La Commission européenne a présenté ce 20 juillet 2021 un ensemble ambitieux de propositions législatives visant à renforcer les règles de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT). Ce paquet législatif contient également une proposition de création d'une nouvelle autorité de l'UE dans le domaine de la lutte contre le blanchiment de capitaux. Il s'inscrit dans le cadre de l'engagement pris par la Commission de protéger les citoyens de l'UE et le système financier de l'UE contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
Son objectif est de permettre de mieux détecter les transactions et activités suspectes et de combler les failles dont profitent les criminels pour blanchir le produit d'activités illicites ou financer des activités terroristes par l'intermédiaire du système financier. Comme le rappelle la stratégie de l'UE pour l'union de la sécurité pour la période 2020-2025, le renforcement du cadre de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme contribuera également à protéger les Européens contre le terrorisme et la criminalité organisée.
Les mesures proposées aujourd'hui renforcent considérablement le cadre existant de l'UE en tenant compte de l'émergence de nouveaux défis liés à l'innovation technologique. Parmi ces défis figurent les monnaies virtuelles, la plus grande intégration des flux financiers dans le marché unique et le caractère international des organisations terroristes. Ces propositions permettront de créer un cadre beaucoup plus harmonisé afin que les opérateurs soumis aux règles en matière de LBC/FT puissent plus facilement s'y conformer, en particulier lorsqu'ils ont des activités transfrontières.
Le problème complexe des flux d'argent sale n'est pas nouveau. La lutte contre le blanchiment de capitaux et contre le financement du terrorisme est vitale pour garantir la stabilité financière et la sécurité en Europe. Des lacunes législatives dans un État membre ont des répercussions sur l'ensemble de l'UE. C'est pourquoi les règles de l'UE doivent faire l'objet d'une mise en œuvre et d'une surveillance efficaces et cohérentes afin de lutter contre la criminalité et de protéger notre système financier. Il est de la plus haute importance de veiller à l'efficacité et à la cohérence du cadre de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux. Le paquet législatif proposé aujourd'hui met en œuvre les engagements pris dans le plan d'action pour une politique globale de l'Union en matière de prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme qui a été adopté par la Commission le 7 mai 2020.
Le cadre de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux est également constitué du règlement concernant la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation, de la directive visant à lutter contre le blanchiment de capitaux au moyen du droit pénal, de la directive fixant les règles relatives à l'utilisation d'informations financières et d'une autre nature pour combattre les infractions pénales graves, du Parquet européen et du Système européen de surveillance financière.
Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif pour une économie au service des personnes, a déclaré: «Chaque nouveau scandale de blanchiment d'argent est un scandale de trop, et doit nous alarmer sur le fait que les efforts entrepris pour combler les lacunes de notre système financier sont encore insuffisants. Nous avons accompli des progrès considérables ces dernières années et les règles de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux comptent désormais parmi les plus strictes au monde. Mais pour qu'elles soient réellement efficaces, il faut à présent qu'elles soient systématiquement appliquées et fassent l'objet d'une surveillance étroite. C'est pourquoi nous prenons aujourd'hui ces mesures audacieuses pour barrer la route au blanchiment d'argent et empêcher les criminels de profiter de gains mal acquis.»
Mairead McGuinness , commissaire chargée des services financiers, de la stabilité financière et de l'union des marchés des capitaux, a déclaré: «Le blanchiment de capitaux constitue une menace réelle et présente pour les citoyens, les institutions démocratiques et le système financier. L'ampleur du problème ne doit pas être sous-estimée et les failles susceptibles d'être exploitées par les criminels doivent être comblées. Le paquet législatif présenté aujourd'hui renforce considérablement nos efforts visant à mettre fin au blanchiment d'argent sale dans l'ensemble du système financier. Nous améliorons la coordination et la coopération entre les autorités des États membres et créons une nouvelle autorité de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux. Ces mesures nous permettrons de mieux protéger l'intégrité du système financier et le marché unique.»
L'ensemble de mesures présenté aujourd'hui se compose de quatre propositions législatives:
> Une nouvelle autorité de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux
L'élément essentiel du paquet législatif proposé aujourd'hui est la création d'une nouvelle autorité de l'UE, qui transformera la surveillance en matière de LBC/FT dans l'UE et renforcera la coopération entre les cellules de renseignement financier (CRF). Cette nouvelle Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux créée au niveau de l'UE sera l'autorité centrale assurant la coordination entre les autorités nationales pour faire en sorte que les règles de l'UE soient correctement et systématiquement appliquées par le secteur privé. Cette autorité soutiendra également les CRF afin d'améliorer leur capacité d'analyse des flux illicites et de faire du renseignement financier une source essentielle pour les services répressifs.
