PME – divisez par 2 l’imposition des dividendes attribués à vos actionnaires

“La patience est une fleur qui ne pousse pas dans tous les jardins” - John Heywood
Être efficace en fiscalité c’est notamment combiner l’atout de plusieurs dispositions pour réduire la pression fiscale des entrepreneurs.


Parmi celles-ci, il existe un taux de précompte mobilier libératoire réduit (15 %) deux fois moins élevé que le taux applicable par défaut (30 %) lorsqu’une entreprise rémunère ses actionnaires (personnes physiques) par le biais d’un dividende.


Rappelons que les actionnaires personnes morales peuvent bénéficier d’une exonération totale de précompte mobilier, lors d’une remontée de dividendes, dans l’hypothèse où toutes les conditions sont réunies.


I. Dividendes


Un dividende représente la rémunération du capital (apporté par les actionnaires), celle-ci est fonction des résultats et/ou les réserves de la société et n’est pas liée aux services et/ou le temps presté.

La distribution des dividendes est aussi un indicateur de (bonne) performance financière.


Avantages (+) :


  • Revenu mobilier non soumis aux cotisations sociales ;
  • Possible de distribuer plusieurs dividendes sans (plus) attendre l’assemblée générale ordinaire


Inconvénients (-) :


  • Le dividende est fonction du résultat après impôts, en d’autres termes il n’est pas déductible et vient après que la société distributrice ait supporté un impôt (20/25 %) ;
  • Si attribué par une SRL un test (rapport) de liquidité et actif net est requis. (dit “double test”). Ceci afin de conscientiser les dirigeants sur le fait de ne pas rendre exsangue leurs sociétés et/ou compromettre sa trésorerie au seul profit de ses actionnaires.


II. VVPRbisQuésaco?


Le monde entier nous envie cette phrase restée célèbre prononcée par un homme d’état belge : Trop is te veel”, belgicisme qui s’applique pleinement à notre fiscalité nationale.


De manière analogue, “VVPR” est donc l’abréviation de la définition en néerlandais et français Verlaagde Voorheffing - Précompte réduit.


Ce régime a été instauré dans le but de favoriser l’investissement en numéraire dans les PME à actionnariat familial.



III. Patience


Dans l’hypothèse où votre société réunit les conditions pour bénéficier du précompte mobilier réduit, elle devra patienter jusqu’à la clôture du 3e exercice comptable pour faire bénéficier ses actionnaires d’une imposition réduite de moitié.


Elle pourrait malgré tout distribuer des dividendes avant ce terme mais le taux réduit sera graduel en fonction des exercices concernés ;


Distribution des dividendes


  • 1er exercice : précompte mobilier de 30 % ;
  • 2e exercice : précompte mobilier de 20 % ;
  • 3e exercice : précompte mobilier de 15 %.


IV. Quelles conditions satisfaire?


Les principales conditions cumulatives sont :

  1. La société distributrice doit être une petite société c’est-à-dire ne pas dépasser plus
    d’1 de ces 3 critères
    1. Chiffre d’affaires : 9 M EUR ;
    2. Total bilan : 4,5 M EUR;
    3. Personnel : 50 équivalents temps plein.
  2. Les dividendes proviennent de nouvelles actions ou parts nominatives, émises après le 1er juillet 2013, qui correspondent à des apports en numéraire (entièrement libérés). Le capital formé par des apports en nature ne donne donc pas droit à ce régime favorable.
  3. Les titres doivent être détenus de manière ininterrompue depuis leur création.


V. Comparaison chiffrée


En clair, une société qui distribuerait chaque année des dividendes bruts de 20.000 EUR et qui pourrait appliquer le VVPRbis attribuera un cumul net, sur 3 exercices, de 51.000 EUR comparativement) à 42.000 EUR, soit + 9.000 EUR net en faveur des actionnaires.





VI. Les anciennes sociétés définitivement hors jeu ?


Heureusement pas tout à fait, dans la mesure où elles augmentent leurs fonds propres et si les actionnaires reçoivent des nouvelles actions.


