Le compte courant TVA est mort, vive le compte provision TVA…

Ce compte courant est remplacé par le compte provision par une loi du 12 mars 2023 qui entre en vigueur le 1er janvier 2025.

Zoom sur les quelques modifications techniques notables.

Paul est assujetti à la TVA et se comporte, à ce titre, en collecteur d'impôt pour le Trésor : il reverse la TVA qu'il a collectée lors de ses ventes ou prestations de services réalisées via un système de déclaration dans lequel il déclare à la fois la TVA qu'il a ainsi perçue pour le compte du Trésor et la TVA qu'il peut déduire sur ses achats professionnels.

Jusqu'à présent, Paul bénéficiait d'un compte courant avec le service recette de la TVA qui lui permettait de savoir précisément s'il devait payer de la TVA ou s'il pouvait obtenir un remboursement si ses déductions de TVA étaient supérieures à ses rentrées.

Le compte provision et ses modifications

Le compte courant est remplacé par le compte provision par une loi du 12 mars 2023 qui entre en vigueur le 1er janvier 2025 et qui induit quelques modifications techniques notables : les assujettis qui déposent une déclaration trimestrielle bénéficient d'un délai supplémentaire de 5 jours pour remplir leurs obligations. Ils peuvent désormais introduire leur déclaration TVA pour le 25 du mois qui suit la période de déclaration.

Dans ce délai, Paul peut effectuer toutes les rectifications nécessaires via une nouvelle déclaration rectificative s'il a commis une erreur. Il peut également demander un remboursement de la TVA qui résulte de sa déclaration directement dans celle-ci quand il a déduit plus de TVA qu'il n'en a facturée ou choisir de ne pas se faire rembourser cette créance de TVA.

Alors que jusqu'à présent, le surplus de TVA était inscrit dans le compte courant de l'assujetti, désormais, l'Administration générale de la perception et du recouvrement (AGPR) va analyser cette créance avant de la rembourser à la demande de l'assujetti ou de l'inscrire dans son compte provision.

Paul a en effet peut-être une autre dette à l'égard de l'administration fiscale et la loi permet ici à l'AGPR de saisir la créance de Paul pour apurer cette dette fiscale. Le fisc n'est jamais mieux servi que par lui-même.

L'administration souhaitera peut-être aussi vérifier que la créance de Paul est justifiée et lui demandera des renseignements sur la réalité des opérations TVA effectuées. Tant que l'administration n'a pas tous ses apaisements, la créance de Paul ne sera pas remboursée ni même inscrite sur le compte provision ; elle sera retenue le temps nécessaire à un petit contrôle de routine.

Une nouveauté encore, si l'administration envoie une demande de renseignement à Paul, la loi prévoit désormais qu'il dispose d'un délai d'un mois pour y répondre, ce qui n'était pas le cas auparavant. Le délai sera réduit à 10 jours si les droits du Trésor sont en péril, jolie formule qui évoque l'hypothèse où l'administration a de sérieux motifs de croire que Paul ne sera pas capable d'honorer sa dette éventuelle.

Et si Paul ne rentre pas sa déclaration dans le délai?

Là, aussi, c'est plus simple pour l'administration qui pourra recourir à la procédure automatisée de la déclaration de substitution.

Cette déclaration de substitution correspond à une proposition de déclaration qui n'est pas encore définitive. Dans un premier temps, elle est notifiée à Paul qui aura intérêt à réagir dans le mois parce que la déclaration de substitution reprend le montant de la taxe le plus élevé repris dans les déclarations TVA des 12 derniers mois avec un montant minimum de 2 100 € de TVA due.

Pour réagir, Paul pourra simplement introduire sa déclaration TVA normale, ce qui mettra fin à la procédure de déclaration de substitution.

Et si Paul est récalcitrant? La déclaration automatique de substitution devient définitive et Paul se retrouvera devant une alternative simple : soit il introduit une procédure administrative de réclamation fiscale telle qu'elle existe déjà en matière d'impôts sur les revenus, soit il choisit de saisir directement la justice via une requête judiciaire.

L'administration pourra aussi préférer la procédure non automatisée de taxation d'office à celle de la déclaration de substitution. La procédure sera plus lourde pour l'administration qui devra informer le redevable des faits qui justifient l'imposition, le montant présumé des opérations visées et le montant des amendes encourues. On peut, par conséquent, penser que l'administration recourra massivement à la procédure automatisée, plus facile et plus rapide, si le grief est simplement une absence de dépôt de déclaration TVA.

Selon le législateur, l'objectif de cette révision est de moderniser le traitement des déclarations périodiques à la TVA mais surtout d'appréhender de manière beaucoup plus rapide les conséquences liées à l'absence de dépôt de déclarations TVA par les assujettis qui se chiffrent paraît-il à plus de 4 milliards d'euros en Belgique. La modernisation qui rentre en vigueur ce 1er janvier 2025 vise à réduire le nombre d'interventions manuelles, "sources de trop nombreuses erreurs".

Paul, comme l'ensemble des indépendants ou entreprises assujetties, est un maillon essentiel de la chaîne TVA puisqu'il endosse le rôle de collecteur d'impôt, corvée non rémunérée qui, on peut le dire, ressemble à un impôt en nature…

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