Non.
Quand on s’intéresse à l’évolution de la dette publique, qu’on l'exprime d'ailleurs en pourcentage de la création de richesse nationale, le PIB, tant les chiffres absolus sont effarants, on ne peut pas circonscrire l’analyse à un présent immédiat.
Cette dette publique est l’héritage des Trente Glorieuses, ces trois décennies d'après-guerre caractérisées par un effet de rattrapage et une croissance insolente, alimentée par une démographie extraordinaire et le consumérisme.
Puis vinrent les années 70, cette décennie maudite, qui vit s’écrouler les accords monétaires d’après-guerre, les secteurs industriels et le plein emploi, avant l’entrée dans le néolibéralisme des années 80.
C’est à ce moment charnière que tous, collectivement, nous avons choisi d’endetter la collectivité au bénéfice de nos prospérités individuelles.
Nous n’avions pas voulu prévoir le coût du vieillissement de la population, les aléas de la conjoncture, les contingences des événements.
Et chaque fois, l’État s’est substitué à l’épargne, à un point tel que pendant dix ans, après la crise de 2008, il a fallu demander à la BCE de refinancer les États, c’est-à-dire de solder le coût de l'État social, par une impression de monnaie ex nihilo.
L'endettement public va inévitablement augmenter car il va devoir absorber l’augmentation des coûts collectifs associés au vieillissement de la population, alors que la croissance va être négativement impactée par ce dernier.
L’épargne bancaire et les réserves d’assurances seront canalisées vers le financement de l’État, au détriment des épargnants et des assurés.
Et finalement, on en arrivera à une conviction que j’ai acquise depuis 15 ans : la dette publique est une immense redistribution, une sécurité sociale au-dessus de la sécurité sociale. C’est un lien collectif, intergénérationnel qui assure une certaine cohésion sociale entre le capital et le travail.
Et c’est, contrairement à ce que j’ai pu affirmer il y a une dizaine d’années, beaucoup moins grave qu’on ne le pense.
D’ailleurs Karl Marx assimilait la dette publique à …un capital fictif.