Structuration immobilière et durabilité : la déduction d'investissement révisée

Le parlement belge a adopté la réforme de la déduction d'investissement, l'un des principaux incitatifs fiscaux de la Belgique en matière de durabilité des bâtiments. Quelle est l'importance de cette réforme pour les investisseurs acquérant, rénovant ou transformant autrement des biens immobiliers professionnels ?


Le régime actuel jusqu'au 31 décembre 2024

Pour des détails sur le régime actuel, veuillez vous référer à un article précédent La déduction d'investissement belge : ce qui va changer ? mais en résumé, cela se résume à ce qui suit : les entreprises (indépendants et sociétés) peuvent, sous certaines conditions, bénéficier d'une déduction fiscale pour les investissements dans des actifs fixes tangibles et intangibles. Le montant de cette déduction dépend de (a) le type d'entreprise et (b) la nature de l'investissement.

La déduction d'investissement générale de 8 % n'est disponible que pour les petites entreprises et les indépendants. Cependant, il existe également une série de déductions spéciales, généralement à un taux plus élevé, et celles-ci sont ouvertes à tous les contribuables, y compris les grandes entreprises. Dans le cadre du régime actuel, les investisseurs immobiliers peuvent compter sur une déduction spéciale de 20,5 % pour certains investissements en économies d'énergie énumérés dans un arrêté royal. Ceux-ci incluent, par exemple,

  • pour les bâtiments construits avant 1980 : certains travaux d'isolation ou travaux pour limiter les pertes de ventilation
  • récupération de chaleur résiduelle
  • récupération de chaleur résiduelle provenant d'équipements de production ou de climatisation en service
  • utilisation de l'énergie éolienne (par exemple, installation d'éoliennes)
  • capture de la radiation solaire directe ou diffuse (par exemple, installation de panneaux photovoltaïques)


Le nouveau régime pour les investissements réalisés à partir du 1er janvier 2025

Le nouveau régime rationalise l'allocation d'investissement et la divise en 3 catégories :

  • la déduction de base, qui est ouverte aux indépendants et aux PME (nous nous référons à notre précédent article);
  • la déduction technologique, qui concerne les investissements dans les brevets et les investissements respectueux de l'environnement pour la R&D ; et
  • la déduction thématique augmentée.

Pour les investisseurs immobiliers, cette dernière catégorie est la plus pertinente et couvre les types d'investissements suivants :

  • investissements dans l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables ;
  • investissements dans les transports sans émissions de carbone ;
  • investissements respectueux de l'environnement ;
  • soutien aux investissements numériques (c'est-à-dire, investissements liés aux trois catégories d'investissement mentionnées ci-dessus).

La déduction d'investissement s'élèvera à 30 % de l'investissementvalue et est disponible pour toutes les entreprises selon les conditions mentionnées ci-dessous.


Plongée approfondie dans les conditions

a. Investissements éligibles

L'investissement éligible sera déterminé par un arrêté royal qui sera soumis à une mise à jour régulière. Et c'est peut-être là le plus grand changement.

Le nouveau régime prévoit que la liste des investissements éligibles sera valable pendant 3 ans, avec une possibilité d'une extension de 2 ans. Après cette période, une nouvelle liste ou une liste mise à jour des investissements éligibles sera promulguée. L'objectif est d'encourager le gouvernement belge à évaluer fréquemment la liste des investissements éligibles et à les renouveler, compte tenu du développement rapide des technologies. Le ministre a également déclaré que lors de l'élaboration de la liste des investissements éligibles, l'impact budgétaire sera pris en compte. Ainsi, bien que le pourcentage soit plus élevé qu'aujourd'hui, moins d'investissements pourraient être éligibles. Enfin, le ministre a également estimé que les investissements éligibles ne devraient pas inclure ceux qui sont suffisamment rentables même sans déduction d'investissement.

Bien que les principes soient fixés, l'arrêté royal pour établir la liste des investissements éligibles n'a pas encore été promulgué.

b. Subventions fédérales pour les obligations régionales ?

Dans la région flamande, à partir de 2025, les permis de construire n'autoriseront la construction de chauffage que via une pompe à chaleur, un réseau de chaleur, une chaudière à biomasse ou un chauffage électrique direct. Les bâtiments doivent également fournir une part minimale d'énergie renouvelable via leur propre production. Cette part minimale d'énergie renouvelable est de 15 kWh/m² d'énergie solaire pour un nouveau bâtiment et de 20 kWh/m² pour une unité non résidentielle par le biais de 1 ou plusieurs des techniques suivantes : panneaux solaires, chauffe-eau solaire ou participation.

Récemment, la région de Bruxelles a également introduit une obligation de rénovation exigeant que les bâtiments résidentiels et non résidentiels atteignent un EPB minimum dans quelques années.

