Le système de dispense de versement du précompte professionnel pour les chercheurs fait l'objet d'un projet de réforme qui n'est pas lié à la réforme fiscale. Toutefois, il a été intégré dans cette dernière.
A plusieurs reprises, le ministre des finances a confirmé que le projet de réforme fiscale déposé sur la table du gouvernement ne visait pas à réduire le coût budgétaire de la dispense de versement du précompte professionnel pour les chercheurs. Le seul objectif serait d'assurer une plus grande sécurité juridique.
De fait, le tableau budgétaire joint au projet de réforme ne laisse apparaître qu'un montant de 24,5 millions EUR comme rendement d'une modification apportée au régime applicable aux universités et hautes écoles.
Pourtant, à mieux y regarder, force est de constater que cet exercice non budgétaire n'est pas aussi neutre budgétairement qu'on voudrait nous le laisser le croire:
- la base de calcul est modifiée, puisque le précompte professionnel calculé sur le double pécule de vacances, sur le treizième mois et sur les arriérés de rémunérations n'entre plus en considération pour la dispense. Ceci aboutit de facto à une diminution d'environ 15% du coût actuel de la dispense. Sachant que cette dispense représentait un coût de 1,3 milliard en 2021, la mesure proposée aboutirait à une réduction du coût de 200 millions EUR;
- Le champ d'application de la mesure serait réduit pour les institutions de recherche agréées et elles ne pourraient plus l'appliquer pour leurs bacheliers. L'impact de ces mesures peut être évalué à environ 50% du coût actuel de la mesure pour ces institutions. Soit une économie d'environ 100 millions EUR;
- diverses autres adaptations auront également un impact budgétaire qui n'a pas été pris en compte dans la note budgétaire de la réforme.
Ainsi, si l'on tient compte des estimations calculées ci-avant, on en arrive à la conclusion que la réforme non budgétaire proposée pourrait in fine ... rapporter plus de 300 millions au trésor!
Pas mal pour une réforme budgétairement neutre ...
Et on n'oserait pas imaginer ce qu'aurait donné une réforme visant expressément à obtenir un rendement budgétaire ...
Il serait temps que le gouvernement fasse la clarté sur ce qui est réellement sur la table, sur les impacts budgétaires réels et sur l'impact que les mesures proposées auront sur l'activité, sur
l'emploi et sur la R&D.
A ce triste constat, il faut encore ajouter l'alourdissement exorbitant des charges administratives qui est prévu et qui en découragera plus d'un d'encore appliquer cette mesure (pour autant qu'ils n'aient pas déjà été dégoutés par les contrôles lancés depuis 2018 ...).
Ce qui est certain, c'est que s'attaquer à la R&D et à l'innovation pour booster le pouvoir d'achat à court terme n'est pas une vision d'avenir pour la Belgique. Les cigales ont pris le pouvoir, vont-elles manger toutes les semailles de notre avenir ?
Source : Linkedlin, mars 2023, Jean Baeten