Rapatrier un capital placé à l’étranger peut s’avérer un véritable «casse-tête», en ce compris pour les contribuables qui ont introduit une régularisation fiscale. Un durcissement des règles en la matière s’est opéré depuis quelques années.
Dans le cadre de leurs obligations anti-blanchiment, les institutions financières belges subordonnent l’acceptation de capitaux étrangers à un justificatif de leur origine licite (à savoir, qu’ils ne soient pas entachés de fraude, même prescrite). Le fait que les capitaux aient fait l’objet d’une ancienne régularisation fiscale (e.a. DLUbis) ne suffit pas toujours. En outre, si le client a hérité ou a reçu des capitaux de ses parents, il peut être amené à devoir justifier la légalité des fonds dans le chef de ses parents.
Cette preuve s’avère souvent difficile (voir impossible) à apporter.
Il n’est ainsi pas rare que l’institution financière belge approchée, soucieuse d’éviter d’être poursuivie pour complicité de blanchiment, suggère au client de réaliser une régularisation fiscale (DLUquater). Cette procédure offre une amnistie tant sur le plan civil que sur le plan fiscal. Cette immunité sécurisera la banque et la rendra plus propice à accueillir les capitaux étrangers.
Le recours à la DLUquater présente toutefois un coût susceptible d’être significatif. En outre, certaines banques utilisent cette procédure comme solution de facilité, alors qu’elle ne se justifie pas systématiquement. Il ne nous paraît ainsi pas conforme à la loi sur la DLUquater ni au droit fiscal en général de payer un impôt indu à la seule fin de permettre un rapatriement de capitaux. Des alternatives légales plus appropriées existent dans certains cas.
Il n’est actuellement plus possible de régulariser les droits de succession éludés via une procédure de DLU quater (depuis le 1er janvier 2021).
En cas de succession non-prescrite (environ 10 ans), les droits éludés peuvent encore être régularisés via une déclaration de succession complémentaire (particularités propres à chaque Région, e.a. concernant les intérêts de retard).
En cas de succession prescrite, la situation est plus complexe. Certains Receveurs semblent ne plus accepter les dossiers, vu la fin de la DLU quater concernant les droits de succession. Pour les cas où une déclaration complémentaire serait encore acceptée, cette solution serait coûteuse au regard des amendes (jusqu’à 200%) et des intérêts de retard (7% l’an) qui courent depuis de très nombreuses années.
Il ressort de notre pratique qu’une solution visant à permettre, dans certains cas, une régularisation des droits de succession prescrits serait actuellement en cours d’élaboration au sein de l’administration fiscale. Elle pourrait donner lieu prochainement à une instruction interne. Wait and see.
Le gouvernement a annoncé la fin de la procédure de DLUquater pour le 31 décembre 2023. La question du rapatriement risque alors de se compliquer davantage encore…
Plusieurs pistes sont envisageables. Parmi celles-ci: rappeler à l’institution financière belge qu’il lui est permis, dans certains cas et moyennant certaines conditions, d’accepter des capitaux étrangers issus d’une fraude fiscale simple (et non grave) sans risque de poursuite pénale. Une autre piste serait une prolongation par le gouvernement de la procédure de DLUquater. Pour rappel, la loi du 2 juillet 2016 instaurant la DLUquater prévoyait que cette procédure de régularisation fiscale serait permanente…
Au final, en tant que sociétés privées, les institutions financières belges sont libres d’entrer ou non en relation avec une personne. Elles n’ont ainsi pas d’obligation d’accepter des fonds.
Il est ainsi recommandé de leur présenter un dossier correctement documenté sur l'origine des capitaux et en justifier la régularité avec l'aide d'un spécialiste avant d’initier le rapatriement! Si une DLUquater s’avère indispensable, il est prudent d’introduire celle-ci tant qu’il en est encore possible.
Source : DEKEYSER & ASSOCIES, Avocats, juin 2022