Il n’est un secret pour personne que, malgré les nombreuses déclarations de bonnes intentions de nos gouvernants, la charge administrative supportée par les petites et moyennes entreprises (« PME’s ») est toujours plus importante, a fortiori lorsque ces PME’s tentent d’exercer une activité internationale au sein de l’Union Européenne.
Il n’en reste pas moins que, si aucune initiative d’envergure suffisante n’a vu le jour, certains dirigeants pointent la problématique et semblent appeler à un réel effort.
Ainsi, Carles Puigdemont, ayant mis de côté l’indépendance catalane, a interpellé la Commission européenne en pointant du doigt « les restrictions qui rendent l’accès au marché des autres États membres extrêmement difficile ».
Sont notamment pointées du doigt (nous citons) :
Sur cette base, C. Puigdemont pose les questions suivantes :
La réponse apportée par la Commission européenne fut, en substance, la suivante :
Cette réponse est insatisfaisante à de nombreux égards.
Premièrement, si la réduction de la charge administrative est une priorité absolue, force est de constater que le coche est loupé : les obligations déclaratives sont toujours plus nombreuses pour les assujettis, de même que les obligations en termes de formalisme (notification préalable, déclarations, formulaires, en tout genre, nécessité de justifier très précisément de pourcentages particuliers relatifs au droit à déduction, obligations de tenir une caisse enregistreuse pour certains, délai de conservation des documents porté à dix ans…).
Ensuite, l’adoption du régime OSS Union démontre certes la volonté de nos dirigeants d’adapter les règles en matière de TVA aux activités de commerce électronique transfrontière. La pratique démontre pourtant que le régime est extrêmement compliqué à mettre en œuvre, tant pour les assujettis que les administrations fiscales, avec des conséquences financières lourdes pour les assujettis concernés.
De même, l’application du régime de la franchise de la TVA contient elle aussi ses différents écueils, avec la nécessité de respecter un double seuil (25.000 EUR en Belgique, 100.000 EUR dans l’Union Européenne) et… d’opérer une notification préalable, cette notification étant une condition de fond d’application du nouveau régime de la franchise de la TVA qui entrera en vigueur le 1er janvier 2025.
Troisièmement, l’adoption du projet ViDA n’a pu être concrétisée en raison du véto de l’Estonie… précisément pour protéger ses PME’s. L’un des arguments avancés était notamment la disproportion de la charge administrative et des coûts que celle-ci entraine pour les PME’s.
Enfin, le système d’imposition au siège lorsqu’une PME exerce des activités par le biais d’un établissement stable pose son lot de questions, à moins que ne soient établies des règles extrêmement précises et dont l’interprétation est limitée. En effet, l’établissement stable en matière de TVA est un concept gangréné d’insécurité juridique : si les conditions d’existence d’un établissement stable sont définies par le Règlement d’exécution de la directive TVA n°282/2011, il n’en reste pas moins que les États membres ont des intérêts concurrents en la matière (qui percevra la TVA ? et les amendes et intérêts de retard ?) et redoublent de créativité afin de tenter de justifier de l’existence d’établissements stables TVA avec un objectif purement budgétaire : générer plus de recettes fiscales.
Les États membres eux-mêmes vont jusqu’à adopter des positions manifestement illégales, en invoquant des conditions n’existant pas dans la législation, afin de justifier l’existence d’un établissement stable TVA (voyez nos articles sur l’affaire Cabot Plastics Belgium et Adient SA). Il convient également de noter que notre Ministre a annoncé une vague de contrôles fiscaux relative aux établissements stables TVA, afin de vérifier « si les entreprises ne mettent pas en place des montages purement artificiels visant fragmenter les activités entre plusieurs entités même juridiquement indépendantes ».
Si cette position semble juridiquement logique du point de vue des impôts directs, il en va différemment en matière de TVA, a fortiori lorsque la localisation des prestations de services se fait non pas en fonction de montages dits « artificiels », mais bien en application des règles de localisation prévues par la directive TVA. Nous avons déjà pointé du doigt la nécessité pour l’administration de revoir sa copie en la matière.
En conclusion, les déclarations de bonnes intentions sont nombreuses, mais la réalité du terrain est toute autre.
En l’absence d’une réelle initiative cohérente de la part de nos dirigeants, il appartient aux assujettis d’être aussi prudents que possible.
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Cabinet d’avocats Aurélie Soldai – Avocats au Barreau du Brabant Wallon – Experts en TVA