L’effet sera par contre dilué puisqu’il subsistera des anciennes actions ne pouvant bénéficier du taux de précompte mobilier réduit et c’est seulement sur les nouvelles actions (et après 3 exercices) que le régime VVPRbis pourra s’appliquer.


Le fait que les sociétés existantes avant juillet 2013 soient exclues de ce régime se justifie officiellement par le fait qu’elles pouvaient bénéficier d’un autre régime de faveur.



VII. Tuer n'est pas jouer


Pour les sociétés ayant des actions émises avant juillet 2013, il eut été tentant de “tuer” l’ancien capital afin de le reformer par une nouvelle émission d’actions, ceci afin d’être pleinement éligible pour le VVPRbis.

Ces tentatives risquent d’être traitées comme un abus fiscal et donc faire perdre l’avantage recherché.



VIII. Les bienfaits de l’introduction du nouveau code des sociétés et associations sur le VVPR-bis


Depuis le 1er mai 2019 et l’entrée en vigueur du nouveau Code des Sociétés et des Associations (“CSA”), l’exigence et la référence à un capital minimum pour les sociétés à responsabilités limitées (“SRL”) et les sociétés coopératives (“SC”) ayant disparu, l’article 269 CIR/92 a fait l’objet d’une modification.


Pour les sociétés constituées à partir du 1er juillet 2013 mais avant le 1er mai 2019, la principale question était de savoir si le capital non versé devait d’abord être libéré afin que les dividendes associés à ce capital puissent bénéficier du régime.

En effet, la condition de la libération intégrale du capital est restée inchangée dans les textes du Code des Impôts sur les Revenus (“CIR”).


Selon deux décisions anticipées en matières fiscales (“rulings”), cette libération n’est toutefois plus nécessaire et une SRL pourra malgré tout, après la refonte de ses statuts en conformité avec le CSA et transformation des apports indisponibles en disponibles, verser des dividendes donnant droit au régime VVPRbis, notamment en réduisant son « capital » à l’euro symbolique.



IX. Actualisez vos statuts avant 2024


Rappelons, que toutes les sociétés constituées avant le 1er mai 2019 ont jusqu’au 1er janvier 2024 pour adapter leurs statuts. Si votre société a été constituée entre juillet 2013 et le 1er mai 2019, c’est donc un sérieux incitant pour mettre vos statuts en conformité avant l’échéance ultime de 2024.


Au 1er janvier 2020, le capital non versé d’une SRL doit être automatiquement transféré vers un sous-compte de réserve indisponible au sein des capitaux propres (Apport non appelé).


Si les statuts sont mis en conformité avec le CSA, cette contribution indisponible (= non distribuable) peut être rendue disponible (= distribuable).

Dans ce cas, l’obligation de libération intégrale pourra être levée et permet ainsi l’accès au VVPRbis sous réserve du respect des autres conditions.



Que faut-il en retenir ?
  • C’est relativement rare de pouvoir diviser par 2 l’impôt comparativement à d’autres contribuables, le VVPRbis est donc un excellent exemple de l’égalité toute relative de l’impôt (certainement pour les sociétés constituées avant juillet 2013) ;
  • L’obligation d’adapter ses statuts avant le 1er janvier 2024 concerne une majorité de sociétés, par contre le faire avant peut présenter un indéniable intérêt pour qui souhaite bénéficier du régime VVPRbis ;
  • Des actions préférentielles ne donnent pas droit au taux de précompte mobilier réduit ;
  • Si vous aviez une société qui disposait d’un capital partiellement libéré, mettez vos statuts en conformité avec le CSA en réduisant le capital (par dispense de libération) au montant effectivement libéré ;
  • Il existe un autre taux de précompte mobilier réduit (10 %) mais suivant un autre processus et uniquement si la distribution intervient au moment de la clôture de liquidation d’une société (donc nettement moins évident à faire appliquer) ;
  • Sauf quelques exceptions, si vous cédez les actions éligibles au VVPRbis, elles ne pourront plus l’être pour votre acquéreur (car la condition de détention ininterrompue depuis la libération ne sera plus satisfaite). Donc inutile d’acheter les actions d’une société dormante datant d’après juillet 2013 pour obtenir le bénéfice de cette mesure.


Source : anticiper.tax, 23 janvier 2020


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