
Un meilleur usage de la fiscalité énergétique pourrait à la fois améliorer la situation financière des pays en développement et faire baisser la pollution. Les pays en développement pourraient lever des recettes publiques qui leur font cruellement défaut et réduire parallèlement les émissions et la pollution atmosphérique en utilisant mieux les taxes sur l’énergie et en réduisant les subventions aux combustibles fossiles, comme l’indique l’OCDE dans un nouveau rapport.
Les programmes de relance économique offrent aux pays l’occasion de privilégier des stratégies de développement durable, tout en prenant les mesures nécessaires à la mobilisation des ressources intérieures. La tarification du carbone et la réforme des subventions aux combustibles fossiles peuvent constituer des outils puissants pour encourager les choix de développement bas carbone et contribuer à la mobilisation des ressources intérieures.
En plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre, la tarification du carbone peut faire reculer la pollution atmosphérique locale et l’activité informelle, et faciliter un alignement de la coopération pour le développement et de l’action climatique.
Dans les 44 pays de l’OCDE et du G20 étudiés dans le rapport Taxing Energy Use 2019, ce sont quelque 70 % de ces émissions qui sont entièrement exonérées de taxes, ce qui montre que tous les pays doivent mieux prendre en compte les effets néfastes de la consommation d’énergie dans la politique fiscale.

Le projet « Taxer la consommation d’énergie au service du développement durable : Opportunités de réforme de la fiscalité et des subventions énergétiques dans dans certaines économies émergentes et en développement» porte sur 15 économies de marché émergentes et en développement.
Il présente les données et les indicateurs nécessaires pour accompagner les réformes de la tarification du carbone dans ces 15 pays, dont il compare le contexte macroéconomique et stratégique à celui des pays de l’OCDE.
Le but est d’informer les responsables publics afin qu’ils puissent traduire des ambitions politiques de haut niveau, telles que celles exprimées dans l’Accord de Paris et dans les objectifs de développement durable (ODD), en action concrète au niveau national.
Le rapport se concentre sur des économies en développement et émergentes qui ont manifesté un intérêt initial pour la réforme de la fiscalité de l’énergie et des subventions aux combustibles fossiles au travers de leur participation à des initiatives telles que la Coalition des ministres des Finances pour l’action climatique.
Les pays étudiés couvrent différentes régions du monde : Afrique du Nord et subsaharienne, Amérique latine et Caraïbes, et Asie.
En voici la liste :
La crise du COVID-19 a entraîné une baisse sensible de la production économique et de la consommation d’énergie, mais les économies devraient retrouver leurs niveaux d’avant la crise dans les années à venir.
Avant cette crise, les pays couverts enregistraient une forte croissance, supérieure dans la plupart des cas à celle de la zone OCDE. Les besoins énergétiques augmentaient dans le même temps, quoique à des taux nettement plus faibles. Il en était de même des émissions de CO2 liées à l’énergie, ce qui est positif du point de vue du climat et de l’efficacité d’utilisation des ressources.
Les niveaux actuels de mobilisation des ressources intérieures et d’accès à l’énergie sont très différents dans les pays examinés et dans les pays de l’OCDE. Alors que le ratio impôts/PIB s’établit en moyenne à 34% dans la zone OCDE, la mobilisation des ressources intérieures demeure un problème pressant dans bon nombre des pays couverts, parmi lesquels ce ratio n’est que de 19 % en moyenne. Les pays examinés ont besoin de faire progresser l’accès de leur population à l’énergie, tandis que les pays de l’OCDE peuvent généralement se contenter de maintenir un accès universel. Ces différences influent forcément sur les lignes d’action envisageables et sur les mesures nécessaires dans les pays couverts par rapport aux pays de l’OCDE.
Aucun des pays étudiés n’est doté d’une politique explicite de tarification du carbone.
Cependant, tous perçoivent des taxes sur l’énergie telles que des droits d’accise sur les combustibles, qui engendrent des recettes publiques et exercent une influence – souvent bénéfique à l’environnement – sur les incitations en matière de consommation d’énergie. La tarification du carbone imposera moins d’arbitrages sociaux, économiques et environnementaux si elle s’accompagne de mesures qui assurent un accès abordable à des solutions de substitution plus propres.
Plusieurs pays subventionnent certaines formes de consommation d’énergie. Ces subventions pèsent sur les finances publiques et sont souvent préjudiciables à l’environnement en ce qu’elles encouragent la consommation d’énergie.
Dans la plupart des pays étudiés, les recettes fiscales dépassent le coût des subventions, ce qui signifie que l’effet net est positif pour les finances publiques.
En moyenne, la contribution globale aux finances publiques et à la mobilisation des ressources intérieures représente environ 0.5 % du PIB dans ces pays. Dans les pays de l’OCDE, les taxes sur la consommation d’énergie contribuent de façon plus importante aux finances publiques. Le produit net des taxes énergétiques y est de l’ordre de 1.6 % du PIB en moyenne.
En règle générale, les pays étudiés appliquent déjà des droits d’accise sur les produits énergétiques, de sorte qu’il serait relativement simple, sur le plan administratif, de réformer la fiscalité du carbone. Comme dans les pays de l’OCDE, les combustibles les plus polluants, à commencer par le charbon, sont souvent parmi les moins taxés. Le taux effectif d’imposition du carbone (TEC) est le prix total qui s’applique aux émissions de CO2 provenant de la consommation d’énergie sous l’effet des taxes et des échanges de droits d’émission, déduction faite des subventions aux combustibles.
Les énergies fossiles de chauffage, de cuisson et d’éclairage font souvent l’objet de tarifs réduits ou subventionnés. Il convient de bien réfléchir avant d’accroître les tarifs applicables à ces produits énergétiques en raison de leurs très probables répercussions imprévues. Un retour au charbon de bois, par exemple, pourrait aggraver la situation sanitaire, environnementale et budgétaire.
L’accessibilité financière constitue également une grande source de préoccupation.
Les pays étudiés seraient à même d’accroître leurs recettes publiques d’environ 1 % du PIB en moyenne s’ils appliquaient une tarification du carbone sur les énergies fossiles équivalente à l’estimation basse du coût des émissions, soit 30 EUR par tonne de CO2. Cela étant, le potentiel de recettes varie sensiblement d’un pays à l’autre, ce qui reflète les écarts de niveau d’imposition et les différences dans les schémas de consommation d’énergie avant la réforme.
Sachant que certains pays n’utilisent pas actuellement le charbon, la réforme de la tarification du carbone, seule ou conjuguée à d’autres mesures environnementales comme l’interdiction de la consommation de charbon, pourrait permettre dans certains cas de sauter purement et simplement l’étape des énergies fossiles les plus polluantes.
Une telle évolution limiterait le potentiel de recettes de la tarification du carbone, mais serait synonyme à long terme d’économies pour les contribuables en évitant aux pays d’être confrontés à des actifs non reconduits et des emplois non reconduits lorsque l’accélération de la transition énergétique fera perdre de la valeur aux actifs à fortes émissions de carbone.
Source: OCDE, 21 janvier 2021
> Lire le communiqué de presse
> Lire le rapport Taxer la consommation d’énergie au service du développement durable
> Consulter les notes par pays comprenant des estimations des effets de la réforme de la fiscalité et des subventions sur les recettes publiques
> Le rapport Effective Carbon Rates 2021, que l’OCDE publiera dans les prochains mois, analysera la tarification des émissions de carbone dues à la consommation d’énergie dans des économies avancées et émergentes à l’aune du coût effectif de ces émissions sur le plan climatique.