A l’occasion de contrôles des usufruits d’immeuble en cas d’acquisition scindée (la société acquiert l’usufruit tandis que l’administrateur acquiert la nue-propriété), le fisc se fonde presqu’exclusivement sur une méthode de calcul proposée par le SDA (qui exclut l’inflation et fait une actualisation sur la base d’un taux de rendement locatif).
Cette référence à ce que le fisc considère comme une évidence et qui donne lieu à une taxation en cas de « surévaluation » de l'usufruit est cependant loin de faire l’unanimité dans la doctrine spécialisée (notamment E. Sanzot, E. G.Lang), mais aussi dans la jurisprudence.
D’autres méthodes sont reconnues par les tribunaux telles la méthode J. Verhoye ou de Christian Jaumain qui ont été reconnues comme valables.
Comme le rappelle en outre le tribunal de première instance du Brabant wallon, en 2021 ( Civ. Brabant wallon 17 sep 2021 (rôle n° 19/1163/A), cette méthode du SDA est loin d’être la seule acceptable :
" La législation applicable en matière d'impôts directs ne prévoit aucune règle pour valoriser un usufruit. Il n'est en effet pas question d'utiliser, en matière d'impôts sur les revenus, les méthodes forfaitaires de valorisation applicables en matière de droits d'enregistrement et de succession. La doctrine et la jurisprudence sont constantes sur cette position. La valeur réelle (valeur économique ou valeur de marché) d'un usufruit correspond à la valeur actualisée des flux de revenus locatifs nets futurs qui pourront, au moins théoriquement, être perçus par l'usufruitier durant toute la durée de son droit. Pour obtenir cette valeur actualisée de revenus futurs, il existe plusieurs méthodes. (…) En principe, aucune des méthodes (actualisation sur base des taux OLO ou sur base du rendement locatif) ne devrait pouvoir être écartée. (…) La charge de la preuve de l'éventuelle surévaluation d'un usufruit repose sur l'administration . "
Le tribunal rappelle que la méthode préconisée par l'administration est par ailleurs imparfaite notamment si elle appliquée automatiquement à toute situation sans distinction.
Le tribunal a statué en l'espèce que l'Etat belge ne démontrait pas que la méthode de détermination de la valeur de l'usufruit conduit à déterminer une valeur qui ne correspond pas à la valeur économique de celui-ci ou à une valeur supérieure réelle de l'usufruit.
Quelles conclusions tirer de cette jurisprudence (qui est confirmée par d'autres jugements) ?
1. Plusieurs méthodes d’évaluation de l’usufruit peuvent coexister en l’absence de texte qui l’impose ;
2. Les juges estiment que le contribuable a le choix des méthodes, à condition bien entendu qu’elles soient économiques ;
3. La méthode du SDA est loin de faire l’unanimité ;
4. Le tribunal de première instance du Brabant wallon rappelle que l’Etat ne peut imposer une méthode plutôt qu’une autre
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Source : Linkedlin, Pierre-Francois Coppens, Conseil fiscal ITAA; Président et Fondateur de l'ADFPC