La STAK (« stichting administratiekantoor ») est un véhicule néerlandais de certification des titres d’une société familiale utilisé depuis longtemps par les résidents belges désireux de centraliser le contrôle et d’assurer la pérennité de leur société familiale à travers les générations.
La certification permet de dissocier la détention juridique de la détention économique des actions familiales. Classiquement, le schéma rencontré est le suivant : l’actionnaire transfère les actions de la société familiale à la STAK, qui exerce alors les droits de vote. En échange, la STAK émet des certificats et s’engage à reverser au titulaire des certificats les revenus produits par les actions certifiées. Enfin, le titulaire des certificats en fait donation à ses enfants.
La STAK est dotée de la personnalité juridique mais n’est pas soumise à l’impôt sur les revenus aux Pays-Bas (à défaut d’exercice d’une activité économique).
En Belgique, la loi du 15 juillet 1998 a instauré un régime de transparence fiscale pour la certification de titres, à condition que l’émetteur de certificat rétrocède immédiatement au titulaire des certificats tous les produits et revenus des titres certifiés. Dans ce cas, il est prévu que « pour l’application du Code des impôts sur les revenus 1992, le titulaire de certificats, et non l’émetteur de ces certificats, est considéré à tous égards comme actionnaire ou associé et bénéficiaire direct des dividendes et autres distributions ou attributions et les certificats sont assimilés aux titres auxquels ils se rapportent » (art. 13 de la loi du 15 juillet 1998).
Depuis 2018, l’entrée de la STAK dans le champ d’application de la taxe caïman fait débat. Cette question est importante non seulement pour l’obligation de déclaration dans le chef des détenteurs de certificats (« fondateurs »), mais aussi sur le plan de la taxation et des délais d’investigation et d’enrôlement de l’impôt.
Pour rappel, l’arrêté royal du 21 novembre 2018 avait élargi la liste des entités de l’Espace Economique Européen qui sont considérées comme des « constructions juridiques » tombant dans le champ d’application de la taxe caïman. Sont notamment des « constructions juridiques » les entités établies dans l’Espace Economique Européen qui sont dotées de la personnalité juridique et qui sont soumises, dans leur Etat de résidence, à aucun impôt ou à un impôt inférieur à 1% du revenu imposable déterminé conformément aux règles applicables pour établir l’impôt belge sur les revenus.
C’est a priori le cas de la STAK néerlandaise puisqu’elle est exonérée d’impôt sur les revenus aux Pays-Bas.
Dans le cadre de la dernière réforme de la taxe caïman, la loi-programme du 22 décembre 2023 entrée en vigueur le 1erjanvier 2024, prévoit notamment "un élargissement des obligations déclaratives concernant les « constructions juridiques ».
Lors de la discussion du projet de loi à la Chambre, le ministre des Finances a confirmé qu’une STAK néerlandaise devait être considérée comme une « construction juridique ».
La position du Ministre des Finances est controversée et n’est pas partagée par l’ensemble de la doctrine. D’aucuns considèrent que la loi sur la certification (si les conditions de l’article 13 de cette loi sont remplies), fait obstacle à l’obligation de déclarer la STAK comme « construction juridique ».
L’exposé des motifs de la loi-programme précise que les revenus obtenus par la STAK ne relèvent pas du champ d’application de la taxe Caïman lorsque les conditions de redistribution des revenus prévues par l’article 13 de la loi de 1998 sur la certification sont remplies. Il faut donc, lors de l’application de la transparence fiscale prévue par la taxe caïman, tenir compte de la primauté de la loi de 1998.
Cela implique, à notre sens, que les distributions effectuées par la STAK, peu importe qu’elles concernent de revenus qui étaient imposables ou exonérés par transparence, ne sont pas imposables au titre de dividende lorsque la STAK reverse les revenus des titres certifiés immédiatement aux détenteurs de certificats conformément à ce que prévoit la loi de 1998 (si la transparence fiscale de la STAK est préservée, la primauté de la loi de 1998 exclut la taxation des distributions effectuées par la STAK).
L’incohérence des autorités fiscales sur cette question est flagrante. Le Service des décisions anticipées ne s’est d’ailleurs jamais prononcé explicitement sur la qualification ou non de la STAKcomme « construction juridique » ou sur l’application de la taxe caïman.
Concrètement, il convient de faire une distinction entre les STAKqui détiennent exclusivement des titres certifiés d’une société belge, d’une part, et celles qui détiennent d’autres actifs (par exemple, un portefeuille de titres, une collection d’art, etc.) d’autre part.
Les premières, qui sont soumises à une forme d’imposition transparente basée sur la législation de 1998, ne sont pas concernées par le volet « taxation » de la taxe C caïman. Il est toutefois conseillé au « fondateur » résident belge, de déclarer annuellement l’existence de la STAK dans sa déclaration à l’impôt des personnes physiques sous peine d’une amende de 6.250 € par année d’imposition.
Une série d’informations concernant les revenus et le patrimoine de la STAK devront figurer dans une annexe à la déclaration fiscale (annexe 276CJC). Rappelons par ailleurs que les déclarations fiscales faisant mention de l’existence de « constructions juridiques » au sens de la loi Caïman sont cataloguées de « complexes » et ouvrent le droit à l’administration fiscale d’appliquer les délais d’investigation et d’imposition de dix ans.Les secondes, qui ne respectent pas les conditions de la loi sur la certification de 1998, sont non seulement considérées comme des « constructions juridiques » mais en outre, l’application de la loi-programme de décembre 2023 modifie le principe de neutralité des distributions réalisées en faveur des détenteurs résidents belges de certificats. La loi-programme a en effet durci le régime d’exonération des revenus distribués par une « construction juridique » (combinaison des articles 18 et 21 CIR).