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Régime CFC et holdings belges: la Cour constitutionnelle rejette le recours, mais la CJUE pourrait avoir le dernier mot!

CFC – recours en annulation devant la Cour constitutionnelle rejeté : perspectives d’avenir pour les (sous-)holdings (passives vs. animatrices)

J’ai eu le plaisir de répondre à certaines questions de L’Echo à propos de l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle le 15 mai 2025, qui a rejeté le recours en annulation introduit contre la réforme du régime belge des sociétés contrôlées à l’étranger (CFC), issue de la loi-programme du 22 décembre 2023 (sur cet arrêt, voir également mon post précédent).

L’une des critiques centrales portait sur l’incompatibilité alléguée de la clause de sauvegarde — l’exception dite de substance — avec les libertés de circulation consacrées par le droit européen.

1. Pour une holding, même active, invoquer l’exception de substance est souvent illusoire

Lorsqu’une filiale est elle-même une société holding, invoquer l’exception de substance prévue par la loi belge devient extrêmement difficile — pour ne pas dire pratiquement impossible — même lorsque :

  • Les administrateurs se réunissent régulièrement au siège de la filiale pour y prendre des décisions stratégiques, et
  • La société dispose d’une infrastructure locale suffisante.

Seules certaines holdings dites “animatrices”, disposant d’un personnel spécialisé (profil financier, technique, etc.), pourraient encore bénéficier de cette exception.

→ Voir en ce sens la décision anticipée n° 2024.0442 du 9 juillet 2024, favorable à une filiale grecque animatrice.

2. Recours en annulation rejeté : absence d’intérêt à agir au moment de l’introduction

L’arrêt de la Cour constitutionnelle est décevant sur le fond, car la Cour ne statue pas sur la validité constitutionnelle du régime CFC en soi. Elle rejette le recours faute d’intérêt à agir de la partie requérante.

La Cour rappelle un principe de procédure essentiel :

L’intérêt à agir doit exister dès l’introduction du recours. Il ne peut être créé en cours de procédure.

Dans le cas d’espèce, la société requérante avait acquis une SCI française translucide postérieurement au dépôt de sa requête — ce qui a conduit au rejet pur et simple de celle-ci.

3. Quelles perspectives pour contester la réforme ? Vers des questions préjudicielles à la CJUE ?

Il semble peu probable que le législateur belge revienne spontanément sur sa copie pour aligner l’exception de substance sur les exigences du droit européen.

Dès lors, seules les procédures judiciaires individuelles pourront encore permettre d’en contester l’application, en invoquant l’incompatibilité du régime CFC avec les libertés fondamentales de l’Union européenne.

Les contribuables concernés pourraient demander au juge fiscal de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), afin de faire contrôler la compatibilité du régime belge avec les articles du TFUE relatifs à la liberté d’établissement et à la libre circulation des capitaux.

Mais ce scénario suppose de s’engager dans un contentieux fiscal long, complexe et coûteux, avec une issue incertaine, ce qui n’est pas sans décourager nombre de sociétés belges confrontées à ces nouvelles règles.

Conclusion

L’arrêt du 15 mai 2025 ne clôt pas le débat juridique autour du régime CFC belge, mais en reporte le traitement vers les juridictions ordinaires et européennes.

Dans cette configuration, les holdings belges — et plus encore les sous-holdings passives — doivent redoubler de vigilance dans leur structuration, leur documentation et leur capacité à justifier une réelle substance économique pour éviter l’application de cette fiscalité extraterritoriale renforcée.

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