La Commission a publié le troisième rapport annuel sur l'état de droit

Ce rapport s'inscrit dans le contexte de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, qui a encore mis en évidence l'importance du respect des valeurs démocratiques, des droits de l'homme et de l'état de droit. Des recommandations spécifiques sont adressées aux Etats membres, à l'exemple de la Belgique dont vous trouverez le rapport en annexe.

Věra Jourová, vice-présidente chargée des valeurs et de la transparence, a déclaré: «L'état de droit reste un socle de la démocratie. La guerre menée par la Russie en Ukraine rappelle à nouveau l'importance des efforts que nous déployons pour respecter et promouvoir l'état de droit, aussi bien au sein de l'Union européenne qu'au-delà. Le rapport de cette année montre que le débat sur l'état de droit en Europe progresse à mesure que les États membres apportent des améliorations et traitent des questions relatives à ce sujet. Malheureusement, des inquiétudes subsistent à l'égard de certains États membres, en particulier en ce qui concerne l'indépendance du pouvoir judiciaire. Par ailleurs, pour la première fois, le rapport s'intéresse aux médias de service public. Des garde-fous sont nécessaires pour que l'indépendance des médias de service public soit protégée et pour que les financements publics soient adéquats et ne soient pas utilisés pour exercer une pression politique sur ces médias. Aujourd'hui, nous allons encore plus loin en formulant des recommandations sur la manière d'améliorer la situation de l'état de droit dans l'ensemble de l'Union. J'invite les États membres à suivre ces recommandations, à en débattre sérieusement et à agir en conséquence.»
Didier Reynders, commissaire à la justice, a quant à lui fait la déclaration suivante: «L'agression militaire russe non provoquée et injustifiée contre l'Ukraine montre que la protection et la promotion de l'état de droit sont plus importantes que jamais. Si l'Union européenne veut rester crédible, nous devons assurer le respect de l'état de droit sur notre territoire et continuer à renforcer la culture de l'état de droit. Je suis heureux de constater que notre rapport contribue à la réalisation de cet objectif. Il aide à faire avancer d'importantes réformes dans les États membres. Aujourd'hui, non seulement nous rendons compte de la situation de l'état de droit, mais nous recommandons également des moyens constructifs d'améliorer les systèmes de justice, d'intensifier la lutte contre la corruption et de garantir la liberté et l'indépendance des médias ainsi qu'un système solide d'équilibre des pouvoirs.»

Contexte

L'état de droit est essentiel pour tous les citoyens et toutes les entreprises de l'Union: il garantit les valeurs et les droits fondamentaux, il permet l'application du droit de l'Union et il favorise un environnement économique propice aux investissements. Il s'agit de l'une des valeurs fondamentales sur lesquelles l'Union européenne est fondée.

Le rapport annuel sur l'état de droit est le fruit d'un dialogue étroit avec les autorités nationales et les parties prenantes et couvre tous les États membres, sur une base objective et impartiale, en examinant les mêmes aspects. L'évaluation qualitative réalisée par la Commission se concentre sur les évolutions importantes intervenues depuis l'adoption du deuxième rapport sur l'état de droit en juillet 2021 et garantit une approche cohérente par l'application d'une méthode identique à tous les États membres, tout en restant proportionnée à ces évolutions. L'évaluation qui figure dans les chapitres par pays a été élaborée conformément au champ et à la méthodologie tels que mis à jour à la suite de discussions avec les États membres.

Le rapport est au cœur du mécanisme européen de protection de l'état de droit. Ce mécanisme est un cycle annuel visant à promouvoir l'état de droit et à prévenir l'apparition ou l'aggravation de problèmes. L'objectif du mécanisme est la prévention. Il est distinct des autres éléments de la panoplie d'outils de l'Union en matière d'état de droit et vient compléter, mais sans les remplacer, les mécanismes prévus par le traité pour permettre à l'Union européenne de résoudre des problèmes plus sérieux liés à l'état de droit dans les États membres. Parmi ces outils figurent les procédures d'infraction et la procédure visant à protéger les valeurs fondatrices de l'Union au titre de l'article 7 du traité sur l'Union européenne.

La troisième édition du rapport marque l'étape suivante de l'implication de la Commission dans la protection de l'état de droit, au moyen de recommandations spécifiques adressées à tous les États membres. Les recommandations ont été élaborées sur la base de l'évaluation effectuée dans les chapitres par pays et du dialogue avec les États membres, ainsi que dans le plein respect du principe d'égalité de traitement. Lors de l'élaboration de ces recommandations, la Commission a veillé attentivement à ce qu'elles restent ciblées et ancrées dans les normes européennes et à ce que les systèmes juridiques nationaux soient pris en compte. En outre, la cohérence et les synergies avec d'autres processus, tels que le Semestre européen, le mécanisme de conditionnalité budgétaire et la facilité pour la reprise et la résilience, sont garanties. Les prochaines éditions du rapport sur l'état de droit examineront les suites données aux recommandations. Les recommandations doivent être lues conjointement avec les évaluations effectuées dans les chapitres par pays, qui examinent des problèmes particuliers et dont le but est d'aider les États membres à agir pour y remédier.

