. Si les personnes gratifiées reçoivent plus que la somme globale de 15.000 €, le solde sera soumis aux droits de succession au taux « normal ».
L’instauration de ce taux réduit permettra par exemple à une personne non apparentée gratifiée de 15.000 € de payer des droits de succession de 450 € en lieu et place de 6.000 €, soit une économie de 5.550 €.
Actuellement, en cas de renonciation à une succession, les droits de succession dus par la / les personnes qui profitent de la renonciation ne peuvent être inférieurs à ceux que le renonçant aurait dû acquitter (article 68 du Code des droits de succession Bruxelles-Capitale).
Le législateur de la Région de Bruxelles-Capitale considère cette règle comme un frein à des renonciations à succession dans un contexte où il est devenu courant d’hériter de ses parents à un âge plus avancé et où de ce fait, des héritiers souhaitent plutôt avantager leurs propres enfants.
Avec l’abrogation de l’article 68 du Code, la transmission à la génération suivante sera facilitée et les éventuels « sauts de tranches » que cette renonciation implique ne seront plus pénalisés : l’imposition sera établie en tenant compte de la situation civile de l’héritier telle qu’elle se présente à l’administration fiscale.
L’ensemble des nouvelles mesures est une avancée appréciable dans l’appréhension par le législateur bruxellois des nouveaux modes de vie et de l’augmentation de l’espérance de vie. Il reste encore du chemin à faire, notamment en révisant à la baisse les différents taux d’imposition et en indexant les tranches, ne serait-ce que de la valeur de l’inflation.