Ce 8 mars 2023, la Cour d’Appel de Liège a jugé que l’objectif de la loi du 16.07.2008 est de protéger les artistes soumis à une dépendance et à une demande à la fois complexe et instable que ne connaissent pas les autres professions, ce qui justifiait de les protéger par une taxation forfaitaire, leurs revenus étant totalement aléatoires parce que dépendants de l’exploitation des droits faits par des tiers et du succès médiatique.
Le régime fiscal droits d’auteur ne concernait, selon la Cour, que les professionnels intermittents soumis aux aléas du succès dont les revenus sont par nature variables et modestes engrangés après de longues périodes non rémunérées.
« Le législateur justifie ainsi le régime de faveur octroyé qui se veut une compensation aux inconvénients mentionnés ci-avant inhérents à l’activité des artistes » - Dixit la Cour.
EIle considère dès lors que l’usage de ce régime pour d’autres professions, telles que les architectes, va à l’encontre des objectifs du législateur et est donc abusive. Séisme en vue!
En effet, cette décision va bien au-delà de la simple profession des architectes, mais remet en cause dans sa logique tout le système pour plus de 90 % des personnes qui en ont bénéficié depuis des dizaines d’années (graphistes, IT, architectes, salariés de tout bord …).
En effet, depuis 15 ans, l’administration fiscale admet, dans le cadre notamment de ses décisions anticipées, l’octroi de ce régime à de très nombreuses professions qui, si l’on suit la thèse de la Cour d’Appel de Liège, n’y avaient pas droit.
Si l’Administration utilise cette arme et que la Cour de Cassation le valide, cela risque de mettre en péril l’activité économique de bon nombre de contribuables.
Faut-il encore savoir si ce qu’est un objectif contraire aux intentions du législateur ? Ne fallait-il pas que le législateur ait bien précisé le caractère exclusif de la profession auquel il destinait le régime spécifique des droits d’auteur et l’exclusion clairement de toute autre profession.
N’était-ce pas le constat de la Cour Constitutionnelle dans un arrêt qui exigeait que les objectifs soient clairement définis ?
D’autant que les travaux parlementaires de la loi de 2012 sur l’abus fiscal rappelaient le principe de la voie la moins imposée.
Peut-on dès lors considérer que tout ce qui n’est pas envisagé par le législateur est considéré comme dorénavant exclu et contraire à ses objectifs.
N’est-ce pas là une interprétation extensive de l’abus fiscal ?Pour notre part, nous le pensons.
Comment encore faire confiance à un etat aussi versatile ? Où est la sécurité juridique ? Où est la confiance légitime que l’on peut attendre d’un Etat de droit?