Les difficultés recensées par les précédents rapports sur l'état de droit dans le domaine de la liberté et du pluralisme des médias ont donné lieu à plusieurs initiatives récentes de l'Union européenne, dont une recommandation sur la sécurité des journalistes et un ensemble de mesures visant à lutter contre les poursuites abusives altérant le débat public. La Commission s'attache actuellement à l'élaboration d'une proposition de législation européenne sur la liberté des médias.


Contenu

Il se compose d'un aperçu des tendances dans l'ensemble de l'Union européenne et de 27 chapitres par pays examinant l'évolution de la situation dans chaque État membre depuis juillet 2021. Le rapport de cette année contient pour la première fois des recommandations spécifiques adressées à chaque État membre, comme l'avait annoncé la présidente von der Leyen dans son discours sur l'état de l'Union 2021. Ces recommandations sont destinées à encourager les États membres à faire avancer les réformes en cours ou prévues et à définir les domaines dans lesquels des améliorations sont nécessaires.

Comme pour les éditions précédentes, ce rapport examine l'évolution de la situation dans quatre domaines clés pour l'état de droit: les systèmes de justice, le cadre de lutte contre la corruption, le pluralisme et la liberté des médias, ainsi que d'autres questions institutionnelles liées à l'équilibre des pouvoirs. Le rapport montre que des réformes de l'état de droit se sont poursuivies dans de nombreux États membres dans le but de remédier aux difficultés recensées dans les deux éditions précédentes. Dans le même temps, des préoccupations d'ordre systémique subsistent dans certains États membres.

Le rapport assure le suivi des difficultés recensées dans les rapports précédents, approfondit l'évaluation de la Commission et contient également des observations sur des questions telles que les médias de service public, l'utilisation de logiciels espions ou l'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme.

Principales conclusions et recommandations

> Réformes de la justice

Les réformes de la justice sont restées au premier rang des priorités politiques au cours de l'année écoulée. De nombreux États membres ont entrepris d'importantes réformes visant à renforcer l'indépendance de la justice, notamment des réformes liées à la composition et aux pouvoirs des conseils de la magistrature, à l'amélioration des procédures de nomination des juges ou au renforcement de l'autonomie des parquets. Des États membres ont également introduit des mesures destinées à améliorer l'efficience et la qualité de la justice, telles que la poursuite de la numérisation des systèmes de justice et la facilitation de l'accès à la justice.

Dans le même temps, des préoccupations d'ordre structurel persistent dans quelques États membres en matière d'indépendance de la justice. Certains États membres connaissent des difficultés en ce qui concerne les nominations au sein des juridictions supérieures et aux fonctions de présidents des juridictions. Dans d'autres, l'indépendance/autonomie des parquets suscite des inquiétudes et les procédures disciplinaires sont utilisées pour restreindre l'indépendance de la justice.

Pour remédier à ces problèmes, les recommandations de la Commission encouragent, par exemple, une plus grande participation du pouvoir judiciaire aux procédures de nomination et une plus grande autonomie des parquets, et exhortent les États membres à fournir des ressources adéquates aux systèmes de justice.

> Cadres de lutte contre la corruption



L'Union européenne reste l'une des régions les moins corrompues du monde. Depuis juillet 2021, de nombreux États membres ont adopté de nouvelles stratégies de lutte contre la corruption, ont révisé leurs stratégies existantes ou sont en train de les réviser. Plusieurs États membres ont mis les cadres existants en conformité avec les normes internationales de lutte contre la corruption et le droit de l'Union en la matière. La plupart des États membres ont une législation étendue en place qui dote leur système de justice pénale des outils nécessaires pour lutter contre la corruption. De nombreux États membres ont pris des mesures pour augmenter les capacités des autorités chargées des poursuites en matière de lutte contre la corruption, notamment en prévoyant des ressources ou des formations supplémentaires.

Toutefois, la corruption demeure un sujet de préoccupation majeur pour les citoyens de l'Union. L'enquête Eurobaromètre de 2022 sur la corruption montre, par exemple, que 68 % d'entre eux pensent que la corruption est répandue dans leur pays. Dans certains États membres, les enquêtes et les poursuites concernant des affaires de corruption sont longues et les jugements font toujours défaut, en particulier dans les affaires de haut niveau. Les agents publics sont soumis à des obligations de déclaration de patrimoine et d'intérêts dans tous les États membres, mais ces obligations varient en ce qui concerne la portée, la transparence et l'accessibilité des informations communiquées, ainsi que sur le plan du niveau et de l'efficacité de la vérification et de l'exécution.

Pour ce qui est des cadres de lutte contre la corruption, la Commission a formulé des recommandations relatives au renforcement des cadres préventifs, concernant par exemple les règles en matière de lobbying et de conflits d'intérêts, ainsi que la nécessité de veiller à ce que les affaires de corruption fassent effectivement l'objet d'enquêtes et de poursuites.

