Circulaire 2019/C/122 concernant les modifications de l’article 357 CIR 92

L' Administration générale de la Fiscalité a publié ce 18/11/2019 la circulaire 2019/C/122. Cette circulaire commente les modifications apportées à l’article 357 CIR 92 par la loi du 17 mars 2019 adaptant certaines dispositions fiscales fédérales au nouveau Code des sociétés et des associations et par la loi du 2 mai 2019 portant des dispositions fiscales diverses 2019-I.

1. Généralités

1. L’article 72 de la loi du 17 mars 2019 adaptant certaines dispositions fiscales fédérales au nouveau Code des sociétés et des associations (M.B., 10 mai 2019, p. 45450), a apporté les modifications suivantes à l'article 357, CIR 92 (modifié par la loi du 6 juillet 1994, l'arrêté royal du 20 décembre 1996 et la loi du 11 décembre 2008) :

1° le 3° est remplacé par ce qui suit :

"3° selon le cas, la société qui a procédé à une fusion, scission, opération assimilée à une fusion ou autre dissolution sans partage total de l'avoir social, et la société absorbante ou bénéficiaire ou les sociétés bénéficiaires de l'opération ;" ;

2° dans le 4°, les mots "le chef ou le directeur a été primitivement imposé" sont remplacés par les mots "le chef, le directeur, les actionnaires ou les associés ont été primitivement imposés".

2. Par ailleurs, l’article 19 de la loi du 2 mai 2019 portant des dispositions fiscales diverses 2019-I., (M.B., 15 mai 2019, p. 46579) a complété l’article 357, alinéa 1er, CIR 92, par un 5° rédigé comme suit :

"5° le liquidateur de la personne morale dont la liquidation a été clôturée, en cette qualité, ou, à défaut, les personnes considérées comme liquidateurs en vertu de la partie 1re, livre 2, titre 8 du Code des sociétés et des associations, au cours de la période prévue par l'article 2:143, du même Code."

3. Compte tenu de ces diverses modifications, l’article 357, CIR 92 est actuellement libellé comme suit :

« Pour l'application des articles 355 et 356, sont assimilés au même redevable :

1° les héritiers du redevable ;

2° son conjoint ;

3° selon le cas, la société qui a procédé à une fusion, scission, opération assimilée une fusion ou autre dissolution sans partage total de l'avoir social, et la société absorbante ou bénéficiaire ou les sociétés bénéficiaires de l'opération ;

4° les membres de la famille, de la société, de l'association ou de la communauté dont le chef, le directeur, les actionnaires ou les associés ont été primitivement imposés et réciproquement.

5° le liquidateur de la personne morale dont la liquidation a été clôturée, en cette qualité, ou, à défaut, les personnes considérées comme liquidateurs en vertu de la partie 1re, livre 2, titre 8 du Code des sociétés et des associations, au cours de la période prévue par l'article 2:143, du même Code.​ ».


2. Commentaire

Article 357, 3°, CIR 92

4. L’article 357, 3°, CIR 92 trouve son origine dans l’article 32 de la loi du 11 décembre 2008, modifiant le Code des impôts sur les revenus 1992 en

vue de le mettre en concordance avec la Directive 90/434/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, scissions partielles, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents ainsi qu'au transfert de siège statutaire d'une société européenne (SE) ou d’une société coopérative européenne (SCE) d'un Etat membre à un autre, modifiée par la Directive 2005/19/CE du Conseil du 17 février 2005 (M.B. 12 janvier 2009).

Cette disposition assimilait au « même redevable » pour l’application des articles 355 et 356, CIR 92, « Selon le cas, les sociétés absorbantes ou les sociétés bénéficiaires ».

Selon les travaux préparatoires de la loi du 11 décembre 2008 précitée, la disposition insérée à l’article 357 CIR 92 « (visait) à résoudre les difficultés survenues, si l’administration souhaite, après une fusion, une scission, ou une opération y assimilée, enrôler l’impôt dû par la société absorbée ou scindée dans le chef de la société absorbante ou des sociétés bénéficiaires », étant donné « qu’une telle dette fiscale ne peut plus être enrôlée dans le chef de la société disparue (…). Le nouvel article 357, 3°, CIR 92, permet d’assimiler selon le cas, la société absorbante ou les sociétés bénéficiaires à la société absorbée ou scindée. » (Doc. Parl., Ch., 52, n° 1398/001, p. 47-48).


5. La modification apportée à l’article 357, 3°, CIR 92 par la loi du 17 mars 2019 a pour objectif d’adapter cette disposition au nouveau critère de la « nationalité » d’une société instauré par le Code des sociétés et des associations (Loi du 23 mars 2019, M.B., 4 avril 2019).

