Dans 3 décisions récentes les juges ont sanctionné avec sévérité le comportement de contrôleurs fiscaux ("les frères qui rappent tout"), qui avaient outrepassé leurs pouvoirs en imposant à des contribuables, de bonne foi, des obligations formelles disproportionnées.
Dans la première affaire (trib. Anvers, 19 février 2024), un contrôleur a refusé la déduction des sommes payées à des sociétés établies dans un paradis fiscal (prestations reconnues réelles) alors que le formulaire qui est requis à cet effet (formulaire 275F) avait bien été introduit, mais le détail de tous les payements et les pays concernés, avait été repris dans un fichier Excel joint (dans biztax). Mais, pour le contrôleur, disposant pourtant des informations nécessaires, tout devait être remis sur le formulaire 275 F. Ce formalisme grotesque du taxateur a été dénoncé par le tribunal qui rappelle que, dans cette affaire, le fond doit primer la forme, et que les contribuables avaient parfaitement respecté leurs obligations légales.
Dans la deuxième affaire (Anvers 16 janvier 2024), le contrôleur a refusé d’admettre le contenu d’un avis positif obtenu par BELSPO, avis qui est requis pour avoir la dispense de précompte professionnel des chercheurs. Il prétendait qu'il fallait ajouter d’autres éléments à la demande formulée à BELSPO, notamment quant à la durée du programme. En clair, le fisc doute ici de la véracité des déclarations de BELSPO. La cour d’appel dénonce l'excès de zèle et rappelle qu’il n’y a aucune raison de douter de la portée des avis contraignants de BELPSPO, autorité publique indépendante.
Dans une troisième affaire, vraiment révoltante (B.W. 27 février 2024) le taxateur, faisant ici usage de l’art. 207 al.7 du CIR et qui s'était enorgueilli d’avoir appliqué un accroissement d'impôt de 20%, avait en outre refusé d'admettre la déduction pour investissement.
Motif de ce rejet : la déclaration fiscale introduite par le comptable avait 10 jours de retard (qu’importe qu’il résultât d’un événement involontaire !). Le juge déclare cette double sanction totalement disproportionnée par rapport à la très faible violation de la loi fiscale. La cour rappelle que la déclaration a été introduite spontanément et que le fisc n’a aucun travail supplémentaire à opérer du fait de la régularité de la déclaration fiscale. Le juge décide que le comportement abusif du contrôleur a produit une mesure non seulement disproportionnée, mais aussi inconstitutionnelle.
D'une part, on assiste à une véritable croisade à l’administration qui sanctionne à présent la moindre petite irrégularité formelle, avec une sévérité inouïe. Nous voilà avertis.
D’autre part on se rassurera de savoir que les tribunaux dénoncent de plus en plus souvent ce type de pratiques qui causent un préjudice considérable aux contribuables et sont inacceptables.