> Liberté et pluralisme des médias

Tant la pandémie de COVID-19 que la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine ont démontré le rôle crucial des journalistes dans la vérification des faits et l'information des citoyens. Plusieurs États membres ont adopté, renforcé ou envisagent de prendre des mesures destinées à améliorer la sécurité et les conditions de travail des journalistes, en s'appuyant sur les initiatives récentes de la Commission. Depuis le dernier rapport, plusieurs États membres ont déployé des efforts pour améliorer la transparence de la propriété des médias. Des inquiétudes subsistent en ce qui concerne le manque de transparence dans la diffusion de la publicité publique, les conflits d'intérêts et les obstacles liés à l'accès aux documents publics: il s'agit là de quelques-unes des questions importantes mises en évidence dans le rapport qui nécessitent une attention particulière.

Pour la première fois, le rapport s'intéresse également aux médias de service public, reconnaissant leur rôle particulier pour la société et la démocratie. Des garde-fous sont nécessaires pour que l'indépendance des médias de service public soit protégée et pour que les financements publics soient adéquats et ne soient pas utilisés pour exercer une pression politique sur ces médias, comme le prévoient les normes européennes.

Les conclusions du rapport s'appuient sur une série de sources, dont l'instrument de surveillance du pluralisme des médias (Media Pluralism Monitor – MPM 2022), la plateforme du Conseil de l'Europe pour renforcer la protection du journalisme et la sécurité des journalistes, ainsi que la plateforme Mapping Media Freedom.

La Commission a émis un certain nombre de recommandations concernant, entre autres, la répartition transparente et équitable de la publicité publique, la gouvernance indépendante des médias de service public et les mesures visant à améliorer la sécurité des journalistes. La future législation sur la liberté des médias visera à résoudre plusieurs des problèmes recensés dans les rapports sur l'état de droit.

> Équilibre des pouvoirs entre les institutions

Les États membres ont continué d'améliorer la qualité de leurs processus législatifs, une tendance observée dans les rapports 2020 et 2021 sur l'état de droit. Les cours constitutionnelles continuent de jouer un rôle clé dans le système d'équilibre des pouvoirs, notamment en ce qui concerne la surveillance des mesures d'urgence, ainsi que dans d'autres domaines tels que les élections. Les institutions de défense des droits de l'homme, les médiateurs et d'autres autorités indépendantes ont vu leur statut encore renforcé dans certains États membres. La majorité des États membres disposent d'un environnement favorable et porteur pour la société civile.

Toutefois, dans certains États membres, il n'existe toujours pas de cadre formel permettant de consulter les parties prenantes, ce qui est préoccupant, et les organisations de la société civile continuent de faire face à des défis tels que les problèmes de financement, des discours négatifs et des restrictions de leur espace de fonctionnement. Pour la première fois, le rapport se penche également sur l'exécution par les États membres des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme. Il s'attarde également sur les réactions de l'équilibre des pouvoirs des États membres à l'utilisation de logiciels espions. Tout en étant liée à la sécurité nationale, l'utilisation de ces outils devrait être soumise à l'équilibre des pouvoirs au niveau national.

Pour résoudre certaines de ces difficultés, la Commission a formulé des recommandations relatives, par exemple, à la participation des parties prenantes au processus législatif, à la création et au fonctionnement d'institutions nationales accréditées de défense des droits de l'homme et à la mise en place d'un cadre de fonctionnement ouvert pour la société civile.

Prochaines étapes

La Commission invite à présent le Parlement européen et le Conseil à poursuivre, sur la base de ce rapport, les débats généraux ainsi que ceux par pays. Elle invite également les parlements nationaux et les autres acteurs clés, y compris la société civile, à poursuivre le dialogue au niveau national sur l'état de droit. Enfin, la Commission invite les États membres à relever les défis recensés dans le rapport et se tient prête à les aider dans leurs efforts, y compris pour mettre en œuvre les recommandations.

Pour en savoir plus

Rapport 2022 sur l'état de droit – La situation de l'état de droit dans l'Union européenne

Rapport 2022 sur l'état de droit – Recommandations

Rapport 2022 sur l'état de droit – Chapitres par pays

Rapport 2022 sur l'état de droit – Évaluations globales et recommandations des chapitres par pays

Rapport 2022 sur l'état de droit – Méthodologie

Rapport 2022 sur l'état de droit – Questionnaire

Le mécanisme européen de protection de l'état de droit – Fiche d'information

La panoplie d'outils de l'Union en matière d'état de droit - Fiche d'information

Rapport 2022 sur l'état de droit – Questions et réponses

Eurobaromètre sur les perceptions et les expériences des citoyens vis-à-vis de la corruption

Eurobaromètre sur les attitudes des entreprises vis-à-vis de la corruption dans l'UE

Source : Commission Européenne, coin presse, Juillet 2022

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