En particulier, l'Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux sera chargée de:
> Un corpus réglementaire unique de l'UE pour la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme
Le corpus réglementaire unique de l'UE harmonisera les règles en matière de LBC/FT dans l'ensemble de l'UE, y compris, par exemple, les règles plus détaillées relatives aux obligations de vigilance à l'égard de la clientèle, aux bénéficiaires effectifs et aux pouvoirs et tâches des autorités de surveillance et des cellules de renseignement financier (CRF). Les actuels registres nationaux des comptes bancaires seront connectés, ce qui permettra aux CRF d'accéder plus rapidement aux informations clés sur les comptes bancaires et les coffres-forts. La Commission permettra également aux services répressifs d'accéder à ce système, ce qui accélèrera les enquêtes financières et le recouvrement des avoirs d'origine criminelle dans les affaires transfrontières. L'accès aux informations financières sera soumis aux solides garanties prévues par la directive (UE) 2019/1153 relative à l'accès aux informations financières.
> Les règles de l'UE en matière de LBC/FT seront pleinement appliquées au secteur des crypto-actifs
À l'heure actuelle, seules certaines catégories de prestataires de services sur crypto-actifs entrent dans le champ d'application des règles de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. La réforme proposée étendra ces règles à l'ensemble du secteur des crypto-actifs, obligeant tous les prestataires de services à appliquer des mesures de vigilance à l'égard de leurs clients. Les modifications proposées aujourd'hui garantiront une traçabilité complète des transferts de crypto-actifs, tels que les bitcoins, et permettront de prévenir et de détecter leur utilisation éventuelle à des fins de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme. En outre, les portefeuilles anonymes de crypto-actifs seront interdits, afin d'appliquer pleinement au secteur des crypto-actifs les règles de l'UE en matière de LBC/FT.
> Un plafond de 10 000 EUR instauré dans toute l'UE pour les paiements en espèces
Les paiements en espèces de montant élévé sont pour les criminels un moyen facile de blanchir de l'argent, car il est très difficile de détecter ces transactions. C'est pourquoi la Commission a proposé aujourd'hui d'instaurer à l'échelle de l'UE un plafond de 10 000 EUR pour les paiements en espèces. Ce plafond est suffisamment élevé pour ne pas remettre en question le rôle de l'euro en tant que monnaie ayant cours légal et pour prendre en compte l'importance vitale des paiements en espèces. Des plafonds existent déjà dans environ deux tiers des États membres, mais leur montant varie selon les pays. Les plafonds nationaux inférieurs à 10 000 EUR pourront être maintenus. Il est plus difficile aux criminels de blanchir de l'argent sale si le montant des paiements en espèces est plafonné. En outre, de la même manière que les règles de l'UE en matière de LBC/FT interdisent déjà à l'heure actuelle les comptes bancaires anonymes, la fourniture de portefeuilles anonymes de crypto-actifs sera également interdite.
> Pays tiers
Le blanchiment de capitaux est un phénomène mondial qui nécessite une forte coopération internationale. La Commission collabore déjà étroitement avec ses partenaires internationaux pour lutter contre la circulation d'argent sale dans le monde. Le Groupe d'action financière (GAFI), le gendarme mondial dans le domaine du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, formule des recommandations à l'intention des pays. Les pays figurant sur les listes du GAFI seront également inscrits sur celles de l'UE. Il y aura deux listes de l'UE, une «liste noire» et une «liste grise», correspondant aux listes du GAFI. Lorsqu'un pays sera inscrit sur une liste, l'UE appliquera des mesures proportionnées aux risques qu'il pose. L'UE pourra également inscrire sur ses listes des pays qui ne figurent pas sur celles du GAFI, mais qui, d'après une évaluation autonome, représentent une menace pour le système financier de l'UE.
La diversité des outils à la disposition de la Commission et de l'Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux permettra à l'UE de rester en phase avec un environnement international complexe et changeant, dont les risques évoluent rapidement.
Le paquet législatif va maintenant être examiné par le Parlement européen et le Conseil. La Commission compte sur un processus législatif rapide. La future Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux devrait être opérationnelle en 2024 et commencera ses travaux de surveillance directe un peu plus tard, une fois que la directive aura été transposée et que le nouveau cadre réglementaire commencera à s'appliquer.
Source : Commission Européenne, Presscorner, 20 Juillet 2021