Focus sur les principales nouveautés fiscales, au niveau des normes réglementaires et autres circulaires et décisions administratives de l’année 2024 (en particulier durant les mois d’octobre et novembre).
L’article 206/3 CIR prévoit notamment une base taxable minimum correspondant e.a. aux revenus qui découlerait d’une rectification fiscale ou d’une imposition d’office avec accroissement d’impôt de 10%.
Prenons le cas d’une société immobilière qui donne ses immeubles en location et perçoit un loyer en contrepartie. En raison des amortissements de ses immeubles, qui sont supérieurs aux loyers, elle clôture l’exercice en perte et ne devrait ainsi pas payer d’impôt. Elle dépose toutefois sa déclaration fiscale avec quelques jours de retard. Le fisc a recours à la procédure d’imposition d’office (à tort selon nous). Elle établi la base taxable exclusivement sur le montant des loyers déclarés par le contribuable et lui inflige un accroissement d’impôt de 10% (toujours à tort, vu l’absence totale de mauvaise foi).
Dans un arrêt du 21 novembre 2024, la Cour constitutionnelle a rendu un arrêt refusant d’invalider l’article 206/3 CIR. Cette décision nous parait critiquable sur le plan des principes.
La Cour a toutefois rappelé un principe élémentaire : « Dès lors que, d’une part, la déduction ou la compensation des pertes n’est refusée que lorsque l’accroissement d’impôt est effectivement appliqué, ce qui n’est en principe pas le cas lorsqu’il s’agit d’une première infraction sans intention de fraude (…) ».
La Cour a ainsi rappelé qu’aucun accroissement d’impôt ne devrait normalement être infligé en cas de première infraction commise de bonne foi. Ce qui est le cas dans l’exemple donné ci-dessus (il n’y a aucune infraction commise de mauvaise foi, l’impôt étant enrôlé exclusivement sur base des revenus déclarés par le contribuable).
Dans la foulée, le Ministre des Finance a confirmé par voie de presse que des accroissements d’impôt ne seront plus applicable en cas de première infraction commise de bonne foi.
Cette déclaration n’est que la confirmation de ce que le texte de l’article 444 du CIR prévoit. Elle confirme toutefois que l’attitude de l’administration, qui appliquait (quasi) systématiquement des accroissements d’impôt en cas d’infraction (même commise de bonne foi), est illégale.
Selon nous, cette position doit déjà s’appliquer aux litiges en cours. Elle devrait ainsi conduire à l’annulation de nombreuses cotisations enrôlées à tort.
Le décret de réforme de la fiscalité des droits d’enregistrement et de succession vient d’être adopté, ce 4 décembre, par le Parlement wallon. Next step : La publication officielle au Moniteur Belge.
À l’analyse de la version votée, plusieurs surprises de dernière minute apparaissent. Parmi celles-ci : la faculté pour les héritiers d’un résident belge de solliciter l’imputation, dès ce 1er janvier 2025, de l’impôt de succession étranger dû tant sur les biens meubles que sur les biens immeubles (les droits de succession belges seront ainsi réduits à concurrence des droits de succession étrangers).
Rétroacte : La Cour constitutionnelle a reconnu, le 3 juin 2021, que la distinction entre les biens meubles et immeubles dans le cadre de l’imputation de droits de succession étrangers était contraire au principe constitutionnel d’égalité.
Pour rencontrer cette condamnation, la Région bruxelloise a adapté, via une ordonnance du 6 juillet 2022, son article 17 du Code des droits de succession. Elle autorise ainsi, depuis le 1er août 2022, l’imputation des droits de succession étrangers dus tant sur les biens meubles que sur les biens immeubles étrangers. Toutefois, cette imputation est limitée exclusivement à l’impôt successoral dû dans l’Etat de situation des biens étrangers.
La Région flamande lui a emboîté le pas. Elle a modifié, par un décret du 9 décembre 2022, son article 2.7.5.0.4. du VCF (ancien article 17 du Code des droits de succession). Elle autorise également l’imputation des droits de succession étrangers dus sur tous les biens sis à l’étranger et ce, quel que soit l’Etat où cet impôt est prélevé. Contrairement à la Région bruxelloise, la Flandre ne limite pas cette imputation à l’impôt successoral dû dans l’Etat de situation des biens étrangers.