Dans la détermination de la liste des investissements éligibles, le gouvernement fédéral prendra-t-il en compte ces obligations légales régionales et ouvrira-t-il les déductions d'investissement révisées aux entreprises qui doivent se conformer à ces obligations ? Il est concevable que le gouvernement puisse fournir des subventions pour permettre aux entreprises de se conformer à leurs obligations légales, mais ce n'est pas évident.

c. Certificat de l'autorité compétente : une clarification bienvenue

Pour bénéficier de la déduction thématique de 30 %, les contribuables doivent à nouveau joindre un certificat de confirmation de l'autorité compétente à leur déclaration de revenus annuelle. Le nouveau régime apporte certaines clarifications à cet égard.

Le certificat doit être obtenu auprès des services publics fédéraux pour :

  • les investissements dans l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables, ainsi que les investissements respectueux de l'environnement qui relèvent des compétences de l'État fédéral ;
  • les investissements dans les transports sans émissions de carbone ;
  • soutenir le numériqueinvestissements;
  • investissements réalisés dans la zone économique exclusive de la Belgique en mer du Nord (par exemple, des parcs éoliens dans la zone).

À cet égard, la clarification est plus que bienvenue compte tenu de l'incertitude juridique entourant ces investissements.

Le certificat doit être obtenu auprès des services régionaux compétents pour : les investissements en efficacité énergétique et en énergies renouvelables, ainsi que les investissements respectueux de l'environnement qui relèvent des compétences de la Région.

L'autorité compétente refusera de délivrer le certificat (i) si l'investissement n'est pas un investissement éligible tel que listé dans le décret royal (ii) si l'investissement cause un préjudice déraisonnable à l'environnement. Ce deuxième motif d'exclusion est une nouveauté et doit être évalué sur la base du test de Ne Pas Causer de Dommages Significatifs (DNSH) tel que défini à l'article 17 du Règlement Taxonomie (UE 2020/852).

Il convient de noter que le certificat est basé sur la liste des investissements éligibles en vigueur au moment où la demande de certificat est soumise. Le certificat ne perdra pas sa valeur si la liste est modifiée entre-temps.

d. Limitations

Il convient de noter que le décret royal peut limiter la déduction pour un ou plusieurs investissements éligibles, de manière à ce que la déduction thématique accrue de 30 % puisse être plafonnée à un montant maximum. Ce montant maximum peut, par exemple, être lié à certains critères tels que les kWh ou le CO² économisés.

Les travaux parlementaires donnent l'exemple suivant : un actif fixe exceptionnel et innovant acquis par une grande entreprise de production d'énergie a une valeur d'acquisition de 100 millions EUR, ce qui correspond à une déduction d'investissement de 30 millions EUR. Le décret royal pourrait plafonner la déduction pour une technologie de ce type à 10 millions EUR.

e. Report

La déduction thématique d'investissement accrue permet d'exempter (partiellement) les bénéfices imposables de l'année. En cas de bénéfice insuffisant, la portion inutilisée peut être reportée indéfiniment, pour être appliquée aux bénéfices imposables au cours des exercices fiscaux suivants.

f. Exclusions

La déduction thématique accrue pour investissement est exclue dans les cas suivants :

  • pour les investissements non listés comme investissements éligibles par décret royal;
  • pour les entreprises qualifiées d'« entreprises en difficulté » (entreprises en difficulté / ondernemingen in moeilijkheden) (voir ci-dessous);
  • contribuable transférant le droit d'utilisation à des tiers (voir ci-dessous);
  • pour les entreprises à l'égard desquelles il existe un ordre de recouvrement en cours en vertu d'une décision de la Commission européenne concernant les aides d'État;
  • pour les entreprises qui ont demandé une aide régionale concernant les actifs fixes qui feraient passer le soutien total du gouvernement au-dessus dethe EU-accepted threshold.

g. Exclusion spécifique : entreprises en difficulté

La déduction d'investissement ne peut pas être appliquée par les entreprises en difficulté (entreprises en difficulté / ondernemingen in moeilijkheden), sans que les travaux parlementaires ne définissent ou ne commentent davantage ce concept. Dans le régime actuel, cette exclusion a été introduite en 2021 et était spécifiquement applicable uniquement à la déduction d'investissement liée aux camions sans carbone et à l'infrastructure de recharge pour l'hydrogène bleu, vert ou turquoise et l'infrastructure de recharge électrique. Dans sa circulaire 2021/C/115 sur la verdissement fiscal de la mobilité, les autorités fiscales n'ont pas non plus commenté cette exclusion spécifique.

Que signifie cela ?

D'après notre expérience, les autorités fiscales (régionales) ont parfois fait référence au concept d'entreprises en difficulté tel que défini par le Règlement de la Commission (UE) n° 651/2014 sur les aides d'État. Selon ce règlement, une « entreprise en difficulté » désigne une entreprise à l'égard de laquelle au moins une des circonstances suivantes se produit :

  • Dans le cas d'une société à responsabilité limitée, lorsque plus de la moitié de son capital social souscrit a disparu en raison de pertes accumulées (non applicable à certaines PME).
  • Dans le cas d'une société où au moins certains de ses membres ont une responsabilité illimitée pour les dettes de la société, lorsque plus de la moitié de son capital tel qu'indiqué dans les comptes de la société a disparu en raison de pertes accumulées (non applicable à certaines PME).
  • Lorsque l'entreprise est soumise à une procédure collective d'insolvabilité ou remplit les critères de son droit national pour être placée en procédure collective d'insolvabilité à la demande de ses créanciers.
  • Lorsque l'entreprise a reçu une aide de sauvetage et n'a pas encore remboursé le prêt ou mis fin à la garantie, ou a reçu une aide à la restructuration et est toujours soumise à un plan de restructuration.
  • Dans le cas d'une entreprise qui n'est pas une PME, où, au cours des deux dernières années, le ratio de la dette à l'équité de l'entreprise a été supérieur à 7,5 et le ratio de couverture des intérêts EBITDA de l'entreprise a été inférieur à 1,0.

