Décisions anticipées: plaidoyer pour une juste appréciation du rôle du SDA

Le Service des Décisions Anticipées (SDA) voit son fonctionnement interne remis en cause et certains de ses rulings contestés par les services centraux de l’administration fiscale. Je remercie vivement François Mathieu de m'avoir permis de relativiser certaines de ces critiques dans La Libre.

À propos des conditions / engagements du SDA

L'une des critiques tient au fait que le SDA imposerait des "règles extralégales". À mon avis, il faut nuancer le propos:

  • Le SDA doit appliquer des dispositions fiscales souvent vagues et floues. Aussi, il me semble tout à fait naturel que le SDA puisse disposer d’une certaine marge de manœuvre : l’application de la loi fiscale n’est pas une opération mécanique.
  • Dans ce contexte, je ne vois pas de problème à ce que le SDA pose des conditions ou des engagements non expressément prévus par la loi fiscale, sans être nécessairement contraires à celle-ci.
  • Le respect de pareilles conditions est le prix à payer pour la sécurité juridique que confère une décision anticipée…

Illustration : l'engagement de réinvestissement (cession d'actions post-scission)

  • Dans le cadre de dossiers de scissions partielles suivie par une cession d'actions, le SDA subordonne généralement l’octroi de ses rulings (certifiant la non-application des articles 183bis / 344,§1er du CIR) à un engagement de réinvestissement du prix de cession des actions dans une activité économique générant des revenus imposables.
  • Cette condition n'est certes pas tirée explicitement du texte légal. Mais est-elle contra legem ? Non. Dans une décision récente du tribunal de Bruxelles (3 février 2020),
    • le juge a rejoint la position du SDA et estimé (à rebours des prétentions du contribuable) que pareille exigence de réinvestissement n’était pas déraisonnable
    • et n’ajoutait pas une "condition extra legem" au texte de l’article 183bis CIR. L’absence d’intention d’un tel réinvestissement a été jugée pertinente pour apprécier l’existence ou non de « motifs économiques valables » au sens de cette disposition.

Pour une autre application jurisprudentielle récente validant cette condition de réinvestissement : voir la décision du tribunal d'Anvers du 25 mars 2024.

Quand le juge fiscal vole au secours du SDA

Voir à cet égard mon précédent post, commentant un jugement du tribunal de première instance d'Anvers du 5 juin 2024.

Fonctionnement

Je suis loin d'être le seul à être satisfait du fonctionnement du SDA.

Il suffit d'aller voir les nombreux hommages (plus de 500) de praticiens de la fiscalité (avocats fiscalistes, conseillers fiscaux,...) reçus sur LinkedIn il y a quelques semaines, par l'ex-président du SDA lorsqu’il a rejoint le cabinet du nouveau ministre des Finances...

À noter enfin que le gouvernement Arizona entend valoriser l'expertise dans la nomination des fonctionnaires du SDA.

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