En effet, dans le nouveau Code des sociétés et associations (CSA), une société est soumise au droit des sociétés de l’Etat où est établi son siège statutaire (et non plus son « siège réel »).

Suivant les travaux préparatoires de la loi du 17 mars 2019, « Jusqu’à présent, le CIR 92 se réfère implicitement pour la définition des fusions et autres réorganisations de sociétés à la définition du Code des sociétés belge. L’adoption de la théorie du siège statutaire rend cette référence au droit des sociétés belge inadéquate puisqu’une société résidente, assujettie à l’ISoc., sera désormais susceptible d’être régie par un droit des sociétés étranger, y compris pour la définition et la mise en oeuvre des fusions et autres réorganisations. (…) (Doc. Parl. Ch. 54, n° 3367/001, p.13-14). Dès lors, « il (était) souhaitable que les définitions et les règles de procédure relatives aux fusions, scissions et autres formes de réorganisation ne renvoient plus à la description de ces opérations dans le Code des sociétés belge ou des dispositions de droit étranger analogues – ce qui est d’application malaisée pour le fisc – mais soient remplacées par des définitions autonomes qui correspondent à la terminologie de la directive fiscale européenne sur les fusions 2009/133/CE, telle que le cas échéant adaptée par la législation belge actuelle. (Ibid, p. 5).


Article 357, 4°, CIR 92


6. En ce qui concerne le point 4°, nouveau de l’article 357, CIR 92, les travaux préparatoires de la loi du 17 mars 2019 relèvent « qu’en règle générale, le CIR 92 considère comme contribuables en tant que tels uniquement les organismes qui sont dotés de la personnalité juridique en vertu du droit des personnes morales qui les régit. Dans le cas d’un droit des personnes morales étranger, il n’est pas toujours aisé de déterminer si un organisme a la “personnalité juridique” (Doc. Parl. Ch. 54, n° 3367/001, p. 9), et que dès lors, « Pour tenir compte des incertitudes qui pourront subsister quant à la personnalité juridique ou l’analogie avec une forme juridique dotée de la personnalité juridique en droit belge, l’article 357, 4°, CIR 92 assimile désormais au “même redevable”, pour les réimpositions permises par les articles 355 et 356 du CIR 92, une société et ses actionnaires ou associés et réciproquement. Ainsi, si l’administration a erronément établi l’impôt au nom des actionnaires ou associés alors qu’elle aurait dû le faire au nom de la société, elle sera en droit d’établir la cotisation de remplacement au nom de celle-ci, et vice versa. » (Ibid, p.10).


Article 357, 5°, CIR 92


7. En ce qui concerne l’article 357, 5°, CIR 92, ajouté par l’article 19 de la loi du 2 mai 2019 portant des dispositions fiscales diverses 2019-I., les travaux préparatoires relèvent “qu’avec l’arrêt de la Cour d’appel d’Anvers du 27 juin 2017 (N.B. : cf. Fisconet plus ), il a été (jugé) que les impositions effectuées au nom d’une société liquidée étaient en fait adressées à une société qui n’existait plus et que de telles impositions devaient être effectuées au nom du liquidateur, en sa qualité de liquidateur de la société liquidée. (…) En l’état actuel de la législation, en application de l’article 357, CIR 92, le liquidateur “qualitate qua” ne peut être considéré comme le même contribuable au sens des articles 355 et 356, CIR 92. (…) L’article 357, CIR 92 est (…) modifié afin d’y ajouter le liquidateur “qualitate qua” à la liste des personnes assimilées au contribuable dans le cadre de l’enrôlement d’une cotisation subsidiaire ou de remplacement établie suite à l’annulation d’une cotisation par une décision judiciaire ou administrative. L’enrôlement au nom du liquidateur “qualitate qua” ne crée aucune obligation supplémentaire pour le liquidateur en son nom personnel.” (Doc. Parl. Ch., 54, n° 3699/1, p. 7-8).


8. En vertu de l’article 357, 5°, nouveau, CIR 92, le liquidateur d’une personne morale dont la liquidation a été clôturée est désormais assimilé au « même redevable » au sens des articles 355 et 356, CIR 92°, au cours de la période prévue par l'article 2:143, du Code des sociétés et des associations.

Selon l’article 2 :143 du Code précité (ancien article 198, § 1er, 3ème tiret du Code des sociétés), sont prescrites par cinq ans, « toutes actions contre les liquidateurs en cette qualité ».