Cette exclusion mérite rapidement une explication de l'administration fiscale car elle pourrait être extrêmement préjudiciable au secteur immobilier, du moins dans les deux premières situations mentionnées ci-dessus. En effet, l'équité d'une société possédant des biens immobiliers telle qu'indiquée dans ses comptes selon les normes comptables belges peut ne pas refléter du tout la situation financière de cette société puisque les normes comptables belges sont basées sur la valeur historique (par opposition à la juste valeur marchande des actifs immobiliers) et les amortissements pris (au fil du temps) sur l'actif, qui ne correspondent pas à un coût effectif, peuvent avoir mathématiquement diminué l'équité de la société sans toutefois avoir d'impact sur la solvabilité de la société.

h.Specific exclusion: utilisez-le vous-même

Le contribuable doit utiliser l'investissement pour sa propre activité, et le bénéfice de la déduction d'investissement sera perdu si l'utilisation de l'investissement éligible est transférée à un tiers.

La déduction d'investissement ne s'appliquera pas dans les deux situations suivantes :

  • Pour les investissements acquis ou créés dans le but de transférer le droit de les utiliser à un tiers, si l'actif peut être amorti par la société qui a acquis le droit. L'exclusion ne s'applique qu'au crédit-bail financier, au bail à long terme ou au droit de construction, ou à tout droit immobilier similaire (avec l'exclusion notable de l'usufruit). La loi exige que la déduction d'investissement soit réservée au propriétaire économique de l'actif qui peut l'amortir.

    Cette limitation ne s'applique que lorsque les investissements éligibles sont l'objet d'un tel crédit-bail financier ou droit en rem.

    Prenons un exemple avec des panneaux solaires, en supposant qu'il s'agisse d'un investissement éligible : Si le propriétaire d'un bâtiment a installé des panneaux solaires sur le toit et les a donnés en crédit-bail financier à un tiers, le propriétaire ne bénéficiera pas de la déduction d'investissement. Si ce propriétaire a accordé un droit de construire sur son toit à un tiers qui a installé (et utilise) les panneaux solaires, alors ce tiers bénéficiera de la déduction d'investissement.
  • Pour les investissements pour lesquels le droit d'utilisation a été transféré à un autre contribuable d'une manière différente de celles mentionnées ci-dessus. La jurisprudence récente montre que le bail est spécifiquement visé par cette seconde exclusion, cependant sous réserve d'une exception importante : cette exclusion ne s'applique pas si ce transfert a été effectué à une société qui elle-même satisfait aux conditions, critères et limites pour l'application de la déduction d'investissement à un pourcentage identique ou supérieur, qui utilise ces immobilisations en Belgique pour générer des bénéfices et qui ne transfère pas leur utilisation à un tiers en tout ou en partie.

    Tant que les locataires ne transfèrent pas cette utilisation à des tiers, le bénéfice de la déduction d'investissement entre les mains du propriétaire/propriétaire devrait rester.


Effet secondaire du Pilier 2 pour les investisseurs immobiliers concernés ?

Cette déduction d'investissement pourrait avoir un effet négatif pour les investisseurs immobiliers concernés par le Pilier 2 (pour plus de détails, référez-vous à notre article Pilier Deux et le secteur immobilier ). En effet, cette déduction des bénéfices imposables devrait diminuer leur montant de Taxes Couverte et donc leur Taux d'Imposition Effectif, ce qui pourrait entraîner un impôt supplémentaire en vertu du Pilier. Cela ne devrait pas avoirbeen the case with a qualifying tax credit, and this qualifying tax credit is well available in replacement of the technology deduction. In this respect, it seems that a difference in treatment is introduced between taxpayers depending on their sector of activity and investments; it remains to be seen whether this difference can be justified.


Quelle est la suite ?

Du côté de la durabilité, le Parlement européen et le Conseil ont adopté une nouvelle directive concernant les performances énergétiques des bâtiments. La directive a été publiée le 8 mai 2024 et entrera en vigueur le 28 mai 2024, sous réserve d'une mise en œuvre progressive par les États membres de l'UE. Cette nouvelle directive fixe des principes directeurs pour que les États membres de l'UE mesurent et améliorent les performances énergétiques des bâtiments et, pour les investisseurs immobiliers, ces améliorations devraient se traduire par de nouveaux investissements pour lesquels la déduction d'investissement pourrait être avantageuse.​​

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