Bail d'habitation en Région bruxelloise : voici les nouveautés 2024 en matière d’enregistrement !

Une ordonnance bruxelloise du 25 avril 2024, en vigueur le 1er janvier 2025, prévoit que les propriétaires bailleurs bruxellois devront bientôt enregistrer leur bail d’habitation dans un registre électronique géré par le Service régional de l’enregistrement des baux (Bruxelles Logement), et non plus dans un registre de l’Administration générale de la Documentation patrimoniale (sur la plateforme du SPF Finances MyRent).

Ladite ordonnance a pour effet d’abroger les règles d’enregistrement des baux d’habitation prévues dans le Code fédéral des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe (ci-après, « C. Enreg. »). À ce titre, elle modifie donc les articles 19,3° et 32,5° du Code Enreg. qui assure l’obligation d’enregistrement et le délai dans lequel l’enregistrement doit avoir lieu.

En d’autres termes, cette nouvelle législation a pour effet de supprimer, pour les bailleurs bruxellois, l’obligation fédérale d’enregistrement.

Sont visés par cette nouvelle ordonnance les baux qui concernent les biens immobiliers destinés à l’habitation. Les autres baux resteront quant à eux réglés par les dispositions fédérales.

Lors de la conclusion d’un contrat de bail portant sur une habitation, le propriétaire-bailleur est légalement tenu d’enregistrer ce bail dans un délai de deux mois suivant la signature du contrat. Rien n’empêche toutefois le locataire d’en prendre l’initiative.

Cette formalité d’enregistrement est gratuite et son but est de conférer « date certaine », c’est-à-dire que personne ne pourra contester l’existence et la date du bail ayant été enregistré.

Selon les travaux préparatoires de cette nouvelle ordonnance, la mise en œuvre d’un système régional d’enregistrement des baux d’habitation a pour but de lutter contre les loyers abusifs en collectant efficacement les données des baux enregistrés mais également d’améliorer « la lutte contre les logements inoccupés, ainsi que la protection des locataires d’un logement insalubre ». L’idée étant d’avoir une image fidèle du marché locatif.

Concrètement, le bailleur (ou le preneur si le bailleur est défaillant) devra déposer électroniquement le bail, ses annexes ainsi que l’état des lieux d’entrée. Préalablement au dépôt électronique, le bailleur devra insérer les éléments essentiels du bail et ce, dans le but de soustraire les informations nécessaires aux objectifs poursuivis. Il sera également possible de procéder à l’enregistrement du bail par voie postale ou, sur rendez-vous, au guichet de l’administration fiscale. Un accusé de réception est alors simultanément envoyé tant au bailleur qu’au preneur.

L’on se souviendra que le projet d’ordonnance avait fait l’objet de dissensions entre la Région bruxelloise et le Fédéral. En effet, au regard de la répartition des compétences, la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles attribue aux régions la compétence de fixer des règles spécifiques relatives aux contrats de bail qui pourront compléter ou s’écarter du droit commun déterminé au niveau fédéral.

Autrement dit, les régions sont compétentes pour fixer les aspects civils de l’enregistrement du contrat de bail. De ce fait, le Conseil d’État a considéré que les droits d’enregistrement auxquels donne lieu l’enregistrement du contrat de bail ne sont pas des impôts régionaux et relève donc de la compétence de l’État fédéral.

Le Gouvernement bruxellois estime quant à lui que le législateur fédéral a renoncé à sa compétence fiscale en matière d’enregistrement des baux d’habitation puisque cette formalité ne donne plus lieu à la perception d’un impôt, comme c’était le cas dans le passé. En effet, il résulte de l’article 161, 12 °, b) du C. Enreg. qu’un taux zéro est appliqué à l’enregistrement des baux d’habitation. Or, cela n’affecte en rien la nature de l’obligation fiscale qui découle de cette disposition.

Bien que l’objet de l’ordonnance soit d’organiser une centralisation des données relatives aux biens mis en location dans le cadre de baux d’habitation, il n’en reste pas moins qu’une telle mise en œuvre implique le traitement de données à caractère personnel. C’est pourquoi, l’instauration de ce régime nécessite le respect des principes de nécessité et de proportionnalité. La nécessité de l’atteinte au droit au respect de la vie privée est établie compte tenu des objectifs poursuivis dont notamment, permettre aux agents-inspecteur du Service régional des logements inoccupés d’exercer leurs missions, permettre aux agents du Service d’inspection régionale de lutter contre le mal-logement et la discrimination, etc.

En conclusion, il convient de se rallier à la position du Conseil d’Etat qui rappelle, à juste titre, que le législateur bruxellois n’est pas compétent pour supprimer l’obligation fédérale d’enregistrement.

La version actuelle de l’ordonnance constitue, selon nous, un excès de compétence de la Région bruxelloise, et comme l’a déjà annoncé le ministre fédéral des finances Vincent Van Peteghem, un recours en annulation sera certainement introduit devant la Cour constitutionnelle.

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