La Région wallonne vient de s’aligner sur les autres Régions. Elle autorisera, à partir du 1er janvier 2025, l’imputation des droits de succession étrangers dus sur tous les biens (meubles ou immeubles). Toutefois, cette imputation sera limitée à l’impôt successoral dû dans l’Etat de situation des biens étrangers et ce, à l’instar de la Région bruxelloise.
Le fisc ne publie plus la liste des contrôle fiscaux annoncés et ce, depuis plusieurs années.
La pratique permet toutefois de recenser les « cibles privilégiées » du fisc en cette fin d’année 2024. Celles-ci ont été recensées e.a. dans le journal l’Echo en date du 7 décembre 2024. Il s’agit notamment :
La CNC a publié un projet d’avis concernant la réalisation du test de liquidité.
La commission se penche en particulier sur les conséquences d’une situation où l’assemblée générale prend une décision de distribuer un dividende alors que cette distribution n’est pas confirmée par l’organe d’administration (test de liquidité négatif).
Selon la CNC :
« En outre, il est possible que la décision de distribution de l'assemblée générale ne soit pas confirmée par l’organe d’administration en raison d'un test de liquidité négatif. La Commission estime qu'un test de liquidité négatif n’affecte en rien la validité juridique de la décision de distribution de l’assemblée générale78. En principe, la mise en œuvre effective de la décision de distribution de l'assemblée générale sera alors seulement reportée jusqu’à ce que le résultat du test de liquidité se révèle positif. Si aucun test de liquidité positif n'est réalisé au plus tard à la date de la prochaine assemblée générale devant statuer sur les comptes annuels de l'exercice suivant, la Commission propose que, à la suite de cette prochaine assemblée générale devant statuer sur une nouvelle distribution, la distribution décidée par l'assemblée générale précédente soit annulée et que, par conséquent, la dette comptabilisée antérieurement soit retransférée vers nouveau résultat à affecter :
471 Dividendes de l’exercice à 694 Rémunération de l’apport
Si, lors de la prochaine assemblée générale, il est décidé que le résultat de l’exercice précédent soit de nouveau distribué, ensemble avec le résultat du nouvel exercice, cela se traduira par les écritures comptables suivantes :
694 Rémunération de l’apport à 471 Dividendes de l'exercice
La Commission tient à préciser que la méthode développée ci-dessus doit encore faire l'objet d'une concertation avec l’administration fiscale afin de s'assurer qu'il n’y ait aucune double taxation ».
Le projet d’avis rappelle notamment les conséquences en cas de non respect des test :
« L'importance du test de liquidité est soulignée par la responsabilité particulière qui incombe aux membres de l’organe d’administration : les membres de l'organe d'administration des sociétés sans capital qui savaient ou, au vu des circonstances, auraient dû savoir, qu'à la suite de la distribution, la société ne serait manifestement plus en mesure de s'acquitter de ses dettes dans un délai d'au moins douze mois (comme déterminé dans le test de liquidité), ils sont solidairement responsables envers la société et les tiers de tous les dommages qui en résultent.
En vue d'assurer la protection des créanciers, les distributions réalisées à tort, au mépris des règles du test de l’actif net ou de liquidité, pourront être réclamées aux actionnaires, ou à toutes les autres personnes en faveur desquelles la distribution a été décidée, par les sociétés sans capital, qu'ils soient de bonne ou mauvaise foi. Ceci offre une protection supplémentaire aux créanciers »
S’agissant d’un projet d’avis, il est possible à tout intéressé de faire valoir ses observations quant audit projet et ce, jusqu’au 7 janvier 2025 au plus tard.
Ce 6 décembre 2024, le Conseil des ministres a approuvé un projet d'arrêté royal dans le cadre de la réforme de la déduction pour investissement.
Le conseil a établi une liste des points suivants :
Le projet d’AR décrit également les investissements numériques éligibles à la déduction de base majorée.
Le projet a été transmis pour avis au Conseil d’Etat.
Certaines circulaires ont été publiées depuis notre dernière contribution (voir ici). Il s’agit des circulaires suivantes :
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