Le 3 avril 2025, la CJUE a rendu un arrêt important concernant l'application de la théorie de l'abus de droit dans le cadre de la directive mère-fille.
Nordcurrent Group UAB ("Nordcurrent") est une société lituanienne de création et de distribution de jeux vidéo. Depuis 2009, elle dispose d'une filiale au Royaume-Uni chargée de la vente et de la distribution de jeux.
En 2017-2018, Nordcurrent a transféré la majorité des fonctions et des risques de la filiale britannique à la société mère en Lituanie. La filiale ne disposait plus que d'une employée (sa directrice, également directrice de sept autres sociétés), n’avait ni locaux ni actifs au Royaume-Uni. Toutefois, cette filiale était nécessaire pour distribuer des jeux vidéo, jusqu'à ce que Nordcurrent puisse s’en charger elle-même. Elle a ensuite été liquidée en 2021.
Nordcurrent a appliqué l'exonération des dividendes (fondée sur la directive mère-fille) perçus de la filiale britannique en 2018 et 2019.
L’administration fiscale lituanienne a refusé l’exonération, prétendant que la filiale britannique était un "montage non authentique" visant à obtenir un avantage fiscal.
La théorie des "montages non-authentiques" applicable dans l'État de la mère : La CJUE confirme que les États membres de résidence des sociétés mères peuvent refuser l’exonération fondée sur la directive mère-fille, même lorsque la filiale distributrice n’est pas une société relais et même si les dividendes distribués sont issus de son exploitation, si elle est considérée comme un "montage non authentique" (c’est-à-dire, un montage mis en place principalement pour obtenir un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet de la directive).
Évaluation des montages : Lorsqu’un montage est constitué de plusieurs étapes, la CJUE précise que l’évaluation de son authenticité doit tenir compte de l’ensemble des faits et circonstances pertinents (notamment les motifs commerciaux valables et la réalité de l’activité), et non uniquement ceux existant au moment de la distribution des dividendes.
Conditions de l'abus de droit : La CJUE rappelle que deux conditions doivent être remplies pour qu’il y ait abus :
L’existence d’un "montage non authentique" ; et
La recherche d’un avantage fiscal dont l’obtention serait contraire à l’objectif de la directive.
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