Sur la base de cette disposition, il est admis qu’une fois la liquidation d’une société clôturée, le liquidateur a qualité pour répondre, comme défendeur, de toute action qui serait introduite par un créancier de la personne morale endéans les cinq années de la clôture de la liquidation. Il s’agit d’une fiction qui permet aux créanciers, après la clôture, d’agir contre la société comme si, sur le plan procédural, elle était toujours en liquidation (cf. Cass., 22 mars 1962, Pas., 1962, I., 807 ; Cass., 17 avril 2008, Pas., 2008, n° 231, p. 926). Cette théorie, dite de la « survie passive de la société », trouve ainsi une application particulière dans le cadre de l’article 357 CIR 92, lequel permet désormais à l’administration d’enrôler une cotisation nouvelle sur le pied de l’article 355 CIR 92 ou de proposer une cotisation subsidiaire conformément à l’article 356 CIR 92 dans le chef du liquidateur, en cette qualité.


9. Outre le liquidateur, l’article 357, 5° CIR 92 assimile également au redevable pour l’application des articles 355 et 356 CIR 92, « à défaut, les personnes considérées comme liquidateurs en vertu de la partie 1re, livre 2, titre 8 du Code des sociétés et des associations, au cours de la période prévue par l'article 2:143, du même Code.​ ».

Conformément à l’article 2:79 du Code des sociétés et des associations, « A défaut de nomination ou de désignation de liquidateurs, les associés-gérants dans les sociétés en nom collectif ou en commandite, les membres du conseil d'administration ou les membres du conseil de direction dans une société européenne ou une société coopérative européenne ainsi que les administrateurs dans les sociétés à responsabilité limitée, les sociétés coopératives et les sociétés anonymes seront, à l'égard des tiers, considérés comme liquidateurs de plein droit, sans toutefois disposer des pouvoirs que la loi et les statuts accordent en ce qui concerne les opérations de liquidation au liquidateur nommé dans les statuts, par l'assemblée générale ou par le tribunal ».

A défaut de nomination expresse d’un ou plusieurs liquidateurs, les personnes désignées comme liquidateurs en vertu de cette disposition peuvent dès lors être assimilées au « même redevable » au sens des articles 355 et 356 CIR 92.


10. Il est à souligner que pour déterminer si l’article 2:143 du Code des sociétés et des associations s’applique (à savoir la prescription des actions contre le(s) liquidateur(s) dans un délai de cinq ans), l’administration est replacée, du fait de l’annulation de la cotisation, au moment de l’établissement de la cotisation d’origine. C’est donc cette date qui détermine si la cotisation nouvelle ou subsidiaire peut être établie au nom du liquidateur dans les 5 ans conformément à l’article 357, 5° CIR 92.


11. Enfin, on relèvera que l’application des articles 355 et 356 CIR 92 ne s’apparente pas à une action en responsabilité contre le liquidateur. Comme le relèvent les travaux préparatoires (cf. supra, n°7), la cotisation est établie au nom du liquidateur « qualitate qua » et ne crée dès lors aucune obligation supplémentaire pour le liquidateur en son nom personnel. Dans la théorie de « survie passive de la société » évoqué supra, l’action dirigée contre le liquidateur, en cette qualité, est en réalité une action dirigée contre l’organe de la société liquidée et ne peut donc aboutir à une condamnation personnelle à sa charge (Liège 3 mars 2011, R.G. 2010/RG/26, www.juridat.be).


3. Entrée en vigueur

12. Suivant l’article 119, §1er, de la loi du 17 mars 2019, la loi entre en vigueur le 1er mai 2019. Par ailleurs, l’article 72, qui a modifié l’article 357, 3° et 4°, CIR 92 ne tombe sous le coup d’aucune des dispositions dérogatoires relatives à l’entrée en vigueur prévues par l’article 119 de la loi.

Quant à l’article 19 de la loi du 2 mai 2019, ayant ajouté le 5° à l’article 357 CIR 92, le législateur n’a prévu aucune disposition dérogatoire. Cette disposition est donc entrée en vigueur dix jours après la publication au moniteur belge, conformément à l’article 4 de la loi du 31 mai 1961, soit à partir du 25 mai 2019.

Il en résulte que lorsqu’une imposition a été annulée avant l’entrée en vigueur de l’une des lois précitées, mais que le délai prévu à l’article 355 ou 356 CIR 92, n’est pas encore écoulé à ce moment, la cotisation de remplacement ou subsidiaire pourra être établie, le cas échéant, dans le chef des « mêmes redevables » au sens de l’article 357, 3°, 4° et 5° nouveau CIR 92.


Source : Fisconetplus

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